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Jusqu’à la fin, la technologie d’avant-guerre a régné dans cette usine où les ouvriers devaient se battre pour chaque exemplaire produit. Il y aura bientôt 25 ans, la VEB Sachsenring de Zwickau a produit la toute dernière Trabant.
L’atelier N°2 de la VEB Sachsenring était étroit, bruyant et sale. C’était d’ailleurs une saleté que même une équipe de nettoyage entraînée ne pouvait pas venir à bout. Elle faisait partie intégrante du bâtiment. La saleté et les murs ne faisaient qu’un, un peu comme si chaque exemplaire des 3,4 millions de voitures produites ici avait laissé son empreinte. Une empreinte quasi invisible mais démultipliée par 80 ans de production. Ici chaque voiture avait marqué son territoire : « ici c’est ma maison ! ».
Gottfried Mühlmann a travaillé ici. Il connaissait bien l'étroitesse des lieux et la saleté omniprésente. Il se tient là, dans ce hall de montage qui n’a survécu jusqu’à aujourd’hui que par sa persévérance. Aujourd’hui l’endroit est propre et lumineux. Mühlmann se souvient combien d’années il a passé ici : « Nous formions une belle équipe » dit-il à la fin.
Mühlmann est né en 1942. En 1975, diplôme de fin d’études en poche, il est entré directement à l’usine de Zwickau où il est devenu littéralement homme à tout faire. Il devait remplacer la moindre absence. Il connaissait comme personne la technologie de la Trabant ou des machines qui la produisaient qui, même à l’époque où il a commencé à travailler, étaient déjà très vieilles et dépassées.
L’histoire de la société remonte à 1911 quand a commencé ici la production de la marque Audi. On y fabriquait une très bonne voiture, que personne ne voulait cependant acheter, et c’est la raison pour laquelle en 1928 l’usine a été rachetée par DKW. En 1931, c’est là qu’a été lancée la production de la DKW Front. Quatre ans plus tard, l’usine a été agrandie et une véritable chaîne de montage a fait son apparition. La production annuelle de l’usine de Zwickau devait alors dépasser les 50 mille voitures.
C’est exactement sur cette chaîne qu’a travaillé Mühlmann. 40 ans plus tard, avec ses collègues de la VEB Sachsenring, il produisait 107,000 Trabant chaque année, soit deux fois la capacité initialement prévue lors de la construction de l’usine. Dans la réalité socialiste ce fut une lutte constante pour améliorer la productivité et ce, de préférence, sans aucun investissement. Avec Honecker, et avec encore plus d’ardeur, on a commencé à chercher des capacités disponibles tout en faisant des économies. A la fin des années 80, la production annuelle était déjà de 140,000 véhicules soit 3 fois plus que prévu initialement.
« En 1988, on produisait 572 voitures par jour, raconte Mühlmann. Tout le monde essayait de travailler très dur et on était fier de la Trabi. Bien sûr, nous savions ce que valait notre voiture face à la concurrence internationale, mais nous étions aussi conscients des conditions dans lesquelles elles étaient produites. Chaque voiture sortait d’une usine totalement obsolète. Le goulot d’étranglement a toujours été, par exemple, la nécessité de mettre la voiture dans l’autre sens afin de pouvoir installer l’essieu arrière. Chaque voiture était sortie manuellement de la chaîne de montage, était retournée et à nouveau suspendue jusqu’à l’assemblage final ».
Mühlmann se souvient aussi très bien de certains processus d’assemblage de la Trabant. « Les vitres latérales arrières étaient positionnées sur la carrosserie puis d’un coup de la paume de la main elles était coincées dans le joint. Une autre personne tirait sur une corde insérée pour que le caoutchouc enveloppe la vitre. C’était ensuite terminé. J’ai répété ce geste si souvent qu’aujourd’hui j’ai encore une bosse à cet endroit précis de la main. Sur Youtube vous pouvez facilement trouver une vidéo datant du début des années 1990 où l’on voit les derniers instants de l’assemblage de la Trabant 601. La peinture par des ouvriers sans masque de protection est un détail qui suffit pour comprendre... ».
Mühlmann a également connu les derniers instants de l’usine. En 1998, la construction d’un nouvel atelier de production s’est achevée au nord de Zwickau, dans le quartier de Mosel. La même année les 150 premières Trabant 1,1 ont été fabriquées et moins d’un an plus tard les 722 exemplaires de pré-série sont tombés de chaîne.
Le 30 avril 1991 après la fabrication de 6 mille Audi, de 218 mille DKW Front, de 2 mille IFA F9, de 25 mille IFA F8, de 36 mille IFA P70 et d’exactement 3,096,099 Trabant, la production s’est arrêtée pour toujours à Zwickau. 3,4 millions de voitures c’est à la fois beaucoup et pas beaucoup. Sachez qu'entre 1922 et 1923 l’usine Ford de Highland Park (Detroit) a produit autant de voitures ! L’atelier N°2 ne produira jamais plus rien mais son histoire ne se terminera pas là. Le August Horch Museum, qui sera bientôt agrandi, utilisera bientôt ce bâtiment.
Lu sur : http://klasyki.auto-swiat.pl/trabant-od-podszewki-jak-wygladala-produkcja-trabanta/24zzz9
Adaptation VG