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AvtoVAZ devient un partenaire de plein droit de l’alliance Renault-Nissan. Pour la première fois de l’histoire, une société russe a la possibilité d’entrer dans les rangs d’un des leaders mondiaux de l’industrie automobile. « Va-t-elle en profiter ? Totalement ! » considère Hugues Desmarchelier, le Directeur Général adjoint "Plan, produit" d'AvtoVAZ. C’est lui qui va reconstruire la gamme Lada, qui sera bientôt unifiée aux modèles français et japonais par la plateforme B0.
Interview :
ZR : En quoi la plateforme B0 est une bonne plateforme ?
HD : Cette plateforme a été dessinée par Renault avec comme objectif d’être le meilleur compromis entre fonctionnalité, qualité, tenue de route, confort et prix. Elle a été avant tout conçue pour la Roumanie et d’autres pays d’Europe de l’Est, mais après le lancement de la Logan en 2004, on a compris chez Renault que cette plateforme présentait un intérêt également pour l’Europe de l’Ouest, où la Logan est un succès depuis 2005. Aujourd’hui, même en temps de crise, l’usine roumaine de Pitesti tourne à plein régime. La plateforme B0 a depuis été utilisée pour d’autres modèles : la Sandero, la Logan MCV (un modèle inconnu en Russie mais très populaire en Europe), un pick-up et le 4x4 Duster. La plateforme B0 a moins de 6 ans : c’est peu. Je ne vous dévoilerai pas tous les projets de Renault, mais je peux vous dire que cette plateforme sera encore utilisée longtemps. Vous pouvez vous imaginer le nombre de modèles qui seront encore lancés sur cette base ! Y compris des modèles Nissan.
ZR : Comment cette plateforme sera utilisée pour AvtoVAZ ?
HD : AvtoVAZ va d’abord utiliser la plateforme B0 pour une voiture que nous appelons LADA RF90. Une voiture qui propose avant tout un volume accru de chargement et de larges possibilités de transformations. C’est une 7 places mais on pourra en faire une 5 places et si l’on enlève les deux banquettes alors on obtient un coffre énorme. Pour sa commercialisation, la partie avant de la voiture sera totalement modifiée pour s’accorder au style institutionnel de Lada. L’intérieur connaîtra également des modifications. Ce modèle sera vendu sous la marque Lada en Russie, en Ukraine et dans la majorité des pays de la CEI.
Le projet LADA RF90 prévoit l’installation d’une nouvelle ligne de production à Togliatti, incluant un atelier de soudure, de peinture et de montage qui produira simultanément des modèles Lada, Renault et Nissan. C’est un premier pas qui permettra à AvtoVAZ de surpasser la crise et redevenir rentable.
Un second pas stratégique sera l’adoption de la plateforme B0 pour créer une nouvelle gamme de véhicules. L’idée est simple et éprouvée : utiliser toutes les possibilités offertes par cette plateforme pour créer un modèle totalement inédit. Nous prévoyons ainsi de remplacer la gamme actuelle, comme par exemple la Lada Priora, mais aussi introduire une gamme de modèles totalement inédits dans la gamme actuelle du constructeur russe : des crossovers ou modèles équivalents. Les Lada sont parfaitement adaptés aux conditions russes et les nouveaux modèles devront également avoir cette qualité.
ZR : Qu’incluez-vous dans le terme de plateforme ?
HD : En fait, c’est un concept. Quand on parle de plateforme nous incluons les composants du châssis, le compartiment moteur. En fait, l’idée est bien d’avoir le maximum de pièces communes pour avoir le maximum de rentabilité.
ZR : AvtoVAZ a arrêté la chaîne de montage numéro 1. Quand débutera sur celle-ci la production du nouveau modèle ?
HD : Nous sommes actuellement en cours de négociations avec les fournisseurs et aussi en train de résoudre les dernières questions liées à la fabrication. La préparation de la chaine de montage devrait commencer cette année au second semestre et devrait s’étaler sur toute l’année 2011.
ZR : Pouvez-vous nous donner le nom des sociétés qui vont fournir les outils de fabrication ?
HD : La liste n’est pas encore arrêtée. Pour l’instant je ne peux donner le nom que de l’une d'entre elles : AvtoVAZ. La société a l’un des taux d’intégration le plus élevé du monde et est capable de fabriquer pratiquement tout ce dont elle a besoin : tour de fabrication, robots, moules des presses d’emboutissage... Nous allons utiliser au maximum cette compétence.
ZR : Est-ce que des travaux vont être nécessaires pour accueillir la plateforme B0 ?
HD : L’atelier de soudure sera installé dans les bâtiments existants mais utilisera de nouvelles machines. L’atelier de peinture sera également entièrement renouvelé, le scénario actuel prévoyant même la construction d’un nouveau bâtiment. Le montage s’effectuera dans l’actuel atelier principal. La stratégie de développement d’AvtoVAZ (le business-plan) prévoit qu’après la mise en fabrication des nouveaux modèles sur ces nouvelles lignes de montage, il faudra moderniser les deux autres. AvtoVAZ disposera donc de quatre chaînes modernes y compris celle de la Lada Kalina.
ZR : Est-ce qu’au démarrage l’assemblage de la LADA RF90 se fera en CKD ?
HD : Ce n’est pas une fin en soi ! Si nous voulons être efficaces sur le marché russe, il est nécessaire d’avoir dès le départ un taux de localisation élevé. Les taux de change représentent un risque sérieux pour le projet et c’est pourquoi nous ne pouvons pas permettre que la rentabilité d’AvtoVAZ dépende des évolutions des cours de l’Euro. Nous avons donc un objectif : atteindre un taux de localisation élevé dès le début. Et j’espère que très rapidement 65% de la valeur de la voiture sera constituée de pièces produites localement. Nous souhaitons également localiser les moteurs mais cela implique des investissements élevés. C’est pourquoi le rythme de localisation pour le moteur sera un peu moins élevé que pour le reste des pièces de la voiture.
ZR : Les tests menés par AvtoVAZ ont montré que la LADA RF90 doit être adaptée aux conditions russes. Quels seront les travaux menés ?
HD : Bien-sûr il va falloir apporter quelques changements. Notre ingénierie est arrivée aux mêmes conclusions. Mais en général, la voiture a démontré sa fiabilité et sa bonne adaptation puisque la Logan est déjà fabriquée et vendue en Russie. Bien-sûr, la LADA RF90 n’existe pas encore pour la Russie et c’est pourquoi nous devons être vigilants : la charge utile de ce modèle est élevée et nous devons absolument tenir compte des remarques des ingénieurs. Des modifications devront être également faites pour l’exploitation de la voiture dans des conditions climatiques hivernales. Je suis convaincu que la RF90 répondra particulièrement à ces conditions.
ZR : Quelle sera le volume de production à Togliatti de modèles basés sur la plateforme B0 ?
HD : La vitesse optimale de la chaîne, c’est 1 voiture à la minute, 60 voitures à l’heure. Pour augmenter la cadence, quand des modèles des autres marques seront également produits à Togliatti, il faudra travailler en trois-huit. En fait, à long terme nous prévoyons de faire tourner toutes les chaînes de montage d’AvtoVAZ en trois-huit. L’idéal sera de produire chaque année à Togliatti 1 million de voitures (70% sous la marque Lada).
ZR : Lors de la présentation du programme anti-crise d’AvtoVAZ vous avez déclaré que vous souhaitez éviter la « cannibalisation » à l’intérieur de la gamme. Certains craignent déjà que le break Priora soit sacrifié au profit de la LADA RF90...
HD : La RF90 est différente de la Priora car c’est un modèle 7 places, offrant plus d’espace et une garde au toit plus élevée. Et l’acheteur auquel elle se destine est différent de l’acheteur de Priora break. Je suis sûr que le « cannibalisme » entre ses deux modèles sera limité. C’est ce que montrent déjà les ventes de Logan et de Priora, qui sont positionnées différemment. Et ces deux modèles rencontrent un beau succès sur le marché russe. La Logan est destinée aux acheteurs pragmatiques qui veulent une voiture fonctionnelle. Elle est populaire dans les grandes villes. L’acheteur de Priora veut non seulement la fonctionnalité, mais aussi afficher un statut. Les breaks Priora et LADA RF90 ne joueront pas dans les mêmes niches de marché.
ZR : Quand saurons-nous quels modèles Renault et Nissan seront produits sur la même chaîne que la LADA RF90 ?
HD : Habituellement, Renault et Nissan attendent le dernier moment pour dévoiler leurs projets, c’est pourquoi nous demandons à nos partenaires de préserver la confidentialité lorsque les premières voitures seront visibles sur la chaîne.
ZR : Est-ce que le bureau d’études d’AvtoVAZ participera au développement des modèles basés sur la plateforme B0 ?
HD : Bien sûr, personne d’autre qu’AvtoVAZ et son service d’ingénierie ne développera ces modèles. Pour faire une voiture sous la marque Lada, il faut être proche des clients traditionnels et il n’y a que le bureau d’études d’AvtoVAZ qui peut s’en occuper. Bien-sûr il y aura un travail en commun avec les ingénieurs de Renault et Nissan pour standardiser les pièces.
Le travail des services d’ingénierie ne se limitera pas à la plateforme B0. Il y a également un projet de voiture low-cost, un projet très important pour AvtoVAZ. Et pour une toute nouvelle plateforme, il faudra penser aux acheteurs, à la rentabilité pour avoir une base qui pourra être utilisée pour de futurs modèles. Et le bureau d’étude aura en charge la conception de ces nouveaux modèles.
La plateforme en soi, ce n’est pas une voiture, mais un concept qui doit être utilisé au maximum de ces possibilités. Nous sommes le principal acteur sur le marché russe et nous ne devons pas affaiblir nos positions. Au contraire, nous devons les renforcer, améliorer la qualité et notre image aux yeux des consommateurs. Comme Fiat en Italie, Volkswagen en Allemagne, Renault et Peugeot en France où la marque nationale détient la majorité du marché. Il y a 20 ans en France, on disait que les Japonais et les Allemands allaient nous dévorer. 20 ans se sont écoulés et cela n’a pas eu lieu. Cela sera pareil en Russie. Nous sommes critiqués, mais si les gens ont la possibilité d’acheter russe, dans la majorité des cas ils le feront. Nous n’avons pas d’autre choix que d’être ambitieux.
Lada propose aux acheteurs des prix de vente adaptés. Nous allons maintenir notre position avec des voitures économiques, mais si nous voulons croitre, nous n’avons pas d’autre choix que d’investir des segments de marché où les voitures sont plus chères.
Lu sur : http://www.zr.ru/a/132871/
Adaptation VG