Il n'est pas nécessaire de présenter la société Avia, basée à Prague, et ses utilitaires A30/31 et A15/20/21. Auparavant, ces fantômes bleus omniprésents sur les routes tchèques gravissaient toujours les collines à la tête d'une colonne de voitures particulières empoisonnées par la fumée noire de leurs pots d'échappement. Cependant, les camions légers produits à Letnany depuis 1968 n'étaient rien d'autre que des Saviems français produits sous licence, dont les pièces françaises d'origine ont été entièrement remplacées par des pièces tchèques et slovaques au fil du temps.
A l’orée des années 1990, l'intérêt pour ces camions ou camionnettes déjà obsolètes a diminué et les pertes ont dû être compensées par d'autres moyens que des tentatives de modernisation partielle. Là encore, la licence française a aidé.
L'impulsion directe, pour l'expansion de la gamme de l'entreprise du nord de Prague, a été le fait que la nouvelle armée de la République tchèque prévoyait un renouvellement important de sa flotte de véhicules tout-terrain légers, dont l'épine dorsale avait été les UAZ russes pendant de nombreuses années. Les directeurs de Letnany, vêtus de vestes violettes aux manches retroussées (ce qui était le dernier chic à l’époque), ont flairé l'occasion de réaliser l'affaire de la décennie.
Le développement en propre du type de véhicule requis était cependant utopique et l'expérience réussie de l'entreprise, bien que de longue date, avec les Français a orienté les dirigeants d'Avia vers Auverland, une petite entreprise engagée dans la production en petite série d’un tout-terrain rustique portant le nom de A3.
L’Auverland A3 était un véhicule spartiate de construction classique, à la manière des Jeep ou Land Rover originaux, avec une mécanique Peugeot. Le design lui-même remontait au début des années 1960, sous le nom de Cournil 4x4. Il est intéressant de noter que le modèle A3, produit à partir de 1986, est resté en production jusqu'en 2005. Rétrospectivement, on peut dire qu'offrir cet engin à l'armée tchèque était un coup d'éclat assez osé.
Le nouveau tout-terrain Avia a été présenté pour la première fois au public lors du Salon de l'automobile de Brno en 1993. Comme l'original français, la licence Avia prévoyait trois longueurs différentes sur deux empattements distincts et deux hauteurs d’habitacle, 1700 millimètres dans la version standard et 2000 millimètres dans la version surélevée. Le solide châssis était soudé à partir de tubes rectangulaires à parois fines et la carrosserie réalisée en tôle galvanisée d'un millimètre d'épaisseur.
Sous le capot se trouvait l'immortel diesel atmosphérique Peugeot XUD9 de 64 ch et 113 Nm de couple, qui permettait à l'A11 d'atteindre 115 km/h. Le constructeur revendiquait une consommation d'environ 9 litres aux 100 km sur route, et 10 litres par heure d'utilisation en tout-terrain. Le réservoir de carburant pouvait contenir 80 litres de diesel, il était donc bien dimensionné. A noter qu’une version suralimentée de ce moteur, développant 90 ch, a été proposée permettant à l’Avia « français » d’atteindre 135 km/h. Mais, on ne sait pas si quelqu'un a jamais essayé d'atteindre cette vitesse.
La boîte de vitesses à cinq rapports provenait également de Peugeot, ce qui n'était pas une solution heureuse pour une voiture globalement lourde. La traction avant était débrayée manuellement, il n'y avait pas de réducteur, et la boîte de transfert était héritée de l'Auverland.
En tout-terrain, les A11, alias Auverland A3, étaient une proposition sérieuse. Les angles d’attaque étaient favorables (50 degrés à l'avant et à peine cinq de moins à l'arrière), les voitures pouvaient supporter un devers de 40 degrés, des pentes de 100 degrés (soit 45 %) et pouvaient franchir des gués jusqu'à 580 mm. Elles étaient également dotées d'un essieu avant spécifique monté sur pivot à billes, ce qui était très utile pour le croisement de pont sur terrains difficiles, mais qui mettait les vies en danger lorsqu'il s'agissait d'aller plus vite sur la route !
L'A11 ne pesait que 1,300 à 1,350 kg selon la version et pouvait accueillir jusqu'à facilement huit passagers. Outre l'armée, Avia entendait le vendre aux forestiers, aux ambulanciers (un prototype d'ambulance figurait sur le prospectus) et à tous ceux qui devaient affronter des terrains difficiles.
Alors comment se comportait cet engin ? Quiconque a déjà conduit le Land Rover Defender ou le UAZ Patriot confirmera que la conduite de ces véhicules ne répond plus aux normes d'utilisation du 21e siècle. L'A11 Trend allait beaucoup, beaucoup plus loin, surtout en ce qui concerne la conduite sur route ordinaire. Un conducteur habitué au confort conduirait l'A11 sur quelques mètres avant de rendre les clés, bleu de peur. Attraper l'un des rapports relève de la loterie, l'embrayage est d'une raideur infernale et lorsque l'Avia démarre avec un léger rebond, l'habitacle, dont les parois supérieures et le toit sont en fibre de verre, est envahi par le rugissement frénétique du moteur et des pignons de boîte dès le premier rapport. Non, il n'est pas nécessaire d'aller plus loin, même si, cette voiture donne l’impression qu’elle pourrait grimper les murs.
En fin de compte, la commande ambitieuse de l'armée n'a pas abouti, l'état-major général ayant logiquement opté pour le Defender, qui a fait ses preuves (et gardé aussi un grand nombre de UAZ). Néanmoins, en 1996, quelque 250 exemplaires d’Avia A11 dans différentes versions avaient été produits. Après le rachat de l'usine automobile de Letnany par le groupe Daewoo, la nouvelle direction a perdu tout intérêt pour la poursuite du développement de ce projet non rentable et s'est rapidement débarrassée de la licence.
De nos jours, ces rares Avia peuvent être vus ici et là dans les régions reculées de Tchéquie, dans un état déplorable, mais généralement encore en état de marche, ce qui prouve la solidité de sa base mécanique. Il n'y a probablement pas lieu de se faire de grandes illusions quant à son potentiel en collection, mais si vous souhaitez un véhicule forestier un peu agile, pourquoi pas.
Légende des photos :
- L'Avia A11 Trend, alias Auverland A3, était bien adapté à la conduite tout-terrain, mais était loin d'être à la hauteur dans d'autres disciplines.
- L'Avia A11 Trend et l'Auverland A3 (en photo) étaient presque indiscernables.
- L'un des rares points positifs de l'A11 Trend était le grand nombre de variantes de carrosserie.
Lu sur : https://www.autosalon.tv/novinky/retro/retro-neni-avia-jako-avia-cesky-pokus-o-lehky-off-road-pro-armadu-skoncil-tezkym-fiaskem
Adaptation VG