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Bientôt à la place de ZiL pousseront des immeubles d’habitation et des centres commerciaux. Le géant de l’industrie automobile russe, fondé il y a 100 ans, est entré dans l’histoire. C’est une « nécessité historique », un « devoir de mémoire ». Car si en fin de compte, AMO-ZIL n’est pas la seule usine qui a été victime des cataclysmes de la fin du siècle dernier et du début de ce siècle , ceux qui divisent l’ancien territoire de l’usine en parcelles convoitées, n’ont même pas eu l’idée de créer un musée consacré à cette marque à la si riche histoire.
Et comme il n’y a pas de musée, souvenons-nous de quelques-uns des modèles créés par l’usine durant 100 ans, des modèles de série ou des prototypes presque oubliés. Nous commencerons aujourd’hui par les voitures, celles que les documents officiels désignaient autrefois par le terme de « voitures haut de gamme ».
Chez AMO, l’histoire des voitures particulières commence avec... un camion. En 1927, sur la base du AMO-F15 de série (qui était née Fiat 15 Ter) a été créé un véhicule de commandement pour l’Armée Rouge. Le châssis n’avait pas été modifié mais cette « voiture » avait des roues arrière jumelées, un moteur 4,4 litres de 35 ch et le volant à droite. Jusqu’en 1929, elle a été fabriquée à une dizaine d’exemplaires et... l’usine moscovite a oublié les voitures particulières pendant près de 10 ans.
C’est Ivan Likhatchev en personne, le directeur de ZiS, qui pris la décision de fabriquer une voiture pour l’exécutif après l’échec de la première « Buick rouge », la L-1 créée à Leningrad par l’usine « Krasniï Poulitovets ». L’usine de Moscou avait déjà eu une expérience automobile. On reprit de nouveau une base de Buick mais sans en faire une simple copie. Les deux premières carrosseries avaient été réalisées aux USA par la firme Budd mais selon des maquettes faites à Moscou. La ZiS-101 reprenait les canons esthétiques américains mais n'était pas la dernière mode en vigueur dans la seconde moitié des années 30. Le moteur huit cylindres en ligne développait 90 ch (on prévoyait aussi une version portée à 110 ch), la boîte de vitesses disposait de 3 rapports et les freins étaient mécaniques mais avec un servofrein à dépression.
La ZiS-101 transportait les fonctionnaires et les responsables du pays, mais pas les dignitaires de haut rang. Ceux qui siégeait sur l’Olympe stalinien préféraient les voitures américaines. Un célèbre poème de Sergueï Mikhalkov évoquait d’ailleurs la ZiS-101. Ce symbole de la puissance de l’industrie automobile soviétique des années 30 coïncidait aussi à la naissance de la jeunesse dorée de l’URSS.
Sur la base de la ZiS-101 ont été construits 20 à 30 cabriolets ZiS-102 avec un moteur porté à 116 ch. Mais la voiture ne paraissait solide que capote baissée car les vitres étaient remplacées par des panneaux en celluloïd. Seuls deux cabriolets avec de vraies vitres coulissantes ont été fabriquées.
C’est en 1940 qu’a été lancée en série la ZiS-101A modernisée avec un moteur plus puissant et une carrosserie légèrement modifiée. Mais elle ne constituait qu’une première étape vers un tout nouveau modèle. On attendait pour 1942 une ZiS-101B avec un moteur de 133 ch et enfin un vrai coffre à bagages (sur la ZiS-101 on trouvait seulement un porte bagage archaïque). La ZiS-101B est considérée comme le précurseur de la ZiS-103 pour laquelle on prévoyait déjà une suspension avant indépendante. Mais ce modèle n’a jamais été fabriqué et l’unique ZiS-101B a été testée, si on en croit les archives de l’usine, jusqu’en.. octobre 1941. Les Allemands venaient de pénétrer dans Kalinine (aujourd’hui Tver).
Après la guerre, on a lancé la produciton d’une voiture très différente et beaucoup plus moderne : la secrète « Article 100 » connue sous le nom de ZiS-110S et ZiS-115. Cette dernière était une limousine blindée de 4,200 kg équipée d’un moteur 8 cylindres en ligne de 162 ch. Cette voiture lourde était équipée de pneus spéciaux. Pour soulever et abaisser les vitres, les ingénieurs avaient imaginé de puissants vérins hydrauliques avec une commande à bouton-poussoir. Plusieurs exemplaires des 30 à 40 limousines produites de ce type existent encore aujourd’hui.
Dans la première moitié des années 50, malgré sa grandeur, la ZIS-110 était déjà dépassée. Le styliste V. Rostkov a été appelé pour dessiner un nouveau modèle. En 1956 - année cruciale pour le pays (durant laquelle l’usine a été rebaptisée Likhatchev au lieu de Staline ) est apparue la ZiS Moskva. Cette voiture basée sur la ZiS-110 était encore dessinée dans un style américain (un style qui était d’ailleurs considéré comme l'étalon pour de nombreux stylistes européens). Mais pour la future ZiL-111 on a choisi les travaux de L. Eremeev. Offensé, Rostkov a démissionné de son poste et aujourd’hui on ne peut voir le prototype Moskva qu’en photo.
Extérieurement la ZiL-111, fierté de l’URSS à l’Exposition Universelle de Bruxelles, est rapidement devenue obsolète. Dès 1961 a été fabriqué le premier prototype avec les parties avant et arrière de la carrosserie intelligemment redessinée. La voiture avait quatre ronds et également des feux arrière arrondis. La ZiL-111 a été fabriquée en série à partir de 1962 et miraculeusement son premier prototype a survécu.
Durant de nombreuses années, ZiL n’a fabriqué que des limousines et, sur leur base, d' énormes cabriolets pour les défilés. Mais pour la protection des cortèges officiels, on avait besoin d’un véhicule de soutien rapide. C’est précisément pour cela qu’a été développée la berline ZiL-117 qui ressemblait stylistiquement à la ZiL-114 mais avait un empattement raccourci de 580 mm. La voiture avec son moteur de 300 ch pouvait atteindre 200 km/h. On eu même l’idée de mettre en place une production en grande série afin de réduire le coût de production gigantesque des « chlenovoz » (littéralement, transport des membres du PC) c'est à dire les ZiL-114. Mais finalement de 1971 à 1977 seuls 73 exemplaires de ZiL-117 ont été construits et seulement une ZiL-117P avec une carrosserie limousine (!).
Une autre voiture inhabituelle basée sur la ZiL-114 était une ambulance avec un toit surélevé. Deux ZiL-114EA ont été construites en 1974 pour accompagner les cortèges officiels du Secrétaire Général vieillissant, Leonid Brejnev. Plus tard, quatre autres « breaks » ZiL-41042 ont encore été fabriqués (deux sur la base du modèle 41045 et deux sur la 41047).
Contrairement aux rumeurs, ni Brejnev, ni même Andropov n’étaient transportés dans des limousines blindées. C’est Khrouchtchev qui avait mis fin à l’utilisation de ce type de véhicule considérant qu’il ne fallait pas avoir peur de son propre peuple. Ce n’est que trois décennies après la fin de la production de la ZiS-115 que l’usine a lancé l’étude d’une version blindée sur la base de la ZiL-4104. A cette époque-là, on a fait subir à une vieille ZiS-115 un crash-test dont le poids était plus ou moins identique à la future limousine blindée.
Les premières ZiL-41047TB ont été blindées par la compagnie allemande Trasco Bremen. Plus tard, le blindage d’une demi-douzaine de ZiL-41051 et ZiL-41052 a été assuré directement dans le pays.
En 1989, la perestroïka battait son plein. Les retransmissions télévisées de la XIXème conférence du PC avaient une audience qu’aucun créateur de série n’oserait rêver. C’est justement à cette époque-là qu’ont été construites deux nouvelles ZiL-4102. A l’usine on plaisantait : une pour Mikhaïl Sergueevitch, l’autre pour Raïssa Maximovna Gorbatcheva (familièrement on appelait même ces limousines Michka et Raïka). Ces deux voitures avaient une carrosserie autoporteuse (une première dans l’histoire de l’usine) et une suspension indépendante. La mécanique, un V8 de 315 ch et une boîte à trois rapports, restait inchangée. Ces prototypes ont été montrés au Secrétaire Général mais le pays ou ses dirigeants n’ont pas eu le temps d’avoir une nouvelle limousine. Ils ont abandonné les anciens drapeaux, l’ancienne industrie automobile, l’ancienne URSS...
L’un des derniers modèles de l’entreprise omnipotente fut la ZiL-41041. Officiellement cette berline qui prenait la suite de la ZiL-117 et avait un empattement de 3300 mm a été produite jusqu’en 2000. La mécanique était toujours la même (V8, 315 ch). Cette voiture fut montrée au Maire de Moscou, Iouri Louzhkov mais elle n’a inspiré ni lui, ni d’autres grands de ce monde. Elle n’a été produite qu’à 26 exemplaires. Certaines d’entre elles sont souvent mises en vente dans des petites annonces.
Légende des photos :
- Environ une dizaine de véhicule de commandement AMO-F15 ont été construits à la fin des années 20.
- En tout, la ZiS-101 a été fabriquée à 8,753 exemplaires.
- Le cabriolet ZiS-102 avec des vitres coulissantes n’a été construite qu’à deux unités.
- Le prototype ZiS-101B a été testé en 1941.
- La ZiS-115 blindée est la première « chlenovoz » de l’usine même si ce surnom n’est apparu que beaucoup plus tard.
- La « ZiS Moskva » était un prototype entre les modèles 110 et 111.
- Le premier prototype ZiL-11G de 1961.
- Au final, on ne sait pas bien à qui la berline ZiL-117 était destinée.
- ZiL-114EA - la première d’un total de six ambulances.
- ZiL-41047TB blindées en Allemagne.
- L’un des deux prototypes ZiL-4102, symbole de la perestroïka.
- La ZiL-410141 a été produite jusqu’à la fin du XXème siècle.
Lu sur : https://auto.mail.ru/article/60943-100_let_zilu_-_vspominaem_istoriyu_velikogo_zavoda/
Adaptation VG