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ZiL-112S : elle ne pouvait pas exister !

De nos jours, il est difficile de croire que dans les années 60 en URSS on organisait une douzaine de courses sur circuit par saison. A cette époque même ZiL construisait des voitures de course. Za Roulem nous présente l’étonnante ZiL-112S. Le fait que cette voiture ait survécu, en relativement bon état, tient du miracle. A la fin des années 60, quand sa carrière sportive s’est achevée, elle était destinée à la casse. Que lui serait-il arrivé si elle n’avait pas croisé la route d’un tas de cinglés à Moscou et à Riga ? Aujourd’hui, cette voiture est exposée au musée de l’automobile de Riga aux côtés de voitures de course beaucoup plus récentes.

La ZiL-112S est la dernière d’une pléiade de voitures de sport réalisées par l’Usine Likhatchev, dont l’histoire a débuté juste avant la guerre avec la légendaire ZiS Sport et dont l’âge d’or se situe dans les années 50 - 60. Ces voitures tenaient haut la bannière du sport soviétique. Ces fleurons de l’industrie automobile de l’URSS surprenaient dans le paysage automobile habituel et étaient les Gran-Turismo du pays : des deux places presque normales, avec des portières et des phares, mais adaptées à la compétition.

La direction de l’usine soutenait les enthousiastes du « laboratoire » des voitures de sport, dirigé par Sergueï Glazounov. Les meilleurs ingénieurs et stylistes de l’usine travaillaient sur ces voitures dont le style étonnait. Mécaniquement c’était un peu plus difficile. Ils utilisaient des pièces et les moteurs de ZiS-110 et ZiL-111 et essayaient de rendre chaque nouveau modèle plus léger, plus rapide et plus efficace que le précédent.

Ces ZiL sportives, comme d’ailleurs d’autres voitures de course des années 50 et du début des années 60, prenaient part à la propagande de cette époque turbulente et colorée. L’URSS, enthousiaste, construisait logements, centrales électriques, usines (y compris automobiles) et partait à la conquête du cosmos ! D’ailleurs quand la carrière de la ZiS-112 a débuté en 1962, l’Union soviétique a fait décoller à un jour d’intervalle Vostok-3 et Vostok-4, constituant ainsi les premiers vols spatiaux habités simultanés de l’histoire. La même année, le Prix Nobel de physique a été décerné à Lev Landau, un physicien soviétique. Le pays allait toujours de l’avant et on pensait qu’il en serait toujours de la sorte.

Toute une variété de véhicules prenait le départ des compétitions automobiles : on trouvait pêle-mêle des équipes d’usine et des amateurs de mécaniques faisant partie de clubs, de compagnies de taxis ou de sociétés automobiles. Pour être honnête, la plupart des voitures engagées étaient structurellement et stylistiquement primitives mais certaines étaient vraiment intéressantes et leurs créateurs faisaient de leur mieux pour transformer leurs rêves de victoires en réalité.

Les deux ZiL-112S ont fait leur apparition au début des années 60. Extérieurement elles faisaient penser à la célèbre Ferrari 250 mais sous cette carrosserie... les ingénieurs avaient fait tout ce qu’ils pouvaient. Les voitures disposaient d’une carrosserie en fibre de verre sur un châssis tubulaire et étaient équipées d’un moteur 6 litres de ZiL-111 de 240 ch. La boîte trois vitesse et l’embrayage provenait d’une ZiS-110 ordinaire (modernisée, il est vrai). Le pays n’avait rien de mieux. La suspension avant et la direction provenait d’une Volga GAZ-21. La suspension arrière, semi-rigide de type De Dion, était entièrement originale. On avait également prévu de pouvoir changer rapidement les pignons de boîte en fonction des courses.

La seconde voiture, qui avait été construite un peu plus tard, disposait de freins avant à disque conçus spécialement pour elle. L’URSS n’en faisait pas encore et il était impossible de les importer. Pour une usine comme ZiL, il était donc plus simple de les fabriquer soi-même. Théoriquement, ce magnifique bolide pouvait atteindre 260 km/h, une vitesse incroyable à l’époque pour le pays (si on ne tient pas compte des véhicules de records). A noter qu’en 1962 on a essayé sans succès de battre, sur le lac salé Baskountchak, quelques records de vitesse d'URSS avec l’une des deux ZiL-112S recarrossée spécialement.

Bien entendu, à côté de ses homologues occidentales - Jaguar, Mercedes et Ferrari - la ZiL-112S ressemblait à une copie de GT européenne réalisée par des amateurs pour participer à des courses. La voiture soviétique n’avait de toute manière ni leurs performances (que ce soit en matière d’accélération ou de freinage), ni leur tenue de route, et l’on ne mentionne même pas la finition. A vrai dire, cela n’avait pas guère d’importance puisqu’en course la ZiL devait faire face à des voitures très différentes.

Quand on regarde de vieilles phtoos, il est très étonnant de voir les ZiL-112S concourir avec des monoplaces à roues découvertes. Il faut dire qu'elles ont toutes débuté en URSS en « Formule Libre » (à partir de 1963 elle courraient en groupe B et à partir de 1965 en Formule-5). La première saison en 1962 n’a pas été très réussie. En Estonie, lors d’une étape du championnat de l’URSS, le pilote d’usine Victor Galkine n’a terminé qu’à la neuvième place. Mais en 1963, il a remporté une course sur le circuit de Minsk et remporté la médaille de bronze au championnat. Sur le circuit de Kaunas, il a même atteint la vitesse moyenne de 127,75 km/h.

Cela vous paraît peu ? Voyez la voiture ! On peut tirer son chapeau aux pilotes de l’époque. La tenue de route n’est pas terrible et les freins sont loin d’être parfaits (pourtant la vitesse maxi reste encore impressionnante aujourd’hui). Le pilote avait devant lui un petit pare-brise et un tableau de bord rigide avec de nombreux compteurs. Le pilote, si ce n’est le casque et le frêle arceau, n’avait ni arceau de sécurité digne de ce nom, ni ceinture. On était très loin des normes de sécurité occidentales et il fallait aimer l’automobile et le sport pour aller sur un circuit avec ce roadster. C’était une époque épique !

La ZiL-112S avait été conçue pour être produite en petite série. Les voitures spécialement préparées ont même participé à des courses d’endurance sur des circuits à l’étranger (au Mans et à Spa) et tenté de rivaliser avec des concurrentes de renom. Bien-sûr cela ne pouvait marcher. Comment l’URSS aurait pu construire une vraie voiture de grand tourisme pouvant concurrencer les voitures occidentales (sur les circuits ou sur les marchés mondiaux) ?

Dans la seconde moitié des années 60, le « laboratoire » a été fermé pour arrêter de dépenser l’argent et détourner le personnel de sujets bien plus importants : les limousines gouvernementales. On a même essayé de détruire ces voitures. Mais dans la seconde moitié des années 70, des Moscovites qui n’étaient pas indifférents à leur histoire, les ont envoyées à Riga.

Une voiture cependant a été accidentée. Elle n’a jamais été réparée entièrement. Elle se trouverait aujourd’hui en Suède selon les uns, en Allemagne d'autres. La seconde voiture, Za Roulem a pu la rencontrer ! Elle vit dans le confort à Riga et parfois elle pose ses roues sur le circuit situé près du musée.

Un vrai miracle, n’est-ce pas ?

Légende des photos :

  • Ces échappements aimeraient bien être chromés.
  • Le réservoir et la goulotte de remplissage sont situés derrière les sièges.
  • La roue de secours occupe tout le coffre.
  • Au tableau de bord on trouve des indicateurs de température d’eau et d’huile, un manomètre de pression d’huile, un ampèremètre et une jauge à carburant.
  • Il y a de la marge sur le compteur de vitesse, mais la voiture pouvait réellement atteindre les 260 km/h.
  • Cette voiture de grand tourisme avait même une boîte à gants.
  • Sous le capot, un moteur V8 ZiL.
  • Le frein de parking, comme sur la ZiL-111, est au pied.

Lu sur : http://www.zr.ru/content/articles/628934-zil-112s-ne-mozhet-byt/
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #ZiL, #112S, #Sport