Le 22 juillet 1974, le jour férié le plus important de la République Populaire de Pologne, les deux personnes les plus importantes du pays, à savoir le Premier secrétaire du comité central du Parti ouvrier unifié polonais (PZPR) Edward Gierek et le Premier ministre Piotr Jaroszewicz, ont emprunté une toute nouvelle route avec une toute nouvelle voiture. Comme vous pouvez le deviner, il ne s'agissait pas d'une voiture ordinaire ni d'une route ordinaire.
Il s'agissait de la Trasa Lazienkowska de Varsovie, l'artère la plus moderne de la Pologne communiste à l'époque. Elle a été officiellement ouverte il y a tout juste un demi-siècle et, lors de la cérémonie d'inauguration, Edward Gierek et Piotr Jaroszewicz avaient pris place à bord d'une Duzy Fiat. Ou, plus précisément, de sa version la plus luxueuse, un cabriolet ! Une Polski-Fiat à 6 portes, 7 places et mesurant plus de 5 mètres de long.
Dans la République Populaire de Pologne, toute nouvelle voiture était considérée comme un luxe : les voitures étaient chères et, surtout, difficiles à obtenir. Dans les années 1970 et 1980, seule la Syrena avait perdu son statut de modèle de rêve. Mais il existait des luxes plus petits, plus grands et voire même très grands. La plus petite était la Polski-Fiat 126p, l'une des plus grandes - la Polski-Fiat 131p, dont le nom additionnel de « Mirafiori » faisait sur certaines personnes une plus forte impression que « Ferrari ». D'ailleurs, acheter une Mirafiori, c'était bien plus que posséder une Mercedes SL aujourd'hui. Et pourtant, la Fiat 131 Mirafiori était considérée à l'Ouest comme une voiture moyenne : ni haut-de-gamme, ni de classe supérieure.
Dans les années 1970, dans la PRL, les jeans Wrangler étaient déjà un phénomène. En 1971, ce pantalon coûtait sept dollars chez Pewex. Or, à l'époque, le taux de conversion d'un dollar était d'environ 100 zlotys. Ainsi, un tel morceau de denim équivalait à environ 1/4 d'un mois de salaire !
Et à cette époque, le pragmatique FSO se permettait de vendre des modèles qui étaient considérés comme un symbole de luxe dans la Pologne communiste. Le simple fait de les voir était d’ailleurs déjà un luxe. Voici cinq modèles de la Fabryka Samochodow Osobowych qui, à l'époque, étaient comme les jeans Wrangler dans une foule de pantalons gris.
1/5 Polski Fiat 125p Long :
FSO a eu la chance que l'ouverture de la Trasa Lazienkowska s'accompagne d'une météo clémente. La pluie aurait en effet gâché les débuts de la plus longue des Duzy Fiat.
C'est avec cette voiture que les deux personnalités les plus importantes de la PRL ont inauguré la Trasa Lazienkowska à Varsovie. Cette version allongée aurait été construite à la hâte pour pouvoir participer à l'inauguration. La voiture a été construite à partir de trois Polski-Fiat 125p : la partie avant provenait de la version break, l'arrière de la berline. Par rapport à cette dernière, l'empattement augmentait de 89,5 cm (pour atteindre 340 cm) et la longueur de 95,1 cm (pour atteindre 517,7 cm). Le renforcement du châssis était donc une nécessité. Pour se faire, on a utilisé des composants du châssis d'un... fourgon de livraison Nysa. Les mains courantes situées derrière la première et la deuxième rangée de sièges servaient également de raidisseurs.
Le cabriolet Polski-Fiat 125p Long n'avait pas de toit, pas même une simple capote. Le moteur n'était pas non plus très impressionnant : un moteur de 1,5 litre développant seulement 70 ch était utilisé pour une voiture aussi imposante.
Ce cabriolet fut bientôt suivi d'une version berline à 6 portes. Certains exemplaires de cette variante étaient équipés d'un toit en verre. On pouvait donc visiter Varsovie à bord de ces « limousines ». La Polski-Fiat 125p Long était utilisé par les sociétés touristiques Syrena et Wisla, qui à bord de ces voitures à 6 portes transportaient les touristes dans la capitale.
Il est intéressant de noter que les PF 125p Long n'ont pas été construites à Zeran. Elles ont été fabriquées à la main au Centre de recherche et de développement pour les voitures particulières à Falenica, près de Varsovie. Entre 1974 et 1977, sept cabriolets et 70 berlines ont probablement été réalisées. Mais FSO ne s’est pas arrêté à la Duzy Fiat. Entre 1979 et 1982, deux exemplaires allongés de la FSO Polonez ont été fabriqués… Ils avaient donc sept portes !
2/5 Polski-Fiat 131p Mirafiori :
En 1980, Walter Röhrl n’a laissé aucune chance à ses adversaires. Il devient champion du monde des rallyes en marquant près de deux fois plus de points que le deuxième. Cette saison-là, il pilotait une version spéciale de la Fiat 131 Mirafiori.
Sa variante moins exclusive a été assemblée sous licence pendant six ans chez FSO à Zeran. Seule la berline (bien qu'il y ait également eu un break) en version Special avec quatre phares ronds a été construite à Varsovie. Mesurant 426,5 cm de long et proposée avec des moteurs 1.3 (65 ch) ou 1.6 (75 ch), la Mirafiori faisait rêver la PRL.
La Mirafiori de Zeran était officiellement appelée « Polski-Fiat », mais elle ne portait nulle part de plaque portant cette inscription. Entre 1975 et 1981, 3,102 exemplaires ont été assemblés à FSO, dont seulement 90 ont été produites en 1978 et 75 en 1981.
La Fiat 131 italienne, en revanche, a été produite à plus d'un million et demi d'exemplaires. 400 d'entre elles étaient des Fiat 131 Abarth Rally. Cette version de 140 chevaux était la plus proche de la machine championne de Walter Röhrl.
3/5 FSO Warszawa M20 :
Pourquoi un FSO Warszawa dans cet inventaire luxueux ? La raison est qu'en 1958, par exemple, la voiture coûtait jusqu'à 120,000 zlotys. À l'époque, c'était l'équivalent près de 7,5 ans de salaire moyen ! De plus, la disponibilité des voitures était très limitée.
Cet somme cosmique devait être déboursée pour une voiture dont l'apparence était à la mode à la fin des années 1940, qui ne développait que 50 ch (avec un moteur de 2,120 cm3), consommait en moyenne 13,5 l/100 km, possédait jusqu'à 30 points de graissage et dont les freins devaient été réglés tous les 2,000 km, tandis que l'huile moteur et les filtres devaient être remplacés tous les 5,000 km.
Les FSO Warszawa M20-57 et 200 avaient une version Lux. Conçue pour l'exportation, elle se distinguait, entre autres, par une peinture bicolore, des moulures latérales plus longues et de formes bizarres, une galerie de toit et une radio. Certains Chinois se souviennent sans doute encore qu'à une époque, ces Warszawa importées comptaient parmi les taxis les plus luxueux de l'Empire du Milieu.
La Warszawa faisait également partie de l'élite du transport ferroviaire. Entre 1957 et 1973, environ 200 Warszawa ont été transformées en draisines, adaptées à la circulation sur rails. Chacune des roues en chêne pesait 75 kg. Un « cric » spécifique avait même été développé pour la draisine Warszawa, qui remplaçait la marche arrière : la voiture pouvait être tournée de 180 degrés sur ce dispositif lorsqu’elle arrivait en fin de parcours.
4/5 FSO Polonez 2000 :
Il s'agit de la voiture de tourisme produite par FSO la plus puissante de l'histoire de la PRL. La Polonez 2000 développait 112 ch !
Cette version était propulsée par un moteur de 2 litres à double arbres à cames venant de la Fiat 132. Cette dernière a aussi été assemblée à Zeran sous licence entre 1973 et 1981, également dans une variante de 112 ch. Construite à 4,461 exemplaires, la Polski-Fiat 132p était disponible, entre autres, dans les célèbres Pewex.
De son côté, la FSO Polonez 2000 est apparue en 1979, soit un an seulement après le début de la production des versions de base de cette voiture de classe moyenne à l'allure très moderne à l'époque. La Polonez 2000 a cependant été produite en petit nombre, comme il se doit pour un symbole de luxe.
5/5 Polski-Fiat 125p 1600 Monte Carlo :
Le summum du luxe sportif dans une Duzy Fiat a été atteint avec les deux séries présentées en 1973 et portant les noms de célèbres rallyes : la 1600 Monte Carlo et la 1800 Akropolis. La première voiture coûtait l'équivalent de neuf ans de salaire moyen de l'époque, la seconde 9,5 ans !
Extérieurement ces puissantes Duzy Fiat se résumaient principalement à des rétroviseurs latéraux profilés (placés non pas aux coins des vitres, mais au-dessus des roues avant), de phares avant supplémentaires, de jantes en aluminium et de bandes latérales. À l'intérieur, on trouvait aussi un tachymètre électronique et un volant sport recouvert de cuir.
La Polski(Fiat 125p 1600 Monte Carlo était équipée d'un moteur 1.6 de 98 chevaux, tandis que la version 1800 Akropolis disposait d'un moteur 1,756 cm3 de 105 chevaux. Les deux moteurs disposaient de deux arbres à cames provenant de la Fiat 132.
Comme on peut s'en douter, ce luxe de la PRL n'a pas non plus été produit en grande série. On estime qu'un millier de Polski-Fiat 125p 1600 Monte Carlo et seulement 50 1800 Akropolis ont été construites.
Lu sur : https://www.auto-swiat.pl/wiadomosci/aktualnosci/5-symboli-luksusu-epoki-prl-z-fso-50-lat-temu-debiutowal-6-drzwiowy-polski-fiat-125p/p1kfr6v
Adaptation VG