Il s’agissait de la première voiture de tourisme soviétique qui pouvait être conduite sans trop de stress. Le plus surprenant en conduisant cette Moskvitch est que, malgré son âge et la faible puissance de son moteur, vous ne ressentez aucune sensation de lenteur ou de lourdeur. Bien sûr, selon les normes modernes, les 50 chevaux sont ridicules pour une voiture de ce type. Le rapport poids/puissance est de 26,6 kg par cheval. Une Hyundai Solaris, son équivalent moderne, développe 100 ch soit 15,6 kg par cheval. Pourtant, la Moskvitch ne donne pas l’impression de se trainer. Là est peut-être son charme ?
Seulement huit ans s’étaient écoulés entre l’apparition de la Moskvitch 402 (apparue avec le Dégel de février 1956) et le lancement par MZMA de la Moskvitch 408, une voiture avec une carrosserie entièrement nouvelle et très moderne. C'est avec la Moskvitch 402 que l’Usine Moscovite des Voitures de Petite Cylindrée (MZMA, rebaptisé AZLK en 1968) avait entamé un processus évolutif avec des voitures constamment, mais progressivement, modernisées. Par exemple, un moteur de 1,4 litre à soupapes en têtes, une boîte 4 vitesses et une suspension avant modernisée avaient fait leur apparition sur la Moskvitch 407. Les freins avant à double cylindres - un pour chaque garniture de tambours - et quelques éléments décoratifs que l’on retrouvait sur la Moskvitch 408, existaient déjà sur la Moskvitch 403.
En 1967, quand la Moskvitch rouge cerise de cet essai est née, plus de 90,000 exemplaires de ce modèle avaient déjà été fabriqués chez MZMA et plus de la moitié - plus de 46,000 - avaient été exportés. En grande majorité, les Moskvitch se retrouvaient en Scandinavie, en Finlande et en Grande-Bretagne. Il faut préciser que dans ces pays, elles coûtaient moins cher que les voitures analogues et se retrouvaient au niveau de modèles de catégorie inférieure. En Finlande, par exemple, la Moskvitch 408 était plus abordable que la moins chère des VW Coccinelle à moteur 1,2 litre. Mais dans les pays socialistes, les Moskvitch étaient considérées à l’époque comme prestigieuses. Bien sûr, si on la compare aux autres modèles qui étaient généralement disponibles pour les citoyens du camp socialiste !
En termes d’exportation, la Moskvitch 408 est en fait la première voiture soviétique à avoir été soigneusement développée au point de vue de la sécurité passive. Elle a été la première à avoir fait l’objet d’un crash-test sur le polygone d’essais de Dimitrov. Et l'organisation française UTAC a même certifié ses ceintures de sécurité.
La Moskvitch 408 était donc la première voiture de tourisme soviétique qui pouvait être conduite sans trop de stress. La Volga GAZ-21, la voiture fétiche de nombreux amateurs de voitures soviétiques, est avec tout le respect que l’on lui doit beaucoup plus encombrante, plus lourde et plus difficile à conduire. En termes de visibilité, elle ne peut rien contre la Moskvitch et son immense vitrage, même en l’absence de rétroviseurs extérieurs (elle était vendue comme cela en 1967 !). Avec elle, on n’a pas l’impression de conduire un char.
Certes, son moteur de 50 chevaux implique de nombreux changements de vitesses (le premier rapport très court est d’ailleurs conçu pour rouler « au pas ») et cela nécessite certaines compétences. Même sur cette voiture magnifiquement restaurée. Cependant, vous vous habituerez rapidement à l’élégant levier situé sur la colonne de direction, surtout si ce n’est pas la première Moskvitch que vous conduisez de votre vie. Comme sur les autres Moskvitch à propulsion apparues après elle, enclencher la marche arrière est tout un art. Sur la Moskvitch 408, il faut pousser au maximum le levier puis le relever. Ce n’est pas difficile à faire, mais vous n’obtiendrez pas toujours l’effet souhaité du premier coup !
Les freins à tambour sans amplificateur ne sont pas non plus le point fort de la Moskvitch, mais ils sont suffisants pour cette voiture de 50 chevaux si vous n’essayez pas de faire la course. Et cette voiture ne tirera pas d’un côté lors d’un freinage brusque, comme beaucoup d’autres Moskvitch avec des tambours à l’avant. Ici, les cylindres avant ne fuient pas ce qui arrivent plus souvent que souhaité.
La suspension se comporte bien et en toute confiance sur les petites irrégularités. L’habitacle est étroit mais la banquette avant est confortable. C’est pour cela que vous pourrez encore utiliser sans difficulté cette voiture aujourd’hui. Mais pour rouler ! Car au ralenti et à bas régime, par temps chaud, le moteur a tendance à chauffer plus que de raison.
Si vous la regardez avec les yeux d’un amateur de voitures des années 1960, alors c’est une voiture élégante et confortable. Une très bonne voiture pour l’époque. C’est pourquoi la fierté du héros du film « Le Bras de diamant » - une comédie de Leonid Gaïdaï sortie en 1968 - achetée avec des revenus illicites et qui fait l’envie de ses collègues est tout à fait réaliste et crédible. La Moskvitch 408 du film était exactement de la même couleur, mais avec quatre phares car c’était une version export. Les versions à deux phares étaient toutefois également exportées.
La Moskvitch 408 est typique de son temps, caractéristique de l'ère de la construction de gigantesques centrales électriques et de milliers de kilomètres de lignes à haute tension à travers la taïga et de cette accélération jamais vue auparavant de la construction de logements. Les khrouchtchevki de cinq étages, bien sûr, ne sont pas des hôtels particuliers. Comme la Moskvitch n'est pas une berline de classe affaires. L'URSS connaissait la première génération d’enfants qui n’auront jamais vécu dans des appartements collectifs. En 1967, lorsque cette Moskvitch 408 rouge cerise est née, la semaine de travail de cinq jours a été introduite et la télévision couleur a été lancée pour la première fois en Union Soviétique… et la première émission en couleur de la télévision soviétique a été la diffusion depuis la Place Rouge du défilé du 7 novembre. Il est vrai qu’à cette époque, les téléviseurs couleur étaient plus rares que les voitures particulières.
A bien des égards, la Moskvitch 408 est devenue un modèle de référence pour l’usine. Par exemple, il s‘agit de la première voiture de la MZMA dont la production a également été établie dans d’autres usines. Non seulement à Ijevsk, mais aussi dès 1966 à Lovetch en Bulgarie. Sa carrosserie élégante a servi de base au modèle suivant, la Moskvitch 412, qui était également révolutionnaire à sa manière avec son moteur une fois et demi plus puissant. La Moskvitch 408 a été fabriquée en parallèle à la Moskvitch 412 et certains appréciaient son moteur de 50 chevaux qui ne nécessitait pas de l’essence 93 à indice d’octane élevée, bien plus chère.
Mais la Moskvitch 408 est aussi associée à des évènements moins glorieux. Car à partir du début des années 1970, l’évolution des modèles de la marque a été plus lente et il a fallu attendre une décennie et demie la révolution, c’est à dire l’apparition de la Moskvitch 2141 et sa traction avant. La carrosserie et la suspension de la Moskvitch 408, qui ne correspondait clairement plus à son époque, a survécu sur les voitures d’Ijevsk jusqu’en 1998. Cela fait bien longtemps que la voiture avait cessé d’être le signe du progrès automobile soviétique pour devenir un symbole d’archaïsme et objet de ridicule.
Légende des photos :
- Le moteur 1,4 litre développe 50 chevaux, une puissance décente pour cette catégorie de voitures.
- Au milieu des années 1960, l’habitacle de la Moskvitch avait l'air moderne même à côté des « voitures étrangères ».
- Le tableau de bord avec son compteur de vitesse allongé et ses indicateurs ovales est déjà assez informatif par rapport à aujourd’hui.
- Un simple récepteur radio : c’est une voiture rétro !
- A gauche du volant on trouve les leviers pour ouvrir le capot et contrôler les volets du radiateur. Au milieu se trouve la commande de la pompe manuelle de lave-glace.
- Ces déflecteurs de portières assuraient la ventilation intérieure. Assez efficacement d’ailleurs.
- A gauche, à portée de main du conducteur, on trouve le levier de réglage du dossier de siège et la poignée d’ouverture du coffre.
- Les places arrière ne sont pas trop spacieuses, ni en longueur, ni en largeur. Sur le côté, les passages de roues prennent de la place.
- La roue de secours diminue le volume du coffre, mais chez MZMA on n’avait pas pu la mettre ailleurs.
- Les deux grands phares se trouvaient sur les modèles de base. Certaines versions pour l’export étaient équipées de quatre phares plus petits.
La production de la Moskvitch-408 a commencé en 1964. La voiture était équipée d'un moteur de 1,4 litre développant 50 ch et d'une boîte de vitesses à 4 rapports. A partir de 1967, la Moskvitch 412 a été fabriquée avec la même carrosserie. A compter de 1970, les deux modèles ont été restylés avec en particulier avec des phares rectangulaires. La Moskvitch-408 a été produite jusqu'en 1975. Son moteur a été installé sur la Moskvitch-2138 jusqu’en 1983.
Photos de l’évolution de Moskvitch-408 :
- Premiers prototypes.
- L'un des prototypes de la Moskvitch 408.
- Moskvitch 433.
- Moskvitch 408 Turist.
- Moskvitch 426P avec conduite à droite.
- Version finlandaise de la Moskvitch 426.
- Moskvitch 426.
La conception de la Moskvitch 408 a débuté en 1959. Les modèles de série ont été produits avec des calandres deux et quatre phares. En plus de la berline, on a fabriqué la fourgonnette Moskvitch 433, le break Moskvitch 426, des véhicules pour les services médicaux, des versions export et tropicalisées.
Sur la base de Moskvitch 408 a été créé un prototype avec une carrosserie à deux portes et toit rigide amovible, la Moskvitch 408 Turist. Certains exportateurs occidentaux ont aussi assemblé leurs propres versions. Ainsi, en Finlande, un break à trois portes était fabriqué à partir de la fourgonnette. En Belgique, on a construit des versions avec un moteur diesel Perkins de 43 ch. Dans certains pays, la voiture était vendue sous le nom de Elite.
Lu sur : https://www.zr.ru/content/articles/926162-stolichnaya-shtuchka/
Adaptation VG