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Il y a 25 ans : un triste million.

La Trabant est l'un des symboles de la contradiction entre les aspirations et la réalité de la RDA. Durant des décennies, elle n’a pas évolué. Il y 25 ans, la trois millionième Trabant était produite par l’Automobilwerk Sachsenring de Zwickau.

« J’ai toujours eu une bonne relation avec elle. Elle ne nous a jamais laissé tomber. Et sur nos routes, la Trabant rivalisait avec les meilleures ». Pour cette conductrice de Zwickau, la Trabant méritait bien son nom. Elle était un compagnon fidèle. Spoutnik est la traduction en russe de Trabant. Un nom synonyme de l’euphorie de la victoire du socialisme après le lancement de la fusée soviétique. En raison de son moteur deux temps, l’échappement laissait derrière lui un panache bleu et malodorant. C’était le quotidien de la RDA. Depuis 1958, la Trabant était produite en série à Zwickau et le modèle 601 qui a fait son apparition en 1964 n’a connu que peu de développements.

Pourtant les ingénieurs est-allemands ne manquaient pas de bonnes idées . Hans Künschner, ingénieur en mécanique se souvient : « Il y a eu de nombreux prototypes mais ils n'ont jamais fait leur apparition sur le marché. La direction politique de ce pays avait promis à l’automobile une existence ténébreuse. Pourquoi ? Parce qu’elle pensait que le socialisme viendrait des transports publics. Ce sont les malins, les mécréants, les capitalistes qui possédaient une voiture ».

Dans l’économie de la RDA, la Trabant a toujours été considérée comme une rareté. Construite en petites quantités, le délai d’attente de douze ans était considéré comme normal. Cette rareté en faisait aussi un symbole de statut de de bon investissement. Les Trabant d’occasion étaient aussi chères que les neuves, lesquelles coûtaient en fonction de leur équipement environ 9,000 marks. « Les qualités de la Trabant : confortable pour 4 adultes, beaucoup d’espace pour les bagages, agile, rapide, résistante et robuste ».

Elle n’accélérait pas de manière linéaire, elle passait de 0 à 100 km/h en une minute puis empêchait toute conversation à vitesse maxi à cause du bruit de son moteur. On la surnommait « Plasteporsche » (la « Porsche en plastique »), « Rennpappe » (la « voiture de course en carton »), « überdachte Zündkerze » (« la bougie d’allumage qui ruminait ») ou « Gehhilfe » (« l’assistante »). Quand la Trabant commandée arrivait enfin, on l’accueillait avec fierté comme un nouveau membre la famille.

« C’était une voiture robuste. Ce n’était pas une mécanique de course. Vous pouviez faire beaucoup de chose par vous-même. J’ai eu un accident dans un carambolage. Le capot et le coffre étaient cassés. Je les ai réparés moi-même. Cela m’a coûté 161 marks. Cela n’était rien. Elle était fiable, il n’y a pas à se plaindre ».

Le 21 mai 1990, la trois millionième Trabant a été produite par l’usine. Spécialement décorée, elle a été applaudie par l’ensemble des ouvriers rassemblés pour l’occasion. Mais l’ambiance n’était pas particulièrement festive. « La trois millionième est prête. Le sommes-nous aussi ? » avaient écrits des ouvriers sur une pancarte. Wolfgang Neef, le directeur résume la préoccupation d’ensemble : « Il ne fallait pas juste voir cette Trabant, mais aussi le symbole de la RDA. Dans cette voiture on voyait en quelque sorte l’impuissance de l’ensemble du système à faire quelque chose de moderne ».

Il y avait tout de même un lueur d’espoir en ce jour particulier. Si la trois millionième Trabant ne différait en rien extérieurement des modèles précédents, elle cachait sous son capot un cœur tout neuf : un moteur à quatre temps moderne d’origine VW ! Dès 1984, Volkswagen avait vendu une licence de production à la RDA ainsi que l’équipement de production nécessaire et le savoir-faire. Mais la production avait été retardée d’années en années. En mai 1990, il était déjà trop tard. Six mois avant la chute du Mur, les voitures de l’Ouest – d’occasion ou non – étaient devenues l’incarnation de la nouvelle liberté retrouvée. Et cette nouvelle Trabant ne pouvait plus changer le cours des choses.

« Après 25 ans passés dans la même société, il fallait bien que cela s’arrête un jour. Pour tout le monde c’était clair. Les coûts de production étaient trop élevés et la Trabant ne pouvait pas exister sur le marché mondial. Mais tout de même, cela représentait 25 ans de notre travail ».

La conclusion définitive a été tirée le 30 avril 1991 : à 14h51 la dernière Trabant a quitté le hall de montage de l’Automobilwerk Sachsenring pour rejoindre directement l’August-Horch-Museum de Zwickau.

Lu sur : http://www.deutschlandfunk.de/vor-25-jahren-keine-feierlaune-beim-dreimillionsten.871.de.html?dram:article_id=320369
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #Trabant, #Anecdote