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La limousine ZiS-101 fut en 1936 la première voiture d’apparat produite en série par l’Usine Staline de Moscou (ZiS). La décision de lancer la production de la « Buick » soviétique avait été prise le 20 juillet 1932. Quelques années plus tôt, en 1926, un modèle de cette marque américaine avait passé avec succès tous les
tests réalisés lors d’un voyage entre en Moscou et la Crimée et la société américano-soviétique « Am-Torg » achetait régulièrement ces mêmes Buick. Pour en réaliser la copie soviétique, le choix se porta sur le modèle le plus grand et le plus puissant, la limousine 32-90. On prévoyait même d’en produire 20,000 par an, mais force est de constater que le 1er mai 1933, seules six voitures, portant le nom de « Leningrad-1 » ou L-1 avaient été réalisées. L’usine choisie n’avait pas su faire face à ses obligations. De plus, la L-1 tombait souvent en panne car sa fabrication manquait de sérieux. Le Commissaire au peuple à l'industrie lourde eu donc pour tâche de créer une limousine digne des représentants soviétiques et dont la production serait transférée de Leningrad à Moscou à l’usine ZiS.

On prit comme modèle la même Buick, mais un modèle 1933-34 et on conserva le châssis en X et le moteur à arbre à came latéral et boîte 3 vitesses. En 1934, l’ingénieur Evgueni Vazhinski écrit dans Za Roulem : « L’Usine Staline produira dès le début de 1936 la limousine 7 passagers ZiS-101 ». On prévoyait d’en produire 10,000 exemplaires par an. Cette nouvelle voiture s’inspirait de ce qui se faisait de mieux chez les grandes marques américaines de l’époque, Buick et Packard. Extérieurement elle était très proche de la Buick 1934 à carrosserie Sedan. L’article publié dans Za Roulem comportait un dessin de la future voiture qui confirmait cette ressemblance. Pourtant, pour une raison inconnue, les premiers prototypes de la ZiS-101 étaient bien différents de leur modèle américain, bien qu’ils fussent globalement proches. Ainsi, la calandre inclinée avec ses moulures chromées était clairement copiée de la Plymouth 1935.

Les deux premiers prototypes de la ZiS-101 furent fabriqués en mars 1936. La neige tombait encore quand le directeur de ZiS, Ivan Likhatchev, effectua un essai du châssis nu de l’un de ces prototypes. La carrosserie n’avait pas encore été montée. Malgré la neige et le vent, Likhatchev fit l’aller-retour entre l’usine et Podolsk. Le mois suivant fut consacré à la finalisation de ces deux prototypes avant leur présentation aux membres du Parti et du gouvernement. Une des ZiS était peinte en noir et l’autre en rouge cerise. Les présentations ont eu lieu le 29 avril 1936 au Kremlin en face des dépôts d’artillerie. Le Secrétaire du Comité Central du Parti Communiste, Joseph Staline, le Président du Conseil des commissaires du peuple,Viatcheslav Molotov, le Commissaire du Peuple à l’Industrie lourde, Sergo Ordzhonikidze, le Commissaire du Peuple pour le Commerce intérieur, Anastase Mikoyan, et d’autres personnalité de haut rang étaient venus admirer la nouveauté. Ils examinèrent minutieusement les deux ZiS-101, les comparant à leurs concurrentes étrangères et firent leurs remarques. Staline proposa de faire un logo en forme de drapeau rouge flottant avec une étoile. La conception de la voiture était terminée : visiblement, ce jour-là, le « Petit père des peuples » était de bonne humeur. La ZiS-101 démarrait bien dans la vie.

La production de la ZiS-101 commença près d’un an plus tard, en janvier 1937. Les machines furent montées sans précipitation et longuement testées. Pour l’industrie automobile soviétique de l’époque, la voiture était très complexe. De nombreuses solutions techniques étaient inédites pour le pays. Par exemple la carrosserie limousine avec une cloison de séparation entre le poste conducteur et le reste de l’habitacle. La structure était réalisée en bois de hêtre, que seuls des ouvriers extrêmement expérimentés pouvaient travailler.

La ZiS-101 était considérée comme une voiture très confortable. Elle possédait un chauffage de l’habitacle, que les chauffeurs désignaient par le terme anglais « Heater ». Elle disposait d’un coffre à bagages, ainsi qu’un porte bagage à la finition chromée. A l’intérieur, la partie conducteur était recouverte de cuir, et la partie passager de tissus. Certains exemplaires recevaient un poste radio longues et moyennes ondes AI-656 fabriqué par l’Usine Ordzhonikidze. L’aération de l’habitacle se faisait par des bouches rotatives.

Dans la seconde moitié des années 30, le moteur de la ZiS-101 était considéré comme l’un des plus modernes. Ce huit cylindres en ligne de 5766cm3 développait 110ch à 3,200tr/min avec des pistons en aluminium, et 90ch à 2,800tr/min avec des pistons en fonte. Le vilebrequin était équilibré par des contrepoids pour amortir les vibrations, les deux carburateurs Marvel (hérités de la Buick) étaient réchauffés par les gaz d’échappement et un thermostat permettait de maintenir le moteur à une température de fonctionnement idéale grâce à des volets dans le système de refroidissement.

Son poids (plus de 3 tonnes) associé à une suspension dépendante à ressorts et des amortisseurs hydrauliques à levier rendait le confort de roulement très doux. Le système de freinage disposait d’un amplificateur de freinage, le terme usité à l’époque pour désigner la pompe à vide. Il était réglé pour que les roues gauches freinent un peu plus que les roues droites. La ZiS-101 pouvait atteindre une vitesse maxi de 115 à 120km/h, en fonction du moteur, et sa consommation était de 26,5 litres aux 100km.

Entre 1937 et 1941 ce ne sont pas moins de 8,752 exemplaires de ZiS-101, toutes versions confondues, qui ont été fabriqués. Initialement elle n’était produite qu’en limousine, mais fin 1937 l’usine a développé deux versions à carrosserie ouverte : une phaeton avec une capote pliable et des fenêtres en celluloïd s’attachant avec des boutons pressions, et un cabriolet avec des vitres en verre. C’est toutefois la phaeton, plus simple, qui fût choisi pour être produite en petite série sous le nom de ZiS-102. Une ZiS-101 ambulance avec un habitacle réaménagé, un luminion distinctif avec une croix rouge posé au dessus du pare-brise a été également produit en petite série. De plus, certaines ZiS-101 ont été utilisées comme taxi et équipés d’un taximètre installé près du montant de pare-brise droit.

En juin 1940, une commission gouvernementale dirigée par l’académicien Chudakov s’est rendu chez ZiS. Elle a souligné en particulier que la ZiS-101 faisait 600 à 700kg de plus que ses homologues étrangères. La modernisation qui s’en est suivie a débouché sur la ZiS-101A. La calandre était nouvelle, le moteur plus puissant, les synchros et les pignons de la première vitesse et la marche arrière simplifiés ou modifiés et l’embrayage était de type mono-disque.

La puissance augmentait grâce à un nouveau carburateur MK3-L2 (de type Stromberg) et un nouveau e collecteur d’admission. La ZiS-101A était livrée uniquement avec un moteur à pistons en aluminium développant 116ch. Des prototypes ZiS-101B avec un coffre à bagages plus grand et un châssis amélioré, ainsi qu’une ZiS-103 avec suspension indépendante à l’avant ont également été réalisés. Mais ils n’ont pas connu de suite en raison du déclenchement de la Seconde Guerre Mondiale. Six cent ZiS-101A avait alors été fabriquées.

Lu sur : https://www.zr.ru/content/articles/122461-zis_imeni_otca_narodov/
Adaptation VG