La Trabant est le témoin automobile de l'unité allemande. Après avoir été longtemps raillée, elle est aujourd'hui à nouveau à la mode.
Aïe, c'était le mauvais rapport ! La boîte de vitesses de la P601 grince bruyamment. Une Trabant a beau être de conception simple, cette technique issue du défunt État ouvrier et paysan ne pardonne pas tout. Heureusement, j'ai Dirk à mes côtés. Ce natif de Berlin-Est s'y connaît dans les Trabant vieilles de 30 ans.
« Les vitesses ne sont que partiellement synchronisées », explique-t-il. Autrement dit : je peux certes monter et descendre les rapports de la deuxième à la quatrième vitesse comme vous le souhaitez en roulant - mais pas la première, s'il vous plaît. Cela peut être fatal. Après quelques centaines de mètres dans la voiture de l'Est, je sais déjà que cela ne sera pas un essai tout à fait normal.
C'est un beau matin d'automne à Berlin, et nous traversons la capitale de la République fédérale au volant d'un véhicule qui ne pourrait pas être plus chargé d'histoire. Produite de 1964 à 1990, la Trabant était la Volkswagen de la RDA. Après la chute du Mur, les Trabant ont été les premières voitures à traverser la frontière en direction de l'Ouest. Les images chargées d'émotion sont entrées dans les livres d'histoire.
A Checkpoint Charlie, je suis pour la première fois un sujet de photo. Des touristes me font signe et sortent leur appareil photo lorsque je conduis la Trabant de teinte gletscherblau à travers le carrefour où s'affrontaient autrefois les chars soviétiques et américains. Le « Trabi World » a son siège à proximité.
L'entreprise propose aux touristes et aux nostalgiques des tours de ville avec cette voiture de l'Est, le « Trabi Safari ». C'est là que commence mon premier tour en Trabant. La condition est toutefois que le collaborateur Dirk m'accompagne. La technique du véhicule est déjà un peu ancienne, nous explique-t-il. Et s'il y a une panne, « je serai là » !
Mais d'abord, nous roulons, après que je me sois glissé dans le cockpit étriqué du haut de mon 1,87 mètre. C'est incroyable de voir comment des familles de quatre personnes s'entassaient autrefois dans ce petit véhicule en duroplast, avec leurs bagages. Toute la smala (« Mit Kind und Kegel » en allemand) et puis en Hongrie, au lac Balaton. Ou pour des vacances naturistes sur la mer Baltique.
Lors d’un « Trabi Safari », les gens font le tour des sites touristiques de Berlin - la porte de Brandebourg, l'Alexanderplatz avec la tour de télévision, l'East Side Gallery avec un cliché de l'ancienne ligne de démarcation, tout un programme. Dirk et moi nous dirigeons en revanche vers le Prenzlauer Berg. Dirk y a grandi, et la Trabi fait bien sûr partie de ses souvenirs d'enfance - mais pas en bien.
« Mon père mesurait deux mètres et je devais toujours m'asseoir à l'arrière, complètement coincé », se plaint-il. A l'arrière, les sièges étaient recouverts d'un revêtement en déderon. L'homme de 44 ans en a encore aujourd'hui l'odeur dans le nez.
Pauvre Trabant. Après la chute du mur, la « Rennpape » ne valait plus un clou. Les citoyens de la RDA libérés étaient chauds pour les Mercedes, BMW et autres marques de l'Ouest qu'ils n'avaient pu admirer qu'à la télévision pendant des décennies. Les Trabis n'avaient plus que la valeur de la ferraille. Beaucoup ont été jetées à la poubelle ou abandonnées dans la forêt. La nation se moquait avec des blagues sur les Trabant, devenue une caricature automobile.
Pourtant, au tout début, sa technique était encore moderne. Au début des années 1960, les 23 chevaux d'une Trabant 600 permettaient de rivaliser avec des concurrentes occidentales telles que la VW Coccinelle et la Citroën 2CV. Mais on a vite perdu le contact avec le développement technique. Les citoyens de la RDA devaient tout de même continuer à conduire leur Trabant et même attendre 15 ans ou plus avant d'avoir une voiture neuve ; il n'y avait pas d'alternative en raison de la pénurie.
Notre Trabant de 1987, dont la plaque H est toute fraîche, a même 26 chevaux sous le capot. Et le couple fabuleux de 55 Newtons-mètres à 3,000 tours. Avec cela, nous nous déplaçons étonnamment vite. Bien sûr, il faut s'habituer à la boite de vitesses en forme de béquille.
Je ne me sens pas comme un obstacle à la circulation, au contraire : aujourd'hui encore, on peut parfaitement se faufiler dans le trafic urbain avec une telle Trabi. En passant la première et la deuxième vitesse - le deux-temps de 600 cm3 aime les hauts régimes - on peut même gagner des courses aux feux contre d'autres voitures. Un plaisir fou ! Et la conduite automobile à l'état pur, justement parce que l'on remarque chaque bosse !
Il faut bien sûr renoncer au confort. Pas de climatisation, pas de direction assistée, pas de jauge à essence. Mon passager Dirk fait signe de partir en riant. « Tout cela n'est qu'une illusion capitaliste ! » Nous n'avons qu'une poignée de chevaux mais notre Trabant ne pèse que 600 kilos.
Nous continuons à rouler à travers Prenzlauer Berg. Ici, certains poussent une poussette qui coûte plus cher que certaines Trabis d'occasion. Le long des rues, on trouve des breaks familiaux et des SUV hors de prix. Ici, cela fait longtemps que l'on n'est plus habitué à la Trabant au deux-temps puant.
Pourtant, seule la combustion du mélange deux temps d'huile et d'essence sent mauvais. Avec six litres aux 100 km, la consommation de notre P601 est presque écologique. De plus, la voiture est facile à réparer. On peut réparer beaucoup de choses soi-même sur une Trabant, même un joint de culasse cassé.
Et c'est ainsi que la Trabant est en train de devenir une voiture ancienne reconnue - avec d'autres voitures cultes de l'Est comme la Wartburg. Aujourd'hui, environ 34,000 Trabant seraient à nouveau immatriculées dans toute l'Allemagne, me raconte Dirk, mon passager.
C'est justement à Berlin qu'on les voit à nouveau plus souvent. Pour contraster avec le chic du centre-ville, il est presque cool de conduire une Trabi - même si elle est techniquement dépassée. Je suis donc gentil avec notre Trabant d'essai et je le rends au loueur sans défauts ni égratignures.
Sonja Schmidt, chanteuse populaire de la RDA a d'ailleurs écrit une fois une chanson sur cette Ost-Mobil. Son plus grand succès s'intitulait « Ein himmelblau Trabant » (une Trabant bleu ciel). C'est bien qu'elle roule encore.
Légende des photos :
- Le cockpit de la Trabi est plutôt étriqué, surtout si l'on mesure 1,87 m comme notre auteur.
- La Trabant P601 était la Volkswagen de la RDA et a été construite de 1964 à 1990 pratiquement sans changement.
- Au début, le deux-temps développait 23 ch, ce qui était encore dans l'air du temps, puis 26 ch. Les bobines d’allumage dans des canettes de Red Bull de notre voiture d'essai ne font évidemment pas partie de l'équipement d'origine !
Lu sur : https://www.welt.de/motor/fahrberichte-tests/oldtimer/article169253930/Als-Kontrast-zu-Mitte-Schick-sind-Trabis-fast-wieder-cool.html
Adaptation VG