
L’un des objectifs stratégiques d’AvtoVAZ est d’augmenter ses exportations et de pénétrer de nouveaux marchés étrangers. Mais il est vrai qu’il est principalement question de pays du « tiers monde » où l’on se souvient des productions de VAZ depuis l’époque soviétique. Cependant, le géant russe de l’automobile n’abandonne pas ses ambitions de (re)conquérir le marché européen et c’est pourquoi il se consacre aussi à l’homologation de ses modèles avec des normes environnementales strictes.
AvtoVAZ commence à exporter en Europe le break Lada Vesta SW et sa version Cross surélevée. Il faut se rappeler que l’année dernière la berline Vesta a commencé a être vendue en Allemagne, en Hongrie, en Autriche, en Bulgarie et en Lituanie. Et comme on l’indique chez AvtoVAZ, la nouveauté a été très bien accueillie par les acheteurs européens. Ainsi, à la fin de 2017, les Européens avaient acheté 5,200 voitures de la marque russe soit 29% de plus que l’année précédente. Cette croissance a été largement assurée par la Vesta qui selon Jato Dynamics, représente plus de 900 voitures. Plus de la moitié ont été livrées en Allemagne (470 ex.) et un quart en Hongrie (230 ex.). Ce sont les plus grands marchés d’AvtoVAZ en Europe bien que la part de marché de la marque russe y reste insignifiante. Avec la sortie de la Lada Vesta break, l’entreprise s’attend à ce que la nouveauté jouisse d’une meilleure demande car elle appartient à un segment de marché plus populaire.
« Avec l’arrivée des nouveaux modèles Vesta SW et Vesta SW Cross, Avtovaz devrait pouvoir augmenter ses ventes en Europe de quelques milliers de voitures par an au maximum. Malgré la popularité des breaks auprès des consommateurs européens, la concurrence est très forte dans ce segment. Je pense que dans le futur la Vesta deviendra le best-seller de Lada en Europe en raison de la réduction inévitable des ventes de la vieillissante Lada 4x4 » commente Ivan Kondratenko, consultant chez Frost & Sullivan.
Selon Felipe Munoz, analyste chez Jato Dynamics, en Euope le break Lada Vesta sera plus demandé que la berline. Il entrera en concurrence avec des breaks populaires comme la Ford Focus, l’Opel Astra, la Hyundai i30, la Fiat Tipo et la Dacia Logan MCV. Et si la position tarifaire est la bonne, AvtoVAZ pourra améliorer ses positions sur le marché européen avec la Vesta SW.
En effet, la réussite de la nouvelle Lada en Europe dépendra largement de son prix face à la concurrence. Les prix officiels n’ont pas encore été annoncés, mais chez AvtoVAZ on assure que le break Lada Vesta aura un « très bon positionnement de prix ». Cependant, lors de la première présentation de la voiture au Salon de l’Automobile d’Essen en décembre dernier, les représentants du distributeur local déclaraient que le break Vesta SW normal coûterait environ 15 mille euros et que la version Cross serait vendue 17 mille euros. A ce prix, la nouveauté pourrait s’avérer totalement non compétitive car sa concurrente directe, le break Dacia Logan MCV coûte de 8 à 14 mille euros en Allemagne et le break Ford Focus est proposé à 16 mille euros !
La version cinq portes de la Lada 4x4 qui vient d’être lancée sur le marché allemand à un tarif compris entre 13 et 14,5 mille euros connait une situation similaire. A titre de comparaison, le Dacia Duster y est vendu beaucoup moins cher : à partir de 10,7 mille euros. En passant, les prix des modèles VAZ en Europe sont beaucoup plus élevés qu’en Russie, malgré un rouble encore relativement faible. Par exemple, toujours en Allemagne la berline Vesta est affichée de 13,150 à 14,950 roubles, ce qui converti en roubles fait de 930 mille à 1,55 million.
Mais chez AvtoVAZ, on dit qu’il n’est pas correct de comparer la politique des prix en Russie et en Allemagne puisque sur le marché allemand les prix sont fondamentalement plus élevés que sur la plupart des autres marchés européens. En outre, on livre en Europe des voitures qui respectent la législation et les normes environnementales en vigueur et c’est pourquoi elles y sont aussi plus chères. En raison de ces prix élevés, AvtoVAZ a peu de chances de conquérir le marché européen où ses modèles pourraient potentiellement être concurrentiels d’après Ivan Kondratenko. Selon lui, AvtoVAZ pourrait occuper sa propre niche en Europe, peut-être chez les représentants de la diaspora russe ou chez des conducteurs plus âgés, nostalgiques de leurs premières voitures, qui furent probablement une Lada.
D’ailleurs on reconnait chez Lada que le marché européen n’est pas aujourd’hui une priorité. L’objectif stratégique de l’entreprise est de renforcer ses positions dans les pays de la CEI, puis sur les marchés du Moyen-Orient (Lada est déjà présent au Liban et en Jordanie et il y a d’autres projets de développement dans cette région), puis en Amérique Latine (où elle se trouve déjà en Bolivie et à Cuba) et enfin en Afrique et en Asie. Aujourd’hui, Lada est présent dans 30 pays du monde et l’année dernière les voitures russes ont fait leur apparition en Chine, à Cuba et en Jordanie. Au total, selon son bilan 2017, AvtoVAZ a exporté - si on exclut les pays de l’Union douanière - 10,1 mille voitures. 5,7 mille sont des Lada 4x4 et 2,2 mille des berlines Vesta. En tout, AvtoVAZ a exporté 24 mille voitures, soit 31% de plus qu’en 2016. Cependant, quand on regarde les ventes totales de la marque, les exportations sont insignifiantes - environ 7%.
« Les grands constructeurs mondiaux battent largement AvtoVAZ sur les marchés développés. En outre, le prix des voitures Lada à l’étranger est plus élevé que celui des concurrentes locales compte tenu de toutes sortes de droits de douanes et de taxes. Il ne faut pas écarter non plus les tensions géopolitiques entre l’Occident et la Russie, qui laissent leurs empreintes sur les liens économiques rendant difficile l’accès des entreprises russes sur les marchés étrangers. C’est pourquoi AvtoVAZ est à la recherche d’autres opportunités de marchés dans les pays en développement avec lesquels la Russie a tissé des relations. Cependant, encore une fois en raison de prix élevés, les perspectives de ventes des Lada sur ces marchés restent assez limitées. Un certain niveau de ventes pourrait être apportés par des marchés publics ainsi que par des avantages douaniers accordés aux constructeurs automobiles russes » affirme Ivan Kondratenko.
En effet, le retour d’AvtoVAZ sur le marché cubain a été rendu possible par le soutien des gouvernements des deux pays. Les 340 Lada Vesta et Largus Cross livrées en début d’année seront utilisées par les compagnies publiques de taxis, les sociétés de location et les agence de voyages locales. Et même si AvtoVAZ considère Cuba comme l’un de ses marchés d’exportation prioritaires en Amérique Latine et prévoit d’y augmenter ses livraisons dans les années à venir, le potentiel de ventes sur l’île de la Liberté est très limité. Malgré la levée de l’interdiction des ventes desvoitures étrangères en 2014, la capacité du marché automobile local n’excède pas 6,000 véhicules par an en raison du faible pouvoir d’achat de la population cubaine.
Comme le remarque Natalia Milchakova, directrice adjointe du département analytique de la société Alpari, la cible des Lada sont les personnes à faible revenu, pour lesquelles la voiture n’est qu’un moyen de transport. C'est pourquoi on trouvera toujours des acheteurs pour les productions de VAZ. L’essentiel est que les prix des nouveaux modèles d’AvtoVAZ ne soient pas trop élevés ce qui les rendraient moins populaires que leurs homologues chinois. Ces prix excessivement élevés pourraient devenir le principal obstacle à l’exportation des voitures russes. Par conséquent, dans les pays où la demande des consommateurs est faible, par exemple à Cuba, les consommateurs préfèrent des voitures, peut-être de moindre qualité par rapport aux voitures russes, mais moins chères.
Afin de réduire ses coûts d’exportation, AvtoVAZ étudie la possibilité d’assembler ses modèles produits sur la plate-forme B0 dans des usines de l’Alliance Renault-Nissan à l’étranger. Aujourd’hui, on produit sur cette plateforme la berline XRAY et le break Largus et c’est aussi sur celle-ci que l’on développera la nouvelle génération de Lada 4x4. Apparemment c’est ce modèle qui a le plus de chance d’obtenir la « citoyenneté étrangère ». Selon les médias brésiliens, la production de la nouvelle Lada 4x4 pourrait être organisée à partir de 2021 à l’usine locale de l’Alliance Renault-Nissan, dans la ville de Sao Jose do Pinhais, bien que AvtoVAZ lui-même réfute cette information. En passant, les Lada ont déjà été produites à l’étranger par le passé : la géographie de l’assemblage des modèles d’AvtoVAZ à l’extérieur couvre la Grèce, la Finlande, l’Equateur, l’Uruguay et l’Ukraine. Aujourd’hui, tous les modèles Lada sont produits à partir de collections de pièces CKD au Kazakhstan et en Egypte, l’entreprise locale produit la berline Lada Granta.
Selon Ivan Kondratenko, la possibilité d’assembler des modèles Lada dans les installations de Renault-Nissan est une bonne opportunité pour AvtoVAZ, qui pourra profiter du réseau développé de sites de production et de distribution de l’alliance. En outre, cette localisation peut réduire les délais et les coûts financiers et donc potentiellement le prix des voitures. « Les pays du BRICS - Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud - sont d’énormes marchés pour l’automobile et sont donc d’excellentes plateformes pour la mise ne place de la production. Dans le même temps, Renault-Nissan, je pense, n’a pas peur de la concurrence d’AvtoVAZ en raison d’un positionnement différent, peut-être plus low-cost. A mon avis, la Lada Vest pourrait être le modèle idéal pour une production locale sur ces marchés, en raison de la popularité du segment des voitures compactes dans les pays en développement » estime-t-il.
En développant la coopération avec son partenaire Renault-Nissan, AvtoVAZ peut renforcer sa position sur les marchés étrangers et améliorer sa gamme. Cependant, dans ce cas, l’alliance devra faire face au problème de la moindre différenciation de ses marques par les consommateurs, prévient Felipe Munoz. Selon lui, la marque Dacia est déjà un succès dans les segments inférieurs dans des régions comme l’Europe, l'Afrique du Nord, l'Amérique du Sud et l'Inde. Et étant donné que c’est Dacia qui est le principal concurrent d’AvtoVAZ sur les marchés mondiaux, ce n’est que dans les pays où la marque roumaine n’est pas populaire, qu’il sera possible d’implanter les modèles Lada.
Lu sur : https://www.zr.ru/content/articles/911299-avtovaz-na-dalnikh-rubezhakh-ko/
Adaptation VG