Il y a cinquante ans, pour la première fois, une voiture que personne n’avait jamais vue commençait à envahir les rues. Au triumvirat composé de Volga, Moskvitch et Zaporojets, s’ajoutait un nouveau modèle que l’on regardait avec des grands yeux, une voiture qui avait quelque chose du jouet, manifestement inadapté à la réalité soviétique. Si à l’époque on avait dit que 30 ans plus tard, selon un sondage, elle serait désignée « meilleure voiture russe du siècle », vous auriez rigolé. C’est pourtant bien ce qui s'est passé au tournant du siècle !
Mais les temps changent. J’ai eu l’occasion de rencontrer un millionnaire - accessoirement député - qui a tiré toute sa fortune en vendant des voitures étrangères. Les mots VAZ et « production » ont suscité chez lui de l’hostilité. Si on n’avait pas fait de Lada, alors il serait aujourd’hui trois fois plus riche ! Peut-être, mais il n'avait qu'à choisir de vendre des matières premières à l’étranger… là est la recette de l'enrichissement rapide à la chute de l’URSS.
L’idée est aussi simple qu’une manivelle. Depuis de nombreuses années, on fait croire aux Russes que consommer est beaucoup plus facile et plus agréable que produire. J’ai fait travailler un gamin qui était convaincu de la nécessité d’acheter des pommes de terre en Nouvelle Zélande. Plus besoin de planter, récolter ou stocker quoi que soit : les Maoris le feront eux-mêmes. Il en va de même pour les voitures : pourquoi, se détruire la santé, si des ouvriers de n’importe quel autre pays les produisent eux-mêmes et nous les livrent. Nous avons une mer de devises… (du pétrole).
Aujourd’hui, ce millionnaire est en fuite… Je préfère nos millionnaires « historiques ». Par exemple Nikita Demidoff grâce à qui la Russie, habituée à importer du fer, fondait plus de fonte au début du XVIIème siècle que l’Angleterre toute-puissante. Il y eu aussi Afanasy Goncharov qui fabriquait des voiliers utilisés quasiment à travers toute l’Europe. Ces entrepreneurs avaient parfaitement compris que la place d'un pays dans le monde est déterminée avant tout à sa capacité à produire et pas du tout à importer des produits. C’est justement pour élever le pays à un nouveau niveau que l’usine de Togliatti a commencé à fonctionner, il y a un demi-siècle de cela.
Et la première née de VAZ, qui laissait sceptique au début, a rapidement tourné l’opinion publique en sa faveur. Il est vite devenu évident que cette voiture démarre facilement par tous les temps, laisse tout le monde derrière elle sur l’autoroute, a un intérieur chic et qu’elle n’a pas besoin qu’on claque ses portières. En général il s'agissait d'une voiture étrangère à part entière, une voiture que les gens n’avaient encore jamais vraiment vue. C’était la voiture avec laquelle on pouvait aller à la datcha, au travail, en vacances, au magasin ou faire une balade avec sa femme bien-aimée…
Mais le plus important c’est que, grâce à VAZ, l’industrie automobile nationale est passée à un autre niveau. Des magasins et des garages portant l’emblème de la traditionnelle ladia ont fait leur apparition dans tout le pays. De nouveaux emplois ont été créés, des entreprises sous-traitantes ont commencé à travailler pour la chaîne de production des Lada. En posséder une est rapidement devenu un symbole de réussite. Dans le même temps, les Jigoulis sont parties à la conquête de l’étranger rapportant aux caisses de l’Etat une masse de devises étrangères. « Nous pouvons tout réussir ! ». Tel était le leitmotiv de l’époque.
Aujourd'hui les compliments envers VAZ sont rares. Lentes, dépassées, inefficaces : la liste des reproches à l'encontre de ses voitures s’avère être longue. Pourtant des millions de personnes les conduisent et vont continuer. L’industrie automobile vit aujourd’hui - comme nous tous - des moments difficiles, mais elle est obligée de travailler. C’est la production industrielle qui a toujours distingué un pays développé d'un pays fournisseur de matières premières plus prospère. Par conséquent, discuter avec des experts convaincus que « dans ce pays il n’y jamais rien eu et qu’il n’y aura jamais rien » est quelque peu embarrassant.
En ce sens, nous pouvons féliciter la Kopeïka et ceux qui ont participé à son succès pour l’étape importante qu’ils ont écrit pour l’histoire du pays.
Lu sur : https://www.zr.ru/content/articles/922677-pochemu-avtovaz-ne-lyubyat/
Adaptation VG