Alors que l’Usine Automobile d’Oulianovsk améliore lentement le Patriot, essayant par petites touches de rendre son tout-terrain plus pratique, des fans essaient des solutions plus radicales. Certains vont si loin, que le Patriot en devient méconnaissable.
« Comme un kéké en Subaru, nous virons rapidement … ». Mais ce n’est pas une Impreza mais un Patriot que nous avions déjà rencontré fin 2017 et qui a depuis évolué encore plus radicalement. A l’époque Victor, le propriétaire de la voiture, en collaboration avec un garage avait monté sur son UAZ une boîte automatique Aisin bien avant que le constructeur russe ne la propose (rappelons que le UAZ Patriot a deux pédales n’apparaîtra que fin 2019). La transformation s’était avérée être un succès : Victor a parcouru sans problème déjà plus de 20,000 km à la fois sur la route et en tout-terrain.
Après avoir résolu la question de l’amputation de la pédale d’embrayage, Victor s’est occupé du problème suivant : le moteur. Il n’existait aucune solution typique et efficace pour améliorer les performances du Patriot. Certains artisans proposaient du « chip-tuning » en remplaçant les boîtiers électroniques d’origine par des Yanvar ou Mikas, quand d’autres étaient plutôt des adeptes de la chirurgie profonde par un changement de moteur ou au moins une préparation selon des recettes appliquées dans le monde de la course. La première solution bien que peu coûteuse s’est rapidement avérée inutile car en raison du bus CAN, l’électronique du Patriot refuse toutes pièces étrangères et perd les pédales. A quoi bon améliorer les accélérations si vous perdez le système de stabilisation ou le blocage de différentiel ?
C’est pour cela que Victor a préféré monter un turbocompresseur sur le 2,7 litres essence ZMZ-409 d’origine en modifiant le minimum de pièces. Mais cela n’a pas été aussi facile que prévu.
Au début, les spécialistes a qui il s'est adressé, ont installé sous le capot la turbine du turbodiesel ZMZ-514. Un choix d’autant plus logique que ce diesel est proche techniquement du 409 essence et que les modifications devaient être minimes. Mais en pratique, ils avaient tout faux : il n’est pas prévu de refroidir le turbocompresseur ce qui explique pourquoi, chauffé au rouge, il brûlait de l’huile. Même un radiateur additionnel ne permettait pas d’améliorer les choses. De plus, l’apport du turbo n’était sensible qu’à bas régime, jusqu’à 1,500 tr/min car le moteur n’aimait pas monter dans les tours et craignait la chaleur.
Ensuite, ils on essayé sur le Patriot un turbocompresseur compact Garrett GT17. Il était efficace et refroidi normalement, mais la pompe à huile standard ne suffisait plus : ce turbo souffrait donc du même défaut que le turbo du ZMZ-514. De plus, l’augmentation progressive de la pression de turbo de 0,3 à 0,7-0,8 bar n’a pas eu l’incidence escomptée sur les performances. Selon les experts, il aurait fallu pousser la pression à 1,5 bar. Une pression que le ZMZ-409 de série ne supporterait à moins de subir de profondes modifications.
Il a fallu trouver une troisième option. Mais cette fois-ci, nos spécialistes ont dû abuser d’un langage imagé pour ajuster le volumineux Garrett GT2860 au moteur et trouver sous le capot la place pour les grosses durites, l’intercooler, la soupape de décharge HKS… Mais au final, le turbocompresseur souffle comme il faut ! Il leur a toutefois fallu remplacer les injecteurs d’origine par ceux d’une Saab car ils ne délivraient plus suffisamment de carburant. Après ces premières transformations, on ne pouvait pas encore crier victoire car il fallait encore modifier l’électronique pour peaufiner le fonctionnement de ce Patriot turbocompressé.
Victor s’est adressé à Roman Brodski, un spécialiste bien connu des amateurs de UAZ. Il est parti de zéro pour réécrire un nouveau firmware pour le boitier électronique permettant au turbocompresseur de fonctionner correctement. Tout a été longuement testé : 80 litres d’huile moteur ont été utilisé et 40,000 roubles investis chaque mois pour les essais qui ont duré un peu plus de trois mois.
Le coût de la transformation de ce moteur dépasse le demi-million de roubles, conséquence des nombreux essais effectués sur le matériel et les différentes programmations testées. Aujourd’hui TD UAZ Motors (qui monte en masse des boîtes automatiques sur les UAZ) dispose d’un kit-turbo totalement adapté et qui peut être monté clés en main. Le client apporte sa voiture, paie entre 180 et 190 mille roubles et en trois ou quatre jours il repart au volant d’un tout-terrain puissant sans avoir à se poser des nœuds au cerveau sur les réglages électroniques et sur le choix des pièces.
Bien sûr, cela coûte cher. On ne peut pas comparer cela avec du chip-tuning entre 3,000 et 15,000 roubles mais le résultat est impressionnant. Sur le banc de mesure, le Patriot turbo réglé à 0,65 bar développe près de 180 chevaux et 325 Nm. Des valeurs à comparer aux 135 chevaux et 217 Nm du UAZ Patriot de série. Selon nos spécialistes, ces résultats sont obtenus sans trop de stress sur la mécanique et c’est pourquoi la transformation est garantie 6 mois ou 15,000 km. Victor a cependant pris un risque en allant un peu plus loin : le diamètre des conduits a été augmenté et le silencieux a été remplacé par une sortie directe Magnaflow. Avec une pression de suralimentation portée à 0,75 bar, une telle configuration doit pouvoir donner 200 chevaux.
Nous décidons d’en avoir le cœur net en démarrant ce Patriot « gonflé ». A ce stade tout est standard. A l’oreille, il n’y a pas de différences avec le modèle atmosphérique. Mais dès qu’il roule… Avec des petites roues en 246/75 R16, Victor passait de 0 à 100 km/h en 10,5 sec ! Une valeur modeste dans l’absolue mais qui rapportée au Patriot d’origine a de quoi étonner puisque ce dernier effectue le même exercice en 17 ou 18 sec. Et l’on doit pouvoir faire encore mieux même si la transmission semble extrêmement réticente à tolérer un couple supérieur à 300 Nm !
Dans sa configuration actuelle, la voiture de Victor est un peu plus lente. Car il voulait que sa voiture ait l’air inhabituelle. Dans les ateliers de Rubber Paint et pour 120,000 roubles, le UAZ Patriot noir s’est recouvert d’une peinture jaune vif avec un revêtement spécial permettant de la protéger.
Le kit-carrosserie « Grand Patriot » apporte une touche supplémentaire avec ses pare-chocs enveloppants et des extensions d’ailes et de seuil qui rendent ridicule les roues d’origine. Le UAZ reçoit donc ici des jantes ION-196 de 20 pouces avec des pneus 275/60 Nokian Rotiiva AT. Le diamètre extérieur de l’ensemble approche les 33 pouces et c’est pourquoi le châssis a nécessité quelques légères modifications : le train avant est ainsi avancé de 1,8 cm en ajoutant des rondelles aux supports des bras longitudinaux. Un transformation sans incidence sur l’arbre de transmission car il y a suffisamment de marge.
Chaque jante de 20 pouces pèse dix kilos de plus que celle d’origine. Ce poids se ressent bien entre les mains du conducteur : la direction assistée gronde et vibre et on sent que le volant devient lourd dans les virages. Mais la visibilité devient meilleure car le UAZ, déjà très haut, augmente d’environ 4 cm. Vous vous sentirez presque comme dans un camion en voyant tout ce qui se passe au-dessus des toits des véhicules tout-terrain ordinaires ! Sur les petites irrégularités, le confort augmente en raison des gros pneus mais dans les gros trous, les ponts (et en conséquence la carrosserie) tremblent déjà plus fort.
Lors de notre tentative de traverser Moscou aux heures de pointes, la présence du turbo ne s'est remarqué qu’aux soupirs de la soupape de décharge. En général, à bas régime, le ZMZ-409 turbocompressé semble beaucoup plus élastique que le moteur d’origine mais l’augmentation du couple semble absorbée par le poids des énormes roues. Quand le trafic est dense, on ne voit donc presque pas la différence avec un Patriot normal.
Par contre, plus la route se libère et plus il devient difficile aux freins et aux pneus de contenir la puissance de ce UAZ turbocompressé. Si cela n’a aucun sens de pousser le ZMZ-409 atmosphérique au-delà de 3,000 à 3,500 tr/min, à ce régime le plaisir pour le conducteur de ce diable jaune ne fait que commencer. En ce sens, le tout-terrain dopé d’Oulianovsk rappelle les Honda de la vieille école dotées du système VTEC qui semblaient avoir deux moteurs sous le capot. Ici aussi, les relances sont perceptibles et ne s’atténuent que lorsqu'on atteint le rupteur. A l’ère de l’hystérie environnementale, ce moteur « on / off » est perçu comme un doux rappel du passé.
Nous accrochons un GPS d’acquisition de données Racelogic au pare-brise pour remplacer les émotions par des chiffres plus objectifs. La meilleure mesure de 0 à 100 km/h de notre Patriot équipé de jantes 20 pouces avec une personne à bord et un sac de voyage dans le coffre s’établit à 12,7 sec. C’est peu, non ? Oui. Ainsi gréé, le Patriot est donc incapable de rivaliser avec bon nombre de crossovers. Cela dit, il est toujours plus rapide que le modèle d’origine même avec le tout-nouveau ZMZ Pro de 150ch. L’expérience montre que chaque pouce supplémentaire au niveau des jantes ajoute environ une seconde aux accélérations. Et durant notre essai, une personne de plus à bord a elle aussi aggravé les résultats d’une demi-seconde.
Victor envisage de remédier à cela. Il est possible qu’à l’avenir, ce brillant Patriot reçoive un deuxième turbocompresseur et des améliorations au niveau du châssis. En attendant, cette conversion « turbo + boîte auto » intéresse de plus en plus de monde, même à l’étranger. Par exemple, le distributeur libanais s’intéresse à ce type de Patriot. Des représentants sont venus à Moscou pour l’étudier, des mécaniciens sont venus en formation, des kits de transformations sont commandés en Russie et montés au Liban sur des… Hunter. Des partenaires kazakhes s’y intéressent aussi. Et chez TD UAZ Motors, on finalise une GAZelle avec une boîte automatique et un Chevrolet Niva turbo… Mais c’est une autre histoire !
Légende des photos :
- Si vous prenez un Patriot neuf dans une configuration riche, installez un kit turbo et une boîte automatique, appliquez un revêtement protecteur, rajoutez un kit-carrosserie complet et remplacez les roues pour du 20 pouces, alors son coût passera à près de deux millions de roubles.
- A part le levier de la boîte automatique, l’intérieur de ce Patriot turbo ne se distingue du modèle de série que par l’écran miniature du contrôleur de pression GReddy, mais vous n’êtes pas obligés de l’installer.
- Outre le turbocompresseur, la préparation du ZMZ-409 nécessite le remplacement de la pompe à huile, des injecteurs, du capteur de pression, un travail sur l’admission et l’échappement, l’installation d’un intercooler et le changement du boitier électronique. Il faudra aussi beaucoup d’effort pour installer un turbocompresseur sur le nouveau moteur ZMZ-Pro car il faudra réduire son taux de compression.
- A strictement parler, la transformation doit être homologuée. Mais selon Victor, la police arrête surtout le UAZ par curiosité, pour le regarder et le laisse repartir en paix. Le préparateur, contre un supplément, est toutefois prêt à aider ses clients à légaliser les modifications.
- Ce que vous avez sous les yeux est l’une de la douzaine de variantes de design envisagée par Victor. Le kit carrosserie « Grand Patriot » (pare-chocs, bas de caisse et passages de roues) coûte environ 120,000 roubles, mais les pièces sont vendues séparément. Il y a des kits peints dans les teintes proposées de série par le constructeur.
- Durant notre essai, la consommation moyenne du Patriot turbo s’est établie à 16,2 l / 100 km. Mais tout dépendra de votre tempérament. Plus vous appuierez sur l’accélérateur et plus la différence avec le modèle atmosphérique sera tangible.
Lu sur : https://auto.mail.ru/article/71944-krutoi_uaz_testiruem_krasivyi_patriot_s_turbo_i_avtomatom/
Adaptation VG