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Aujourd’hui, les véhicules utilitaires sont un outil de travail à la disposition non seulement des grandes entreprises, mais aussi des entrepreneurs privés. La situation était différente en URSS, c’est pourquoi les pickups et les fourgonnettes fabriquées à Ijevsk étaient en quelque sorte un « cheval noir », un mystère, pour les automobilistes ordinaires. D’une part, on connaissait peu de gens travaillant avec ces voitures basées sur une Moskvitch-412 ordinaire et, d’autre part, leur caractère spécifique et le fait qu’on en parlait peu dans la presse spécialisée ont conduit à une situation où, dans le pays, on racontait des histoires fantastiques pourtant très réalistes, des légendes, sur ces utilitaires IZH.

Dans cet article, nous tenterons de comprendre comment cette catégorie de voitures a vu le jour, si l’usine produisait ou non une version « passagers » de la fourgonette et si, en URSS, le commun des mortels pouvait se l'acheter, moyennant quelques « relations ».

Mythe #1 :
Le pick-up IZH a été créé avant tout pour l'exportation.
OUI c’est la vérité : Bien que les pickups étaient populaires pendant les années d’avant-guerre, les petits camions avec une plate-forme de chargement ouverte à tous les vents et à tous les regards (et pas seulement) ont été progressivement abandonnés en URSS. En fait, le climat de ce vaste pays était non seulement varié, mais aussi assez rude, et à tous points de vue la sécurité de la cargaison n’était pas la meilleure. En outre, les capacités de tout-terrain de ces « camions légers » n’étaient pas très bonnes, ce qui fait qu’ils ne convenaient ni aux militaires, ni aux ouvriers dans les campagnes. C’est pourquoi, on pouvait assez souvent observer cette image absurde : le transport de quelques centaines de kilogrammes de marchandise par une grand GAZon ou même un ZiL, ce qui coûtait beaucoup d’argent à l’Etat.

Dans l’Europe de l’après-guerre, disposant de bonnes routes et utilisant ses ressources de manière rationnelle, les petits véhicules utilitaires basés sur des voitures particulières étaient à la mode, surtout dans les petites exploitations agricoles. Les représentants d’Avtoexport avait remarqué cela et ont proposé l’idée de créer un pick-up basé sur la Moskvitch. Les voitures fabriquées par la MZMA (le nom que portait l’usine moscovite jusqu’en 1968) étaient très demandées en Europe, notamment en raison de leur faible prix et de leur construction solide.

Dans cette optique, un pick-up basé sur la voiture soviétique bien connue des Européens était voué au succès. C’est pourquoi, dans les années 70, ce type de carrosserie qui avait presque disparu en URSS, a connu une nouvelle vie et a trouvé un second souffle parmi les modèles produits à Ijevsk. Jusqu’alors, de nombreux concessionnaires occidentaux, avaient transformé des Moskvitch de la même manière simple que leurs « collègues » soviétiques, c’est-à-dire en coupant simplement une partie du toit des breaks tôlés Moksvitch-434. L’intérêt pour ce type de véhicule n’était pas passé inaperçu auprès des spécialistes de l’organisation soviétique du commerce extérieur. Ainsi, bien avant l’arrivée des spécialistes du marketing, les ingénieurs et les concepteurs ont été chargés de créer un pick-up à deux portes avec une plate-forme ouverte et une charge utile d’environ une demi-tonne, que l’on pourrait exporter parallèlement aux voitures particulières.

Mythe #2 :
La « Klabouk » n’était pas produite en grande série.
NON c’est un mythe : Etant donné que la fourgonnette produite à Ijevsk n’était pas proposée à la vente aux côtés des berlines, des breaks et de la version Kombi, ce modèle était considéré par beaucoup comme étant fabriqué à peu d’exemplaires et même rare.

Si les IZH-2715 pouvaient livrer à domicile des téléviseurs ou des réfrigérateurs, ils étaient également utilisés comme studio photo mobile et salon de coiffure. Mais de nombreux services de livraison n'avaient pas de fourgonnettes IZH et utilisaient à la place des camionnettes ErAZ beaucoup plus grandes.

Les 829 premières fourgonnettes de série ont quitté la chaîne de montage d’Ijevsk en 1972, et en 1974, un an après le lancement de la Kombi à cinq portes, la production du pick-up IZH-27251 a débuté. Cette version n’a pas vraiment été produite en série : 4,200 exemplaires ont été fabriqués la première année, et 5,000 en 1975 quand les volumes de production de la fourgonnette étaient beaucoup plus élevés (45,800 et 45,000 unités, respectivement).

La IZH-2715 était appelée « Klabouk » (mot russe signifiant « talon ») en raison de sa silhouette caractéristique de boîte à chaussures. Son deuxième surnom était « Pirozhok » car cette fourgonnette transportait souvent des tartes, c’est-à-dire qu’elle livrait des produits de boulangerie et des pâtisseries.  

Après une modernisation plus ou moins poussée en 1982, la « Klabouk » est restée en production jusqu'en 2001, soit pratiquement trois décennies ! Il n'est pas étonnant que la quantité totale de « Pirozhok » ait dépassé les deux millions (!), avec même 2,3 millions d’unités produites. Ainsi, ce véhicule était l'un des utilitaires légers de fabrication soviétique le plus fabriqué - mais sa production s'est étalée sur plusieurs décennies, à raison de dizaines de milliers d'unités par an. En 23 ans, beaucoup moins de pickups ont été fabriqués - de 1974 à 1997, 135,047 unités de IZH-27151 ont quitté les chaînes d’Ijevsk.

Mythe #3 :
La carrosserie des fourgonnettes et des pickups IZH a été conçue séparément de celle des fourgonnettes Moskvitch.
OUI c’est la vérité : Lorsque la question de la création d'un pick-up sur la base de la Moskvich a été soulevée, AZLK n'a pas osé fabriquer un tel véhicule. Trop de modifications auraient été nécessaires, car il ne suffisait pas de « couper le toit de la berline » comme le pensaient naïvement de nombreux conducteurs (et ce que faisaient parfois des garages avec les moyens du bord). Pour modifier la partie arrière de la voiture afin de former un espace de chargement à part entière, il aurait fallu beaucoup de pièces originales, y compris de nouveaux emboutis pour la carrosserie. Moscou s'est donc contentée d'une fourgonnette basée sur un break, qui ne différait de celui-ci que par l'absence de fenêtres et des portes arrière.

A Ijevsk, l’élargissement de la gamme a été envisagé immédiatement après la maîtrise de la production de la « quatre cent douze » ordinaire. Et puisque l'usine travaillait à la création d'une IZH-2125 à cinq portes, elle a décidé de fabriquer des pick-up et des fourgonnettes sur sa propre recette, c'est-à-dire en redessinant profondément l'arrière. Les prototypes avaient la partie supérieure de la carrosserie découpée jusqu'aux arches de roues et une grande cellule de chargement (pour la fourgonnette) ou une plate-forme (pick-up) étaient montées.

Sur ces prototypes, l’espace de chargement était à la fois structurellement et visuellement séparé de la carrosserie ! Ils ont été testés au polygone NAMI au cours de l’été 1970, mais par la suite, l’idée d’une modification notable de l’arrière a été abandonnée au profit d’une unification maximale des version utilitaires avec les voitures particulières, comme le demandaient avec insistance ceux qui tenaient les cordons de la bourse du projet.

C’est pourquoi, l’espace de chargement des modèles de série a été adapté aux dimensions de la berline 412 habituelle, ce qui a permis de produire ces versions utilitaires sur la même chaîne de montage. Dans le même temps, derrière les portes avant, la carrosserie des pickups et des fourgonnettes était totalement originale, chacune différant légèrement. La paroi arrière du pick-up, par exemple, était dotée d’une petite vitre avec une grille de protection, et il y avait des mains courantes sur le sommet de la benne qui permettaient d’arrimer le chargement avec des cordes.

Ouverte, la porte basculante de la benne montée sur charnières, devenait une extension de l’espace de chargement, permettant le transport de longues charges, tandis que la fourgonnette était équipée d’une paire de portes battantes.

Mythe #4 :
Une version « passagers » de la fourgonnette a été produite en même temps que la version transport de marchandises.
NON c’est un mythe : la cellule « aveugle » de la fourgonnette IZH-2715 était occasionnellement utilisée pour le transport de passagers - ce qui n’était pas autorisé surtout quand les passagers étaient en état d’ébriété. A Ijevsk on n’avait pas prévu de transporter des personnes autre part que dans la cabine à deux places ! La légende dit, qu’en voyant la Matra Simca Rancho, les ingénieurs d’Ijevsk ont pensé convertir la « Klabouk » de la même manière. Et on parlait d’une version sur la base de la IZH Orbita et non pas de la IZH classique.

Si dans les années 80, le sort de la berline de base IZH-2126 a été remis en question et que l’usine ne pensait même plus à une version fourgonnette pouvant transporter des passagers, l’idée d’une fourgonnette plus « universelle » restait dans l’air. Elle a commencé à prendre des contours plus ou moins concrets au milieu des années 80, en liaison avec l’émergence d’une nouvelle classe de citoyens soviétiques - les entrepreneurs privés. A l’époque, on les appelait les « coopérateurs ». Avec l’adoption en 1987 d’une loi sur la transition des entreprises d’Etat vers plus d’autonomie, les « mains » des ouvriers ont été déliées. Il n’est donc pas étonnant que rapidement, on a présenté au VDNKh de Moscou, l’IZH-27156, premier et dernier véhicule de transport de marchandises et de passagers de cette catégorie dans l’histoire de l’industrie automobile soviétique !

Les flancs de l’ancienne fourgonnette recevaient de grandes ouvertures avec des vitres coulissantes et à l’intérieur il y avait deux banquettes pliantes disposées dans le sens de la longueur, de sorte que la capacité totale passait à six personnes.

La production en série de l'IZH-27156 a commencé en 1988 et malgré son indice usine appartenant au monde des véhicules utilitaires, cette « Klabouk » a été considérée dès le début comme une voiture de tourisme et a été proposée aux acheteurs privés. Mais, en raison d'un certain nombre de problèmes financiers, apparus chez IZHAvto avant le début de la perestroïka, cette version « passagers » a été produite à doses homéopathiques au cours des premières années : seulement 536 ont été fabriquées en 1990, 730 en 1991, 998 en 1992... Parfois, en raison de problèmes d’approvisionnement, cette version quittait la chaîne de montage sans aucun vitrage ! Et dans les années 1990, de nombreux clients ont reçu leur fourgonnette flambant neuve sans pièces importantes, telles que… les amortisseurs avant.

Ensuite, le volume de production a augmenté sensiblement - par exemple, en 1993 Ijevsk a produit 3,555 « cent cinquante-six », et en 1994 - 4,260. L'IZH-27156 est restée sur la chaîne de montage jusqu'en 2001, et en 13 ans, un peu moins de 20,000 exemplaires ont été produits.

Bien sûr, comparé aux deux millions de fourgonnettes, c'était une goutte d'eau dans l'océan, mais n'oublions pas que de nombreuses fourgonnettes ont été transformées en véhicules de tourisme de manière artisanale - en découpant simplement les fenêtres au burin et en plaçant des bancs à l’intérieur !

Mythe #5 :
Techniquement, les pickups et les fourgonnettes ne se distinguaient pratiquement pas de la berline d'origine.
OUI c’est la vérité : Si la carrosserie était différente de celle des berlines, des breaks et des Kombi, techniquement les modèles 2715/25151 étaient pratiquement identiques aux voitures particulières. Il s'agissait d'une configuration classique avec propulsion arrière, moteur essence UZAM-412 de 1,5 litre, suspensions indépendantes avant et arrière à lames...

Les freins étaient également tout à fait décents par rapport à ce que l’on trouvait sur les camionnettes : freins à disques à l'avant et à tambours à l'arrière associés à un servomoteur à dépression. Sans étonnement, la majorité de ces utilitaires étaient équipés non pas du moteur de 75 ch, mais de la version de 67 ch UZAM-412DE, conçue pour l'essence AI-76. Mais dans la pratique, ce type d’essence était utilisé sur n'importe quelle  « Klabouk » car les exploitants des parcs automobiles des sociétés ou organismes les utilisant ne prêtaient pas beaucoup d'attention à un détail comme l'indice du moteur.

Même la suspension arrière à lames n’était pas renforcée par rapports aux berlines de base. La seule différence notable était l’absence de rondelles anti-grincement entre les lames.

Mythe #6 :
Avec de bonnes relations, l’IZH-2715 pouvait être achetée par une personne privée.
NON c’est un mythe : Étant donné que de nombreux conducteurs de « Klabouk » les utilisaient en dehors des heures de travail et que les plaques d'immatriculation noires d'avant 1982 étaient les mêmes pour les voitures privées et celles de l'Etat, certains automobilistes pensaient qu'avec un peu de corruption, ils pouvaient « obtenir » non seulement du parfum français ou des bottes finlandaises, mais aussi une fourgonnette IZH. En réalité, ces voitures ne pouvaient pas tomber entre les mains de particuliers, même lorsqu’elles étaient déclassées, du moins jusqu'à la fin des années 80.

Ce mythe était également provoqué par la version 27516 évoquée plus haut, puisqu’elle était sensée être en vente libre et que tout le monde ne savait pas faire la distinction entre cette version et la fourgonnette classique. Mais pour une raison simple, ni cette dernière (IZH-2715), ni le pick-up IZH-27151, n’avait de prix de vente officiel : jusqu’à l’éclatement de l’URSS ces versions n’étaient tout simplement pas vendus, et des « Klabouk » neuves ne sont tombées entre les mains de particuliers qu’après que l’usine et les citoyens du pays soient passés à l’économie de marché. Ainsi, en 1991, la fourgonnette a coûté pendant un court moment 10,000 roubles, puis les prix se sont libérés et il est devenu impossible d’en devenir propriétaire à moins de 20-30 mille roubles.

Mythe #7 :
La « Klabouk » est capable de transporter plus de 600 kg de marchandises.
C’est à la fois un mythe et une vérité ! : La charge utile officielle des pickups et des fourgonnettes n'était que de 400 kg ce qui était peu. D'autant plus que de nombreux propriétaires de berlines et de Kombi fabriqués à Izhevsk pouvaient facilement en charger autant dans leurs voitures, dans le coffre et dans l’habitacle. Dans les versions utilitaires, souvent on chargeait autant que nécessaire - 500 ou même 600-700 kg !

La carrosserie autoporteuse et légère et la suspension arrière à lames de la « Klabouk » s’avérait suffisamment solide pour résister à de telles charges. La seule chose qui ne convenait pas à de nombreux utilisateurs (surtout les clients occidentaux !) était la longueur de la plate-forme de chargement du pick-up. Et c'est pourquoi, pour augmenter la longueur, l’usine a simplement augmenté le porte à faux arrière !

Cette solution permettait de ne pas trop toucher à la structure de la voiture. Les pickups allongés ont été produit de 1982 à 1997 en petites quantités, car ils étaient avant tout destinés à l’exportation. Dès 1978, les concessionnaires finlandais avaient pourtant émis le souhait de disposer d’une version de ce type. Connue sous le nom d’Elite PickUp avec l’indice 27151-013-01, elle aurait dû être livrée uniquement aux pays d’Amérique Latine.

En charge, la tenue de route de cette version était nettement moins bonne, car les roues avant étaient délestées. Dans la pratique, cependant, cette surcharge n’a jamais gêné les conducteurs, car comparé à n’importe quel camion, le comportement des fourgonnettes et des pickups d’Ijevsk était toujours « léger », même avec une demi-tonne de marchandises.

Légende des photos :

  • En URSS, ces camions étaient souvent conduits à faible vitesse et utilisés pour le transport de charges légères.
  • En Europe, les Moskvitch étaient connues, appréciées et même aimées.
  • On pouvait croiser des fourgonettes IZH partout en Europe, par exemple en Hongrie.
  • Za Roulem a parlé de la nouveauté d'Ijevsk en 1972 !
  • La sphère d'application de la fourgonnette était très diversifiée. En règle générale, il s'agissait de services ou de la livraison de petites marchandises à domicile.
  • Comme la fourgonnette, le pick-up IZH-27151 a subi en 1982 un « restyling » (deuxième photo).
  • Les phares rectangulaires étaient rarement utilisés sur les fourgonnettes.
  • La fourgonnette Moskvitch-434.
  • La fourgonnette IZH pendant les tests.
  • Sur les fourgonnettes de pré-série (première photo) les flancs de la cellule de chargement étaient plats, c’est-à-dire qu’ils n’étaient pas emboutis.
  • Matra Simca Rancho : une fourgonnette inhabituelle pour les loisirs venue de France.
  • L'IZH-27156 se distinguait de la fourgonnette par ses parties vitrées.
  • Le déflecteur aérodynamique sur la cabine et la trappe sur le toit étaient loin de faire partie de l’équipement de toutes les « cent cinquante-six » de série.
  • La nouvelle version de l’utilitaire d'Ijevsk a fait l'objet d'un article dans le numéro de février 1989 de Za Roulem.
  • Au milieu des années 90, certaines voitures ont reçu un pare-chocs avant en plastique.
  • Classique du genre : la construction de l'habituelle « 412 » est restée inchangée sur la gamme commerciale IZH.
  • C’est sous cette forme que les voitures ont été produites depuis 1982 jusqu'à leur disparition.
  • Voiture de rêve ! C'est une blague, mais en URSS beaucoup de particuliers rêvaient de la « Klabouk ».
  • Electroménagers et meubles, produits agricoles, matériaux de construction : on transportait tout ce qu’on pouvait.
  • Le pick-up allongé était peu fréquent sur le marché intérieur car il était avant tout destiné à l’exportation.
  • Les versions export avaient des phares rectangulaires Ruhla (RDA).

Lu sur : https://www.kolesa.ru/article/udlinennyy-pikap-shestimestnyy-furgon-i-zapret-na-prodazhu-mify-i-fakty-ob-izh-2715
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #IZH, #2715, #27151, #Utilitaire, #Mythes, #Cycle