En URSS, les constructeurs amateurs ont fabriqué au fond de leurs garages et hangars, des voitures uniques de tous types : des GT, des jeeps à deux roues motrices, de vrais tout-terrains et même des véhicules amphibies. A l’époque de la perestroïka, on s’est même intéressé au plus haut niveau à certaines samodelka à quatre roues motrices. Leur cohérence et leur ingéniosité les rendaient théoriquement aptes à une production en petite série.
Parmi ces projets, on trouve les Tbilissi et Iveria. Ces véhicules 6x6 avaient été conçus en Géorgie à Bolnissi par Gouram Kvernadze, un véritable passionné. En 1986, sur la base de UAZ réformés et en reprenant une cabine de camion KAZ « Kolkhida », il a construit en seulement quatre mois un véhicule permettant d’évoluer sur les longs sentiers montagneux du Caucase, là même où les 4x4 soviétiques échouaient parfois. Il était équipé d’un moteur et d’une boîte de vitesses de GAZ-24 et de ponts UAZ qui bien sûr avaient nécessité de sérieuses retouches pour ceux du milieu et de l’arrière.
Après un premier essai concluant avec le tout-terrain Tbilissi, plusieurs autres véhicules avec des carrosseries différentes ont été assemblés, y compris un modèle baptisé Iveria, avec un moteur V8 et une transmission améliorée !
Le Ministère de l’industrie automobile de l’URSS s’est alors intéressé à l'initiative géorgienne. Plusieurs modèles ont été envoyés à l’Institut NAMI pour être testés sur le polygone d'essai de Dmitrov. Les ingénieurs-testeurs ont admis que ces petits camions avec leur garde au sol de 220 mm surpassaient le UAZ en termes de qualité de conduite et de capacité de charge, mais qu’ils nécessitaient de sérieuses améliorations, y compris au niveau de l'ergonomie. Les espoirs de Gouram Kvernadze étaient douchés ! Et ce d’autant plus qu’à cette époque en URSS, il y avait de plus en plus de problèmes peu compatibles avec la mise au point et la production de nouvelles voitures.
La coopérative «Vezdekhod», organisée à Bolnissi (qui de peu a failli être la première coopérative automobile en URSS) a mis fin à son activité au début des années 1990 après avoir construit pour le Ministère de la santé local plusieurs ambulances à trois essieux sur la base de UAZ déclassés.
De leur côté, après avoir construit en 1988 deux voitures identiques portant le nom de Neva, Nikolaï Iakovlev et Vladimir Kapousto de Strelna ne comptaient bien sûr pas sur une production de masse. Mais leurs deux tout-terrains sont intéressants précisément parce que, structurellement et technologiquement, ils étaient bien plus adaptés à la production à petite échelle que d’autres samodelka.
Le châssis était constitué de deux longerons se rapprochant à l’extrémité avant et de trois traverses. Les longerons étaient en fait deux conduites d’eau soudées de 32 mm de diamètre auxquelles des profilés en L avaient été soudés par-dessus. Les traverses carrées étaient réalisées dans une tôle d’acier de 2 mm d’épaisseur. Fait intéressant, le berceau avant servait également de réservoir d’huile et l’armature de la bâche de toit était faite aussi de tuyaux.
Les moteurs et les boîtes de vitesses provenaient de Jigoulis : VAZ-2101 pour la première Neva et VAZ-2103 pour la seconde. La transmission était constituée d’éléments de GAZ-69 et UAZ-469. Le cardan entre la boîte de vitesses et la boîte de transfert était faits maison avec de croisillons de GAZ-69. Les ressorts et les amortisseurs provenaient d’une Volga GAZ-24. La carrosserie faite de tôles d’acier soudées. Une Lada Niva avait fourni les vitres, un GAZ-69 la direction - avec cependant une inclinaison modifiée, et une Volga les freins. Les sièges avant et certaines pièces de l’intérieur venaient également de la GAZ-24 et les sièges arrière étaient fait maison. Ces Neva pouvaient être facilement transformées en pickups et transporter jusqu’à 800 kg de chargement.
A l’aube de la perestroïka, le rêve du peuple soviétique pour une voiture pratique, peu coûteuse mais à quatre roues motrices, a incité non seulement des individus autodidactesmais aussi des petites entreprises à construire ce type de véhicules avec en tête une production en petite série. Mais les investisseurs n’étaient pas pressés d'investir dans de telles entreprises. Et ces samodlekas - malgré leur fort potentiel - ne pouvaient pas rivaliser avec les voitures de série, éprouvées et bon marché... Et bientôt la concurrence des véhicules tout-terrains soviétiques est venue des voitures étrangères d'occasion puis neuves.
A l'époque de l'URSS, les gens qui émettaient le désir de fabriquer leur propre voiture ne courraient pas les rues et la vie d'aujourd'hui est complètement différente. Le mouvement des « samodelka » sous la forme à laquelle il a existé ne reviendra jamais. Reste une histoire passionnante que nous sommes loin d'avoir déroulée jusqu'au bout !
Lu sur : https://www.zr.ru/content/articles/924614-samodelnye-vezdekhody-sssr/
Adaptation VG