Le seul exemplaire complet de Polonez Piedra est arrivé en Pologne en provenance de Belgique. Cette rareté était par le passé un exemplaire de démonstration de ce modèle qui devait être vendu sur les marchés d'Europe occidentale. La Polonez Piedra, avec un moteur diesel provenant canot à moteur, était censée être un succès. Mais elle n'y est pas parvenue.
Elle avait pour vocation, pour la République populaire de Pologne (PRL) en déclin, de devenir un modèle à succès à l’export. Cependant, ce projet a été un fiasco total. Seuls 23 exemplaires de Polonez Piedra ont été construits et un seul d'entre eux était entièrement complet. C'est celui-ci qui est revenu au pays des années plus tard…
Vous pouvez collectionner des voitures classiques relativement populaires à des prix modérés. Vous pouvez aussi investir dans des Ferrari ou des Porsche anciennes, en espérant un bon taux de rendement. Mais il existe aussi une troisième voie. Sauver les voitures bizarres de l'oubli, les rebuts dont personne ne veut, des erreurs ou impasses du développement automobile, des voitures que les constructeurs préféreraient souvent oublier.
Cette troisième voie est la plus intéressante. Quelqu'un s’intéressera pour une Lamborghini ancienne et les occasions d'en acheter ne manquent pas. Mais lorsqu'il s'agit d'une Medusa ou d'une Piedra, la situation est complètement différente. Ces voitures ne sont pas achetées à l'improviste suite à une annonce sur internet. Le bouche à oreille, un large réseau de contacts dans la communauté, l'intuition et un peu de chance sont nécessaires pour en trouver une. Et souvent ce n'est que la moitié de la bataille.
La fin de la période de prospérité sous Edward Gierek et la crise du début des années 1980 ont placé FSO dans une situation de non-retour. La quasi-totalité des fonds qui étaient censés être affectés au développement des futurs modèles ont disparu et les plans d'expansion de FSO se sont avérés n'être que des vœux pieux. Le niveau de production visé pour la Polonez, mentionné lors de l'arrivée du modèle sur le marché en 1978, peut également être qualifié de conte de fées. Il n'a jamais été possible d'introduire une version avec des moteurs modernes ou la traction avant. Le contrat avec Fiat, qui prévoyait l’arrivée d'une nouvelle mécanique dans la voiture polonaise, a été rompu. Et en Pologne, les clients se plaignaient du prix trop élevé de la Polonez.
En même temps, à l’époque communiste, l'usine de Zeran avait besoin de devises étrangères pour fonctionner. La grosse majorité des machines et des matériaux destinés à la production de voitures provenait d'Europe occidentale. Faire rentrer des devises convertibles était donc la priorité absolue. Surtout dans les années 1980, lorsque la crise s'aggravait et que la chaîne d'approvisionnement ne fonctionnait pas comme elle le devait.
C'est pourquoi, dès le début, un grand pourcentage de la production de la Polonez a été exporté et les acheteurs polonais ont parfois dû attendre des années pour obtenir la voiture de leurs rêves. Et FSO faisait ce qu'il pouvait pour encourager les clients des pays capitalistes à acheter la mécanique de la Fiat 1500 dans ce nouveau papier-cadeau. Sous le slogan « The No-Nonsense Car » et séduisant par ses prix bas, la marque polonaise a tenté de conquérir les marchés occidentaux. Et pour augmenter les ventes en Europe occidentale, FSO était également ouvert à toute proposition.
Les Polonez destinées à l'exportation étaient légèrement différentes de celles vendues en Pologne. Elles étaient soumises à des contrôles qualité plus stricts et étaient également mieux équipées. Souvent, les importateurs occidentaux ajoutaient des équipements supplémentaires. Mais finalement, peu de gens se laissaient tenter par ces Polonez suréquipées, la grande majorité des voitures vendues étaient des modèles de base. Quand on ajoutait quoi que ce soit à la liste des équipements disponibles, le prix de la Polonez atteignait le niveau, par exemple, de celui d'une Ford Escort c'est-à-dire un véhicule de catégorie supérieure. Dans le même temps, cela privait la Polonez de son principal atout - coûter le même prix qu'une voiture d'occasion de marque occidentale.
Cette question de prix est devenue de plus en plus désespérée à mesure que l’effondrement de l'économie communiste approchait. Les lignes de production de l'usine étaient dans un état déplorable et l’argent manquait pour les remettre en état. La qualité des véhicules quittant l’usine FSO diminuait de manière exponentielle. En raison de pénuries dans l'approvisionnement en matériaux et en composants, l'usine n'était pas en mesure d'exécuter correctement les commandes des importateurs, envoyant par exemple des berlines 125p au lieu de pickups plus recherchés. Souvent, FSO rencontrait également des problèmes de pénurie de pièces de rechange.
C'est dans ce climat qu'est né quelque chose qui, jusqu'à présent, est resté caché dans les ténèbres de l'histoire de l'automobile. L'enfant non désiré du mariage entre FSO et plusieurs entreprises des pays capitalistes. Un projet de 1988 auquel tous ceux qui y ont participé aimeraient oublier. La Piedra. Ce qui devait devenir la version plus économique de la Polonez, avec un petit turbodiesel, s'est avéré être un immense échec et quelque chose de compromettant. Et le seul exemplaire entièrement achevé n'aurait peut-être jamais pu réapparaître sans la détermination d'un homme.
Adolescent, Maciej a accidentellement acheté sa première Polonez pour 600 zlotys. Il en est tombé amoureux et en a acheté d'autres. Même la qualité médiocre de ces véhicules n'a pas pu tuer cet amour. Cet amoureux de longue date de la Polonez n'aime pas parler de lui. Les questions que l’on peut lui poser sur l'histoire de sa fascination pour FSO se soldent toujours par un soupir d'impatience.
Heureusement, il y a des choses qu'il est heureux de partager. Ses connaissances. Il est difficile de trouver une autre personne ayant une connaissance aussi approfondie de la production de l'usine de Zeran. Maciej consacre la majeure partie de sa vie à réparer et à collectionner les voitures produites par FSO. Il collectionne également de la documentation et des pièces détachées et il est toujours prêt à aider les autres. Il dirige un atelier consacré aux voitures classiques, RetroSzopa, dans lequel il ressuscite les cas désespérés. Par sa passion, il a noué de nombreux contacts avec des fous qui partagent les mêmes idées et qui aiment les voitures mal-aimées et en mauvais état. Et pas seulement en Pologne.
C’est comme cela, qu’un jour de 2016, il a eu de la chance. Un ami en Belgique lui a signalé qu'il y avait une Polonez à vendre. Une voiture avec des logos étranges. Les premières photos envoyées étaient de très mauvaise qualité. Sur le hayon, il était possible de voir un groupe de pixels formant une sorte de marque mais Maciej s'attendait à ce que ce soit simplement l'inscription « 5-speed » (cinq vitesses) typique des Polonez d'exportation. Les boîtes de vitesses à cinq rapports n'étaient pas encore la norme dans les années 1980, d'où cette fanfaronnade sur le hayon. En outre, les photos montraient la face avant du modèle MR 87, dite « aquarium ». Il ne pouvait tirer rien d’autre de ces photos.
Mais comme Maciej aime les choses étranges, il a confirmé son intérêt pour la voiture et a demandé plus détails. Le vendeur a enregistré une vidéo. Il l'a négligemment mis en ligne sous la forme d'une vidéo qui n'était pas réservée aux seuls yeux de Maciej. Quelques années se sont écoulées depuis 2016, personne ne se souvient si c'était sur Facebook ou sur YouTube, mais ce fait est important pour la suite de l'histoire. En Pologne, la lecture de la vidéo a fait l’effet d’une bombe.
Dans celle-ci, notre passionné de FSO a vu une Piedra parfaitement conservée. Un des 23 modèles construits, le seul à être entièrement achevé. Pour une personne normale, une épave valant le même prix que n'importe quelle autre Polonez. Pour Maciej, le Saint Graal. Un morceau d'histoire de sa marque bien-aimée, caché sous un tapis et oublié. La décision a été prise en un clin d'œil. Sans négocier, il a accepté le prix proposé par le vendeur et s'est immédiatement organisé pour le transport.
Mais qu'est-ce qui, dans cette voiture, a pu déclencher la mobilisation totale de Maciej ? Il convient ici d'évoquer la brève histoire, peu documentée, de la marque Piedra.
Dans la seconde moitié des années 1980 à l'Ouest, la Polonez était concurrentielle principalement par son faible prix d'achat, comparable à celui d'un modèle d'occasion d'une marque plus respectable. Malheureusement, elle présentait aussi un inconvénient majeur. Elles avaient des moteurs 1.3 et 1.5 dépassés, gourmands en carburant et peu fiables conçus avant le premier choc pétrolier de 1973. Il se trouve que la seconde moitié des années 1980 a été une période de développement rapide pour l'économie belge, qui venait de sortir d'une profonde récession. Les entreprises cherchaient activement des moyens pour développer leur activité.
Les Belges de la société important les FSO ont eu une idée, apparemment bonne. S'inspirant de leurs compatriotes de Scaldia-Volga, ils ont décidé de créer une marque dédiée à la conversion des FSO en véhicules diesel plus économes en carburant. Si leurs collègues d'Anvers ont pu mettre des diesels Peugeot dans la Volga, pourquoi ne pourraient-ils pas le faire avec la Polonez ?
Ils ont persuadé l'entreprise italienne FNM, produisant des moteurs diesel pour les bateaux à moteur et les groupes électrogènes, de collaborer. Les Belges ont opté pour un moteur turbocompressé de 1,366 cm3. Il était nettement moins puissant que les moteurs à essence montés d'origine sur la Polonez. Heureusement, il consommait aussi beaucoup moins. Mitsubishi et Piaggio ont aussi joué un petit rôle dans le projet. Le turbo des moteurs prévus pour la Polonez portait fièrement les marques de ces deux entreprises.
L’adaptation de ce moteur de bateau à la voiture a été étudiée, et le moteur modifié a reçu la désignation AT60. Les coûts d’adaptation ont été calculés et un premier lot de Polonez MR 87 avec un moteurs diesel 1.3 a été commandé par la Pologne. C’est ainsi qu’est née la marque Piedra. Sur le papier, tout semblait parfait.
Tout aussi génial était le projet de Maciej de faire venir la Piedra en Pologne. Mais les premiers problèmes ont commencé à côté de Lodz, à peine parti de Varsovie. L’ami de Belgique, qui était l'intermédiaire de la transaction, a appelé. Apparemment, le vendeur avait changé d'avis et l'achat risquait de ne pas avoir lieu. Il raconte :
« Légèrement en colère, je plonge ma main nerveusement dans ma poche pour une cigarette.
- Mec, je suis déjà près de Lodz, tout a été arrangé et convenu, comment veut-il annuler maintenant ? Ne le laisse pas dire n'importe quoi. Parle-lui, je continue avec mon plateau vers la Belgique.
Retour dans la cabine, je démarre et continue vers l'ouest. Un peu plus vite qu'avant l'arrêt. Je n’aurai pas besoin de prendre un café à la prochaine station-service... À mi-chemin entre Lodz et la frontière allemande, le téléphone sonne de nouveau. C’est un de ces moments où vous savez que vous devriez vous arrêter immédiatement et rappeler, mais vous ne pouvez pas. Vos paumes transpirent bizarrement et vous avez besoin de nicotine. De préférence avec une double dose de fumée. Ce n'est qu'après avoir régulé artificiellement votre respiration que vous pouvez parler.
- Tu sais quoi, c’est bon. Le gars va vendre la voiture. Mais le prix va augmenter un peu ».
Ce petit peu représente presque le double du prix d'origine. Mais ce n’était pas le moment de faire marche arrière. Maciej ne pouvait pas lâcher cette légende perdue... et convoitée. Une hausse de prix n'est pas une raison pour laisser passer une occasion qui ne se représentera peut-être jamais. Il accepte les nouvelles conditions. Pourquoi le prix a soudainement augmenté et que le propriétaire a commencé à trainer de la patte ? À cause du film susmentionné. Il a été contacté par d'autres collectionneurs qui étaient également désireux d'acheter cette Polonez aussi rare qu'étrange. Et comme ils n’étaient pas les premiers, ils ont essayé de se battre pour l'obtenir en offrant des montants plus élevés !
Seuls 23 Piedra ont été construites, et une seule a été entièrement achevée. L'objectif était de fabriquer 22 voitures de ce type par mois. Lorsque l'assemblage de la première série a été achevé en 1988, les coûts se sont avérés deux fois plus élevés que prévu. Étonnamment, cette fois, les auteurs de ce plan exceptionnellement mauvais n'étaient pas les gens de FSO, mais l'importateur belge. La marque Piedra n'avait aucune chance d’être bénéficiaire...
En un rien de temps, toutes les parties intéressées par le projet ont commencé à se retirer. Les plans de production ont été réduits de 22 à 10 véhicules, et finalement les contrats ont été rompus et les commandes annulées. Après une vingtaine de voitures, le projet était mort de facto. En racontant cette histoire, Maciej dit en riant que les gens de Mitsubishi se sont probablement enfuis en hurlant à la vue de la voiture. C'est un peu dommage de voir une turbine avec son propre logo dans une telle monstruosité.
Pourquoi la Piedra s'est-elle avérée être si chère ? C'est un mystère qu'aucun des auteurs de cette création ratée ne veut révéler. Par exemple, l’Italien FNM (qui était censé fournir les moteurs de la Piedra), qui existe toujours aujourd'hui, ignore les demandes relatives à ce véhicule et l’implantation de son moteur. Si vous possédez une Piedra, vous pouvez tout au plus obtenir un manuel de réparation pour le moteur lui-même, mais il n'y a aucune description de son montage dans la voiture polonaise.
C'est probablement l'implantation d’un moteur de bateau qui a généré ces coûts énormes. Le radiateur et le carter d'huile, par exemple, sont spécifiquement conçus pour la Piedra. Et ce ne sont là que deux changements. En même temps, l'ensemble du système de refroidissement et un certain nombre d'autres composants ont dû être redessinés. Toute pièce fabriquée spécifiquement pour un véhicule produit en petite série est nécessairement très cher.
Le résultat était donc une voiture moins puissante que la version habituelle à essence, mais beaucoup plus chère. Le diesel AT60, selon les documents d'usine, ne développait que 60 ch. En outre, la voiture s'est révélée être dramatiquement peu fiable et difficile à entretenir. La marque Piedra a laissé derrière elle 23 Polonez avec turbodiesel FNM. Une seule, celle appartenant à Maciej, était un modèle d’exposition avec des badges Piedra. Extérieurement, les autres étaient identiques aux modèles sortis de la ligne de montage de Zeran. Cette Polonez rouge est ainsi l'une des rares, sinon la seule, preuve tangible de l'existence de l'étrange marque belge !
Retour au récit du rapatriement de cette voiture en Pologne. Après un réveil matinal, Maciej et ses compagnons sont arrivés à l'endroit où la Piedra était censée les attendre. Il s’agissait d’une ancienne concession Mazda. L'endroit avait depuis longtemps cessé son activité et il était vain de trouver quoi que ce soit en lien avec FSO. Le fils du défunt premier propriétaire de la Piedra a fini par faire son apparition et a conduit toute l'équipe venue de Pologne à l'intérieur des bâtiments. Il a expliqué que ce hall d'exposition avait autrefois proposé à la fois des Mazda et des FSO. L'itinéraire traversait un vieil entrepôt, où diverses pièces pour les voitures polonaises étaient stockées sur des étagères. Le choix de ce chemin n'était d'ailleurs pas accidentel. Tout cela allait faire partie de la vente.
Finalement, elle est apparue. La Piedra dans toute sa splendeur poussiéreuse. La joie de Maciej à la vue de la rareté convoitée a été interrompue par les négociations entamées par le Belge. Le prix avait encore doublé par rapport à celui indiqué la veille au téléphone, car « quelqu'un avait appelé et proposé plus ». L'amateur obstiné de FSO savait que le propriétaire de la Piedra ne bluffait pas. Maciej avait même deviné qui avait appelé, il les connaissait. Contrairement aux apparences, l’achat de cette Piedra ne fut pas une partie de plaisir… En une demi-heure de négociation, le prix a encore doublé, atteignant huit fois le montant fixé avant le voyage vers la Belgique !
L'atmosphère a commencé à s'échauffer. Maciej a décidé de prendre le contrôle de la situation, profitant d’une pause momentanée dans les tirades du Belge. Il a joué son va-tout. Il a sorti l'argent et a dit clairement : « Ca suffit. Ces types appellent et promettent, je suis là avec l'argent. Allons-nous conclure le deal ou allons-nous continuer à perdre du temps à parler de rien ? ».
À la vue d'une importante liasse de billets, le Belge s'est calmé. Il s'en est tenu au prix, mais il avait encore quelques cartes à jouer pour obtenir un peu plus. Mais pas sur la voiture elle-même. Il a proposé de donner toutes les pièces que Maciej et ses copains avaient vues lorsqu'ils sont entrés dans le hall d'exposition. Pour 500 euros fermes. Pour Maciej, qui collectionne et entretient quotidiennement des Polonez, c'était des trésors. Il n'a pas hésité une seconde. Le Belge ne lâchait pas prise. Peut-être que Maciej pourrait être intéressé par une ancienne machine à fabriquer des clés de voiture ainsi que plusieurs milliers de clés vierges ? Non, ça pèserait plus que la capacité de charge autorisée de la remorque ! Ou des dizaines de milliers d'ampoules de différents types principalement pour les vieux phares ? Le tout pour seulement 100 euros ! L'instinct a crié « prends, c'est comme si c'était gratuit ! ». Mais, il n'y avait nulle part où prendre tout ça.
Sur le chemin du retour en Pologne, un chauffeur de camion a parfaitement résumé la dernière acquisition de Maciej. Rencontré sur un parking routier près de la frontière polonaise, il a, après avoir vu le chargement de la remorque, eu un choc qu’il a partagé avec d’autres chauffeurs routiers sur sa CB : « Hey, ils transportent une Polonez. Je ne plaisante pas, de la Belgique à la Pologne. Des malades, je vous le dis ! ».
Les 23 Piedra assemblées en 1988 ont été rapidement distribuées chez les concessionnaires FSO du Benelux. Elles devaient servir de véhicules de démonstration pour son lancement commercial. L'exemplaire que Maciej a acheté était le seul à porter des badges Piedra car il avait été préparé pour un salon qui a eu lieu peu avant la disparition de la jeune marque. La Polonez rouge s'est ensuite retrouvée chez un concessionnaire FSO et Mazda exploitant un showroom près de la frontière allemande.
Le propriétaire n'a pas profité longtemps de sa voiture. En 1990, après 38,000 km, le joint de culasse a cédé. Les moteurs FNM 1366 ont été conçus pour être utilisés dans des bateaux à moteur et des groupes électrogènes, mais ils étaient mal adaptés aux changements de température et de régime d’une voiture de tourisme, d'où leur défaillance rapide.
C'est ainsi que commence la farce intitulée « commande de pièces détachées ». FNM n'avait pas en stock les joints de culasse pour ce moteur. En 1991, ils ont écrit au malheureux propriétaire de Piedra pour lui dire qu'ils pouvaient vendre un moteur complet mais qu'ils ne pouvaient pas envoyer la pièce manquante pour le moment. En 1992, une lettre est arrivée disant qu'ils avaient enfin trouvé la solution, qu'ils avaient le joint de culasse et qu'ils allaient l'envoyer immédiatement. À cette époque, le propriétaire de la concession en avait franchement assez de la Piedra et n'était plus intéressé par la promotion de FSO, car la transformation politique en Pologne avait complètement changé les règles du jeu. FSO était juste en train de lancer le modèle Caro dans sa gamme et faire de la publicité pour le modèle MR 87 n'avait plus aucun intérêt.
C'est ainsi que le joint n'a jamais été monté et a est arrivé en Pologne dans le coffre de la Piedra. Pour l'instant, la voiture ne roule toujours pas car le moteur n’a pas été encore réparé et comme elle n’a pas été démarrée depuis des décennies, elle nécessite une révision complète. Les pièces moteur ne peuvent être commandées qu'auprès du fabricant, FNM. Mais les prix qu’ils pratiquent sont astronomiques. Une stupide courroie d'accessoires coûte 300 euros, une courroie de distribution 400 euros. Le total du devis initial des seuls composants nécessaires à la réparation du moteur s'élève à plusieurs milliers d'euros !
Maciej essaie de trouver peu à peu les pièces nécessaires et n'a pas l'intention de revendre la voiture. C'est la perle de sa collection. Même si son caractère unique ne sera apprécié que par quelques personnes. De toute manière, peu de gens auront l'occasion de voir la Piedra en vrai.
Maciej la garde jalousement depuis le début et ne la montre qu'à ceux en qui il a confiance. Un jour, il a dit par inadvertance lors d'une manifestation qu'il avait une Piedra. Le bouche-à-oreille a fonctionné et plusieurs magazines automobiles l'ont appelé pour tenter de le persuader de montrer la voiture au monde entier. Il n'en est rien ressorti. Il nous a fallu plusieurs années pour le persuader. Autant Maciej n'aime pas parler de lui, autant il est réticent à révéler le plus intéressant de ses véhicules. Il aime simplement la paix et la tranquillité et n'a pas besoin de reconnaissance pour profiter des voitures qu'il possède. Il n'a même pas accepté que l’on publie son nom.
La Piedra a l'air d'avoir encore deux ans. Grâce à son stockage dans un endroit chaud et sec, elle est restée presque intacte malgré le temps écoulé. La peinture est encore brillante et l'œil est attiré par les badges colorés Piedra, qui ont remplacé le logo FSO caractéristique. Les roues OZ Ruote montées d'origine, une option uniquement disponible sur les Polonez d'exportation, attirent également l'attention.
A bord de la Piedra, vous pouvez vraiment remonter le temps. L'intérieur est presque comme neuf. Le propriétaire n'a rien enlevé qui vous rappelle l'histoire du véhicule. Il n'a même pas jeté les mégots du cendrier. Les Gauloises reposent telles que le premier propriétaire les a laissées il y a 30 ans ! Un porte-clés avec photo un peu défraîchie de son fils est toujours accroché aux clés. Le temps semble s’être arrêté. C’est pour cela que lorsqu’on monte dedans, on baisse la voix comme si on était dans un musée.
Légende des photos :
- Ce tissu, plus agréable au toucher, est caractéristique des garnitures de toit et des pare-soleil des Polonez d'exportation.
- A l'intérieur, la Piedra ne diffère guère des autres Polonez exportées vers l'ouest.
- La cylindrée de 1,366 cm3 aurait dû s'arrondir à 1.4, mais pour des raisons de marketing, la désignation 1.3 a fini par figurer sur le cache-culbuteurs et dans les brochures publicitaires.
- Le propriétaire de la Piedra pouvait oublier la musique, même s'il y avait des emplacements pour des haut-parleurs dans les portières. Au lieu de la radio, il a eu un manomètre de pression de turbo.
- Souvenir du dernier entretien de la Piedra.
- Le ventilateur d'une Polonez ordinaire a été fixé de manière sauvage à l'aide de deux barres plates percées.
- Le bouchon du radiateur ressemble à celui d'un Polonez ordinaire, mais il a un joint différent. C’est l’un des nombreux coûts de production supplémentaires.
- La désignation du modèle inhérente aux Polonez exportées vers les pays du Benelux n'a pas été supprimée du montant arrière.
- Par miracle, sur la pompe à eau du moteur FNM, une poulie FSO a pu être montée.
- Le slogan publicitaire sur la vitre arrière est le suivant : « FSO - The No-Nonsense Car ». Ça ressemble à de l'auto-ironie. Il a été collé sur une voiture qui était effroyablement peu puissante, chère et peu fiable.
- La Piedra n'est restée que quelques heures sous cette tente, en attendant la séance photos. Une fois l'opération terminée, elle est retournée dans un endroit chaud et sec, où elle attend d'être restaurée.
Lu sur : https://spidersweb.pl/plus/2021/09/polonez-piedra-fso
Adaptation VG