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On ne compte plus les voitures réussies qui n'ont pas connu la gloire parce qu'elles sont apparues au mauvais moment. Les tout-terrains soviétiques de l'époque de la Grande Guerre patriotique sont souvent qualifiés d'être mineurs. Ce sont tous des copies de la Willys américaine. Mais que dire du véhicule tout-terrain AR-NATI qui s'avérait être meilleur que la légende d'outre-Atlantique ?

Ce « véhicule de reconnaissance » est l'œuvre des concepteurs Alexandre Andronov et Vassiliï Rodionov de l'Institut de recherche scientifique sur les tracteurs, rebaptisé plus tard le NAMI. Même avant la guerre, ils admiraient les solutions adoptées par le tout-terrain allemand Tempo 1200. Ce dernier avait une conception extrêmement intéressante : deux moteurs, quatre roues motrices et directrices. Cependant, ces solutions techniques inédites étaient gâchées par des moteurs à deux temps de 600 cm3 développant chacun la puissance ridicule de 19 ch et par la légèreté générale de la conception.

Alexandre Andronov et Vassiliï Rodionov décident alors de créer leur propre version de ce véhicule militaire tout-terrain. Mais il n'était pas question de simplement copier le Tempo 1200. Il s'agit là d'un cas rare où l'originalité de la conception d'une voiture soviétique ne peut être mise en doute. Les deux ingénieurs commencent par l'élément le plus important : le châssis. En forme de vague - il était haut à l’avant, puis s’abaissait au niveau de l’habitacle et se relevait vers l’arrière - il constituait une base solide et fiable pour le véhicule. Il était ainsi possible de réduire le centre de gravité et libérer de l’espace pour les longs ressorts à lames avant et arrière. Il disposait d’une garde au sol suffisante et se distinguait par sa faible hauteur totale.

Le châssis et la suspension, reprenant des composants de limousine ZiS-101, faisait partie des rares éléments totalement originaux. Pour le reste, Alexandre Andronov et Vassiliï Rodionov vont utiliser activement des pièces provenant de l’Usine Automobile de Gorki. Le moteur était ainsi repris de la GAZ « Emka » profondément amélioré. L'embrayage et la boîte de vitesses provenait du camion GAZ-MM, la boîte de transfert de la berline à traction intégrale GAZ-61 et les freins du GAZ-11-73.

A noter que le AR-NATI, c’est son nom, devait initialement être équipé de deux moteurs, à l'instar du Tempo 1200. Mais finalement, au lieu d'une paire de moteurs provenant de la KIM-10, il s’est limité à un seul - celui du GAZ-M1. Le six cylindres en ligne d'une cylindrée de 3,2 litres a donc été modifié. Son taux de compression était légèrement augmenté, un nouveau collecteur d'admission installé ainsi que deux carburateurs. Ils fonctionnaient de manière séquentielle. Sur chaussé régulière, il n'utilisait qu'un seul carburateur. En tout-terrain, le conducteur devait appuyer plus fort sur l'accélérateur et le deuxième carburateur était activé.

Tous les travaux ont été réalisés en trois mois et deux prototypes entièrement opérationnels ont été fabriqués, équipés en outre de remorques. Au début du mois d’avril 1941, les premiers essais comparatifs sont organisés.

L’AR-NATI y a démontré d'excellentes performances tout-terrain - pas plus mauvaises que celles du Tempo 1200. En même temps, il était structurellement plus simple et donc moins cher, plus rapide et plus pratique. Il n'avait pas son pareil pour ce qui est de la douceur de fonctionnement. Les longs ressorts à lames lui offraient une combinaison étonnante de confort et de puissance pour un véhicule de ce type.

Fin avril, la voiture ainsi que le prototype GAZ R-1 sont présentés aux plus hauts dirigeants du pays. Staline a préféré l'AR-NATI à son concurrent GAZ lors de la présentation au Kremlin. La voiture est même recommandée pour une production en série et l'entrée en service dans l'Armée rouge. Mais cette décision n'intervient qu'en juillet 1941... La guerre est déjà là, l'Allemagne a attaqué l'Union soviétique le 22 juin 1941.

Les prototypes AR-NATI sont envoyés à Gorki et mis à disposition de GAZ. Il faut une usine à la mesure des enjeux de la production. Inutile de dire que les spécialistes de GAZ, qui ont développé un véhicule tout-terrain de leur propre conception, ne sont pas enthousiastes à cette idée. Cependant, GAZ ne réussira jamais à en maîtriser la production. Non pas parce qu'ils ne veulent pas, mais pour une autre raison. Lors du bombardement de l'usine, l'un des obus a touché l'atelier expérimental et détruit le premier prototype. Le deuxième exemplaire ainsi que d'autres prototypes GAZ sont évacués.

GAZ doit mettre au point son propre véhicule tout-terrain, qui deviendra le GAZ-64 et qui sera surnommé plus tard « Russian Willys » ou « Ivan Willys », celui que l'on aime tant accuser d'être mineur dans le rôle qu’il a joué ...

Lu sur :
https://auto.mail.ru/article/92827-kruche-villisa-pochemu-v-seriyu-ne-poshel-vnedoroz/
https://auto.ru/mag/article/sovetskiy-vnedorozhnik-istoriya-arnati/
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #AR-NATI, #Prototype, #Militaire, #URSS