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La PF 126p a 45 ans. Plutôt que de revenir sur son histoire, le site Spiderweb.pl a préféré vous raconter son parcours pour le moins incroyable dans l’empire du Milieu.

La plupart de ceux qui s’intéressent à l’histoire de l’automobile polonaise savent que la Polonez a été copiée en Chine, du moins en partie puisqu’elle imitait la VW Santana. Ce véhicule bizarre portait le nom de Dongfanghong Yituo. Mais la Polonez n’a pas été la seule voiture polonaise copiée là-bas.

Afin de comprendre quelle fut le rôle de la Maluch en Chine, il faut rappeler qu'à la fin des années 1970, le pays a expérimenté l’économie de marché. A l’époque, toute la Chine appliquait encore les principes de l'économie planifiée mais le gouvernement jugea nécessaire de voir si cette invention occidentale appelée « marché libre » pouvait s’appliquer aux réalités chinoises. Une des raisons qui a accéléré cette décision fut la sécheresse de 1978. L’agriculture du pays se trouvait dans un état catastrophique. Deng Xiaoping, le premier secrétaire du Parti, s'est rendu dans les provinces touchées par cette catastrophe naturelle et leur a ordonné de s'enrichir le plus rapidement possible, même si le socialisme devait en prendre un coup. Il fallait par exemple rétablir la situation de la ville de Wenzhou située sur la côte est de la Chine. Beaucoup de choses furent alors autorisées, des choses qui étaient auparavant interdites.

C’est dans cette ville que l'on a décidé d'expérimenter le marché libre. Des petites entreprises ont été créées. Dans la région de Wenzhou, le revenu par habitant était inférieur à celui des  autres régions de l'Est de la Chine. Après la libéralisation du marché, il a commencé à croître rapidement, à un rythme qui a même effrayé les décideurs. Il s’avéra que l’économie de marché permettait vraiment de sortir de la pauvreté et de rattraper le retard. 7 à 8 ans après le début de l’expérience, le revenu par habitant à Wenzhou était deux fois supérieur à celui des autres régions de la Chine ! Fait intéressant, Wenzhou a rapidement acquis la réputation d’être la ville dans laquelle se trouvaient les usines et les sociétés fabriquant de la chinoiserie. Même en Chine, quelque chose provenant de Wenzhou était synonyme de mauvaise qualité...

Une des idées pour développer l’économie de Wenzhou fut de permettre aux chauffeurs privés de développer leur propre entreprise de taxis. Auparavant, l'utilisation d'une voiture privée à des fins commerciales n'était pas autorisé et de toute manière, à Wenzhou, il n'y avait pas beaucoup de voitures. C’est pourquoi le gouvernement chinois a décidé d’acheter des voitures qui seraient ensuite revendues à ces nouveaux entrepreneurs et c'est la PF 126p qui fut choisie.

Pourquoi ? Pour deux raisons. La première était idéologique. On savait qu’il était hors de question d’acheter des voitures occidentales. De quoi aurait eu l’air la ville de Wenzhou si tout à coup elle était envahie de caisses impérialistes. Il était donc nécessaire de trouver une bonne voiture produite dans un pays frère. L’Union Soviétique produisait la Zaporojets mais les relations avec l’URSS n’étaient pas des meilleures et elle exigeait de l’argent pour livrer ses produits. Il y avait aussi la Trabant. Mais c’est bien la Maluch qui a finalement été choisie… pour une raison purement économique. Jamais un seul yuan n’a été versée pour elle ! Le marché avec la Pologne était basé sur le troc.

Au début, les PF 126p étaient toutes orange ou jaune et dans la version la plus luxueuse, c’est-à-dire avec le freinage modernisé et les pare-chocs en plastique P4. L’usine polonaise l'expédiait par lots de 1,000 voitures, mais en fonction de ses capacités de production, ce chiffre pouvait être supérieur ou inférieur. Plus tard, d’autres couleurs sont apparues : rouge ou gris-vert. Au total, ce sont près de 10,000 Maluch qui ont été exportées vers l’empire du Milieu entre 1980 et 1986, environ 5,000 ont été exploitées comme taxis à Wenzhou. A partir de 1983, voire de 1984, il fut tout à fait possible d’acheter une Maluch à titre privé. Cela coûtait toutefois une fortune et seuls quelques Chinois ont pu à cette époque se permettre un tel luxe. La Maluch reste toutefois la première voiture particulière largement disponible en Chine, même si l'ampleur de cette disponibilité étaient bien entendu négligeable par rapport à la taille de la Chine.

A Wenzhou, on roulait en Maluch parce qu’on n’avait pas d’autre choix. Les gens dépensaient beaucoup d’argent pour en acheter une et les entretenaient autant que possible pour leur permettre de durer le plus longtemps possible. Personne ne semblait être dérangé par les deux portes : comme taxi elle pouvait emmener 4 personnes avec leurs bagages et elle remplissait bien son rôle mais on manquait de mécaniciens expérimentés avec des facultés pour s’occuper d’autre chose que de camions ou d'autobus. En cas de panne, il fallait trouver une solution.

Au milieu des années 1980, les importations de Maluch ont cessé. A cette époque, la Chine a commencé à produire des petites voitures sous licence, le plus souvent de production japonaise. Et comme il était typique de la Chine de ne permettre leur vente que dans la province où elles étaient produites, le paysage automobile pouvait être totalement différent d’une ville à l’autre. A Jilin par exemple, l'usine Jiangbei Machinery Works à la pointe de la technologie, a commencé à assembler des Subaru Rex.

Mais elle avait des problèmes pour produire la carrosserie. Elle ne parvenait à en fabriquer au maximum 150 exemplaires par mois sous le nom de Shenjian. Pour remédier à cette situation, et aussi incroyable que cela puisse paraître, on s’est servi de la Maluch comme modèle pour en tirer une carrosserie (probablement en fibre de verre) et la monter sur le châssis de la Subaru Rex, qui disposait comme la PF 126p d’un petit moteur de 550 cm3 à l’arrière ! Mais, même si l’idée pouvait sembler géniale, la conversion n’a pas été si facile que prévue. Un unique prototype a été assemblé sous le nom de Jiangbei JJ710, copie chinoise de la Maluch se distinguant par ses poignées de portes cachées comme une Renault 5, par un dessin différent des passages de roues et par les roues de Subaru Rex...

Dans les années 1990, les Maluch ont laissé leur place à des voitures japonaises ou européennes fabriquées localement. Une autre copie de Subaru Rex produite par China North Industries (Beifao) a permis la motorisation des villes chinoises plus efficacement que la PF 126p car elle disposait de plus d’espace et convenait mieux à un usage de taxi. Mais la Maluch a bien eu un rôle de pionnier et a participé à cette expérience économique extrêmement importante qui a finalement abouti à la transformation de la Chine en un étrange mélange entre économie de marché et gouvernement socialiste autoritaire !

A Wenzhou on trouve encore des Maluch. Souvent dans un état déplorable, on peut les voir en photos sur des sites comme Carnewschina.com. Pour finir, vous pouvez noter qu’une série télévisée chinoise « Hi, Fiat » a vu le jour en 1994 et relatait les aventures de M. Ding, premier chauffeur de taxi privé de Wenzhou. La Maluch utilisée dans cette série est désormais exposée au Musée de l’Automobile de la ville !

Lu sur : https://spidersweb.pl/autoblog/fiat-126p-w-chinach-historia/
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #Polski-Fiat, #126p, #Maluch, #Export, #Chine