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Comment percevait-on les voitures tchécoslovaques à l'Ouest ?

Si certains se souviennent avec nostalgie des voitures produites à l’époque par la Tchécoslovaquie, d’autres les considèrent comme des machines obsolètes. Les voitures tchécoslovaques de la période socialiste n’étaient pas seulement destinée au marché intérieur et aux pays du bloc de l’Est. Malgré ses relations étroites avec l’Union Soviétique, la Tchécoslovaquie exportait ses produits dans la direction opposée. Après tout, il n’y avait pas de mal à faire rentrer des devises. Mais que valaient-elles vraiment ? Rien de mieux pour se faire une idée que de regarder ce qui a été écrit sur elles derrière le Rideau de Fer. Voici comment étaient perçues les voitures tchécoslovaques par les journaux spécialisés des pays capitalistes.

1) Skoda 440 (Wheels 1958) :
Dans son numéro de septembre 1958, en titrant « la surprise », le magazine australien Wheels a qualifié la Skoda 440 (Spartak) de voiture maniable et puissante avec des performances surprenantes et une consommation de carburant remarquable. Au prix de 985 livres australiennes, la voiture tchécoslovaque était la concurrente numéro 1 de la VW Coccinelle.

Les Australiens ont mis en avant la construction particulièrement résistante, l’excellent châssis et la consommation presque miraculeuse (mesurée à 6,3 et 7,1 litres). Ils mentionnaient également des détails curieux comme le pare-brise et la lunette arrière identiques. Utile, lorsque dans le bush australien, vous casserez votre pare-brise, vous pourrez très bien le remplacer par la lunette arrière en attendant.

La Spartak est également saluée pour son confort et de nombreux détails intelligents, comme par exemple des crochets portemanteaux sur les montants centraux, la bonne visibilité depuis l’habitacle et l’accessibilité du moteur. La « trousse à outils la plus complète que nous ayons jamais trouvé dans une voiture bon marché » a particulièrement impressionné. Etait-elle annonciatrice du « Simply Clever » de Skoda ? Presque, puisque le grattoir à glace (NDT : intégré à la trappe de réservoir de la dernière Skoda Rapid) n’existait pas encore.

Par contre, Wheels faisait remarquer le moteur bruyant et les freins peu efficaces et criards. Le rédacteur en chef s’étonnait aussi de la grille de vitesses, le passage de troisième à quatrième aboutissant la plupart du temps à la seconde. Les accélérations de la voiture étaient considérées comme moyennes et la vitesse de pointe mesurée à 109 km/h par le journal, inférieure à la moyenne. Même dans les descentes la Spartak n’a pas dépassé plus 112 km/h.

2) Skoda Felicia (Autocar 1961) :
La revue anglaise a testé en 1961 la Skoda Felicia. Si les journalistes n'ont pas fait de remarque sur la capote, ils ont noté que la Felicia est plus bruyante toit replié. Elle est par contre très agréable à conduire capote ouverte. Néanmoins, la voiture vibre, la carrosserie se tord et les joints grincent. Si aujourd’hui, les capotes se replient en quelques secondes, les journalistes d’Autocar ont mis 93 secondes pour ouvrir le toit, et deux secondes de moins pour le refermer. Le tout d’une seule main.

La fierté tchécoslovaque était selon les Britanniques bruyante mais solide. La suspension arrière n’est pas aussi indépendante qu’elle le prétend puisque la lame de ressort, très dure, rend l’essieu pratiquement rigide. Sur les inégalités, l’arrière rebondit et même les pires nids de poule ne mettent pas la suspension en butée. La preuve, même avec un gars de 80 kg debout sur le pare-chocs arrière, la suspension arrière ne semble pas s’enfoncer. C'est pourquoi les Britanniques voudraient une suspension plus souple.

Quelques données issues de cet essai : la vitesse maxi de la Felicia avec la capote repliée est de 133 km/h, décapotée elle atteint les 126 km/h. Pour passer de 0 à 96 km/h sur le sol britannique (60 miles) la Felicia a mis 24,5 secondes. Pendant l’essai, la consommation moyenne s’est stabilisée à 10,9 litres. Et nos gentlemen indiquent qu’ils est possible de descendre à 8,1 litres.

Autocar qualifie la voiture de résistante avec de nombreux équipements qu’on ne trouve pas normalement en série comme des clapets permettant de bloquer le refroidissement avant le radiateur, une protection anticorrosion du châssis ou des enjoliveurs. D’un autre côté elle manque de certains équipements que l’on rencontre sur d’autres voitures de la même époque. L’un des journalistes finit par juger la Felicia bonne pour faire du tourisme automobile dans la steppe.

3) Skoda 1000 MB (Autocar 1965) :
« Bonnes consommations, solides performances pour une voiture d’un litre, suspension confortable, prépondérance du survirage, freins fiables, niveau sonore très élevé, fabrication de mauvaise qualité, sièges réglables avec beaucoup de place pour quatre, et parfois cinq personnes, à ce prix c’est une voiture richement équipée ». C’est ce qu’écrivait Autocar à propos de la embecka (la 1000 MB) en 1965.

Le magazine a trouvé la voiture plus bruyante qu’elle ne l’est en réalité. Beaucoup de bruit sont dû au régimes moteur élevés employés pour obtenir de bonnes accélérations. Au-delà de 4650 tr/min, la courbe de puissance chute soudainement et de manière importante. La puissance maxi est obtenue aux alentours de 114 km/h et après on atteint péniblement les 120 km/h. L’essayeur d’Autocar a réussi à battre un record avec une pointe à 122 km/h. L’accélération de 0 à 96 km/h est atteinte en environ 30 secondes.

Autocar a jugé le châssis de la 1000 MB suffisant pour un conducteur moyen et pour une conduite normale, mais les passages un peu dynamiques en virages ont pleinement révélé les faiblesse de la disposition du moteur en porte à faux arrière. 60 pour cent du poids se trouve sur l’arrière et les virages serrés ne peuvent pas passer sans un bon survirage. Il va de soi qu’il faudra faire preuve d’un peu d’attention en conditions humides et mettre à profit au mieux ses « compétences ». Sur chaussée régulière la embecka gère bien les grandes bosses, rebondit et flotte comme un bateau en pleine tempête. Sur chaussée dégradée ou les routes pavées, la Skoda 1000 MB est aussi dans son élément. Après tout, on sait pour quelles conditions la voiture a été créée.

Il est intéressant de noter que durant l’essai, la Skoda 1000 MB a eu un problème avec le frein à main rendu inutilisable. Il s’agit d’un défaut chronique des Skoda, puisque les journalistes avaient déjà eu ce type de problème lors de deux essais précédents. Là, ils ont essayé de le résoudre eux-mêmes, mais en vain, puisqu’il est réapparu au cours de l’essai.

Autocar fait aussi l'éloge de l’intérieur de la Skoda 1000 MB. Les Britanniques sont impressionnés par les sièges couchettes qui dépliés peuvent accueillir sans mal deux adultes. Pour finir, voici les consommations qu’ils ont mesuré : en moyenne ils ont consommé environ 8,1 litres, en conduite dynamique ils ont atteint les 9 litres, mais un utilisateur normal devrait pouvoir arriver à 7,6 litres aux 100 km. Durant l’essai d’Autocar, la embecka a demandé environ 1 litre d’huile aux 1000 km.

4) Skoda 120 LSE (Autocar 1986) :
Les journalistes d’Autocar ont pu essayer de nouveau une Skoda en 1986. Il s’agissait de la Skoda 120 LSE. Comparée à son prédécesseur (surnommée « le serpent »), le nouveau rédacteur en chef a apprécié tout particulièrement la voiture en raison de l’amélioration du châssis et de moindre velléité à partir en survirage au moindre coup de gaz.

La nouvelle Skoda a donc été félicité pour les progrès de son châssis qui a permis un retarage des ressorts, des amortisseurs et de la barre stabilisatrice avant. Les voies plus large et les pneus larges sur des jantes de petit diamètre (13 pouces) participent aussi à ces progrès. Selon Autocar, avec la (quasi) disparition du survirage, la 120 peut maintenant tolérer même les moins expérimentés des conducteurs. Ce n'est que si on prend les virages beaucoup trop rapidement que le comportement de la voiture passe d’un sous-virage neutre au survirage.

La déception est venue des mesures de consommation. Autocar a consommé plus de 10 litres en conduite dynamique et 7,2 litres en conduite tranquille. Les mêmes chiffres avaient été relevées lors du premier essai de la 120 en 1977 et les Britanniques s’attendaient à des progrès dans ce domaine. Avec cela, le niveau sonore n’a pas été étouffé. Selon le magazine, plus on en demande à la 120 LSE et plus elle se manifeste. Sur autoroute vous n’aurez pas la possibilité de converser avec votre voisin ou d’écouter l’autoradio monté en série.

La Skoda a obtenu de bons points en matière de sécurité. Le rédacteur en chef a été ravi de la présence en série de ceintures de sécurité à l’avant et à l’arrière (3 à l’arrière) et des rétroviseurs des deux côtés. Dommage qu’ils ne soient pas réglables de l‘intérieur.

5) Tatra 613/5 (Car 1993) :
La conclusion de cet essai mérite d’être soulignée. Au début des années 1990, Tim Bishop a essayé d’importer les Tatra dans les Iles Britanniques. Le jounaliste Phil Llewellin a donc pu se rendre à Koprivnice pour ramener par la route une Tatra 613/5 de pré-série destinée au marché anglais. Trois jours, cela n’est pas beaucoup, mais 2,000 miles lui ont permis de se familiariser avec la voiture communiste dessinée par feu la carrosserie Vignale.

Sur la route il a pu maintenir la Tatra 613 à une vitesse de croisière tournant aux alentours de 190 km/h. Les 220 km/h en pointe semble donc tout à fait réalistes. Il a apprécié le silence du moteur en conduite régulière et trouvé agréable le grondement du huit cylindres à l’accélération. Cette Tatra 613 conçue 20 ans auparavant a été évaluée comme suit : « Ce n’est pas une beauté mais elle a du caractère ».

Ce prototype destiné à la Grande Bretagne a été modernisé avec une boîte de vitesses à cinq rapports. Le levier de vitesse est cependant très inhabituel et le journaliste anglais a eu du mal à se faire à la grille. Pour lui c’était une preuve supplémentaire des nombreuses années d’isolement de la Tchécoslovaquie.

Les conclusions de l’essai sont remarquables. Pour le marché intérieur anglais, les £15,000 livres demandés pour la Tatra 613 ne paraissent pas élevés, mais quand on sait que le salaire moyen de la région dans laquelle elle est fabriqué tourne autour de £30... Finalement la Tatra n’a pas été commercialisée en Grande-Bretagne et la 613/5 n’a été fabriquée qu’à seulement quelques exemplaires.

Lu sur : http://automoto.cas.sk/clanok/193820/ako-hodnotili-ceskoslovenske-auta
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #Tchécoslovaquie, #Essai, #Skoda, #Tatra, #Presse