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Finalement et contrairement à ce qui avait été annoncé plus tôt, le nouveau directeur de ZiL, Igor Zakharov, a fait une première apparition publique face au personnel de l'usine moscovite, le 08 septembre 2010. Cette rencontre était organisée par les syndicats. La vieille, la direction de l'usine avait dressé une liste de questions posées par les ouvriers. Naturellement, les thèmes principaux étaient les salaires, l'échéancier de versement et le futur immédiat de l'usine. Mais la réunion ayant lieu en présence de pratiquement toute l'équipe dirigeante, il a été aussi question de points beaucoup plus stratégiques.

Igor Zakharov a pris les rênes de Zil à une période particulièrement difficile. Lorsqu'il en a été nommé PDG en avril, l'endettement de l'usine s'élevait à plus de 15 milliards de roubles. Les arriérés de salaire approchaient les six mois, les filiales régionales étaient soit complètement à l'arrêt ou travaillaient à peine. En réalité, ZiL était proche de la faillite et emmenait régulièrement ses créanciers au tribunal d'arbitrage.

Sergueï Sobianine, le maire de Moscou, a décidé de venir au chevet de ZiL et après avoir visité l'usine et il a décidé de la préserver et de relancer la production. Le montant total des aides accordées à ZiL s'élève à 1,689 milliards de roubles. Cette somme a permis d'honorer les dettes les plus pressantes, notamment le paiement des salaires, et d'assurer le fond de roulement. Dès juin, ZiL a commencé à acheter de l'acier et des pièces détachées, dans l'espoir d'un redémarrage rapide de la chaîne.

A partir d'octobre 2011, ZiL devrait revenir à la semaine complète de production (pour certains c'est déjà le cas depuis le 1er septembre). On prévoit de fabriquer d'ici la fin de l'année un total de 2,138 véhicules pour un chiffre d'affaire de 2,764 milliards de roubles pour un bénéfice (ou pour être plus précis un revenu marginal) de 689 millions de roubles, soit 8 fois plus que le second semestre 2010. Toutefois, on ignore comment ces chiffres vont se combiner avec les pertes de 772 millions de roubles prévues pour l'année en cours. Apparemment on est très optimiste sur les revenus attendus. Les pertes ne sont prises en compte que par les personnes les plus réalistes. Même si ces objectifs sont remplis, cela ne signifie pourtant pas que ZiL sera sorti de la crise. Le seul de rentabilité de ZiL se situe actuellement à 14,500 véhicules produits par an, le tout devant être vendu pour au moins 11 milliards de roubles.

Désormais, le développement de l'usine se trouve dans les mains de la Municipalité de Moscou. Il est déjà clair que 50 des 275 hectares vont être liquidés, que les productions "lourdes" vont être confiées aux filiales régionales et que l'on va reconcentrer toutes les activités dans la partie sud de l'usine, la zone comprise entre la voie de chemin de fer et la Moscova. En réduisant son territoire, ZiL va devenir rentable dès 8,500 véhicules par an et des ventes de 7,6 milliards de roubles. Mais quand on sait que la partie nord réunit des ateliers de "production de haute technologie", il ne faut pas être un génie pour comprendre que l'on cherche à vendre les joyaux de la couronne...

Durant cette conférence, Igor Zakharov a reconnu que les modèles ZiL actuels sont vieillissants et peu concurrentiels. Les produire en grand nombre n'a aucun sens. Il faut renouveler la gamme. Un tout nouveau modèle ne peut pas être pour l'instant conçu, sans passer par une profonde modernisation du " Bitchok " et des camions de moyen tonnage.

Tous les " Bitchok " seront désormais basés sur la plateforme 4,5 tonnes du ZiL-4362, conçu il y a quelques années pour être produit dans l'usine AMO Plant, située à Elgava en Lettonie. Sur cette plateforme on continuera à produire des véhicules spéciaux - dépanneuses, véhicules municipaux, camions de pompiers et autobus. On va aussi augmenter la capacité du ZiL-4331 de 8 à 10/12 tonnes grâce un châssis à section constante, des ponts retravaillés et une suspension pneumatique. La troisième orientation stratégique est la mise en production d'un véhicule à quatre roues motrices, faisant les dimensions du "Bitchok" et pesant de 8 à 10 tonnes car la demande pour ce type de véhicule est forte.

Interrogé sur le sort des moteurs à essence, Igor Zakharov a fait une réponse claire en disant que le développement final d'un tel moteur n'a pas encore été décidé sachant que l'on ne sait pas encore quels modèles et quelles versions seront les plus utiles pour l'usine. Les développeurs de ZiL continuent à penser que l'ancien moteur V8 essence a encore de l'avenir. On l'a même passé à la norme Euro-4 ! Mais ZiL n'a toujours pas de moteur diesel adapté : le moteur D245 de tracteur est un bon compromis, les moteurs étrangers sont trop chers, et le 4 cylindres de l'usine de Iaroslav n'est toujours pas entré en production. Cela peut donc paraître fou, mais on n'est donc pas prêt de mettre une croix sur le moteur essence. Ce problème de moteurs est un point clé pour ZiL et si on réussit à le résoudre, le renouvellement de la gamme sera très rapide.

A la fin de l'année, l'effectif de ZiL sera de 7348 personnes. Igor Zakharov a annoncé que le salaire moyen va passer à 15,335 roubles ! Les salaires ont déjà augmenté deux fois cette année : de 6% et 4%, et l'année prochaine ils augmenteront encore de 10%. A ces mots, la moitié de la salle a rigolé, l'autre a soupiré. Un peu plus de 15,000 roubles pour un travail à la chaîne dans une ville aussi chère que Moscou, ce n'est pas du tout sérieux... Surtout quand on sait que des ouvriers touchent encore moins (7 à 8000 roubles). Igor Zakharov reconnait que la question des salaires est importante et a promis se pencher de nouveau dessus avant la mi-2012.

Malgré ces quelques informations, les plans stratégiques n'ont pas été totalement révélés. La raison est simple. Tout va dépendre des investisseurs qui s'intéresseront au site. Moscou n'a pas l'intention de maintenir indéfiniment l'usine à flots et cherche activement des investisseurs. Igor Zakharov admet, visiblement avec réticence, qu'il s'agit de constructeurs étrangers. Des représentants de tous les grands constructeurs mondiaux ont visité ZiL et voient ce site "comme une alternative aux usines de Saint-Pétersbourg et de Kaluga". On peut donc en déduire que ZiL intéresse MAN, Renault Trucks, Volvo Trucks et Scania. On parle aussi de Fiat ou de Mercedes-Benz. Mais plus personne ne mentionne KamAZ/Rostechnology ou Groupe GAZ... pas plus que les compagnies chinoises.

Avec ce nouvel investisseur, on est censé commencer la fabrication d'un véhicule totalement nouveau. Il s'agirait d'une véhicule utilitaire léger, concurrent de la GAZelle. C'est la meilleure manière d'utiliser les capacités de fabrication de ZiL car la demande pour ce type de véhicule est toujours plus élevée que celle des camions de moyen tonnage et la mise en production d'un modèle existant ne demande pas de lourds investissements. Dans cette perspective, on pense à Fiat, qui cherche frénétiquement un nouveau site industriel en Russie et qui dispose d'une large gamme d'utilitaires avec son Ducato. Et comme Sollers a arrêté la production de ce modèle, lui préférant un modèle Ford, les Italiens disposent ici d'une possibilité de rester sur le marché.

Igor Zakharov donne l'image d'un homme très prudent, peu enclin à tirer des plans sur la comète. Il est de toute évidence très réaliste et préfère y aller pas à pas et réformer l'usine en se débarrassant de tout ce qui est inutile. Cela diffère totalement de la manière d'agir de l'ancien directeur, Konstantin Laptev, qui aimaient les projets grandioses et se précipitaient dans des voies étranges, comme l'appel d'offre pour un véhicule militaire, l'assemblage de camions bennes chinois ou la participation d'une équipe d'usine au Dakar.

Le temps des directeurs de ZiL tapant du point sur la table est révolu. C'est bien dommage car ZiL, aujourd'hui, n'a pas pas besoin d'un gestionnaire, mais d'un véritable propriétaire. Igor Zakharov est-il cet homme ? Impossible à dire pour l'instant. Personne ne le sait et ne sait quelles sont ses véritables motivations. C'est pourquoi certains pensent que tout est déjà écrit et que la relance actuelle de la production ne fait que retarder l'enterrement...

A suivre,

Lu sur : https://www.zr.ru/content/articles/356591-zil_chast_ii_javlenije_zaharova_narodu/
Adaptation VG

Tag(s) : #ZiL, #Usine, #Economie, #Analyse