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J'avais revendu ma Skoda 105L en 1979, et il faudra attendre 1992 pour que je revienne vers une voiture de l'Europe de l'Est. Entre-temps, pas mal de modèles différents s'étaient succédés devant ma porte : Golf I, Jetta I, Opel Rekord 2.3 D, Opel Kadett 1.6D, Audi100 2.4D, Audi 80, Toyota Corolla 1.8D, Toyota Carina II, etc.

La perte de mon emploi en 1992 m'obligea à rendre ma Carina de fonction. Se présenter chez son banquier pour lui annoncer d'une traite que vous venez de perdre votre source de revenus, et que vous avez besoin d'un financement pour une voiture est une expérience assez angoissante. Il fallait donc faire bon marché !

Lada faisant à ce moment-là une remise de 21 % (soit le montant de la TVA) sur toutes ses voitures de stock, l'offre semblait alléchante : une 2105 1.200 pour 150.000 francs belges (+/-3.700 euros), neuve et de surcroit avec 24 mois de garantie… La concurrence était limitée : la famille s'était agrandie de 4 enfants et comportait donc 6 personnes au total. La Fiat Uno était vraiment trop petite, et la Skoda Favorit ne m'inspirait pas trop confiance et était beaucoup plus chère.

Contre l'avis général, nous signèrent donc le bon de commande d'une 2105 bleu foncé qui trônait dans la salle d'exposition de l'importateur. En 8 jours la voiture fut prête, et je rendis à mon ex-employeur sa Carina II de 105cv pour prendre possession d'une 2105 de 62 ch.

Première constatation : les mesures prises dans la salle d'exposition étaient correctes, et nos 4 enfants tenaient sur la banquette arrière. Nous quittâmes les locaux de l'importateur à Diegem (près de Bruxelles) pour rentrer chez nous à Waterloo, de l'autre côté de Bruxelles. La Fiat 124 avait été une excellente voiture, et sa dérivée soviétique était bien née. En rodage, l'autoroute se fit à +/-90 km/h de croisière entre les camions, mais sans trop grosses déconvenues. La direction me paraissait bien lourde en manœuvre, mais redevenait tout à fait praticable dès que la voiture dépassait le 10 à l'heure. Les premiers kilomètres passés, la voiture se révélait nettement plus agréable qu'on aurait pu le craindre.

Relativement silencieuse, elle offrait une position de conduite très typée à l'Italienne (bras tendus et jambes très pliées), une direction dure mais précise et une boite de vitesse (4 vitesses) très correcte à manier (je garde le souvenir ému de la sensation mécanique du levier directement en prise avec la boite). Les sièges auraient gagné à être moins mous sur les longs trajets – je les comparerais aux fauteuils d'une R16 (qui n'est pas spécialement réputée pour son inconfort). Le chauffage était particulièrement efficace.

La fin du rodage et l'arrivée du premier entretien (10.000 km) se passaient sans autre problème que du shimmy dès 100 km/h. J'ai demandé au garage de procéder à l'équilibrage des roues avant, et j'ai eu droit à deux nouveaux pneus en prime et sous garantie (de fabrication soviétique, sans marque). Ces pneus étaient particulièrement résistants, puisque j'ai parcouru 96.000 km avec la voiture sans jamais les changer (avantage de la propulsion : les efforts de braquage et de traction sont répartis sur les deux essieux et d'une gomme très dure je pense).

Pendant 4 ans, cette voiture me servira tous les jours pour mes déplacements professionnels, de plus les week-ends et pendant les vacances elle trimbalait 2 adultes et 4 enfants. Elle a également servi à l'apprentissage de conductrice de mon épouse, et ce la dernière année où je l'ai possédée. Les petits problèmes se sont bien entendu manifestés mais ne furent jamais bien graves : lampes témoins grillées au tableau de bord : enlevez les caches grossiers devant les vis qui retiennent le combiné, dévissez les 4 vis, et glissez des doigts les plus fins possible entre le tableau et le combiné pour remplacer l'ampoule (à baïonnette), je déconseille fortement le démontage du câble du compteur de vitesse pour gagner de l'espace. Un autre problème courant était l'entartrage de la pompe du lave- glace : sur nos voitures modernes, il faut jeter la pompe et en acheter une neuve (chère) – sur la 2105, la pompe pouvait se démonter sur une table (par exemple de cuisine – Madame adore ça) et se nettoyer de fond en comble.

Un jour, le ralenti moteur ne tient plus : je me souviens avoir vu dans le manuel de bord des instructions pour effectuer un réglage de fortune de la carburation : courageusement, j'ai suivi les instructions à la lettre, et, croyez le ou pas, mon ralenti tenait. Bon, une visite au garage s'imposait et ma « réparation » à bien fait rire le garagiste : ma voiture polluait à elle seule plus qu'une usine sidérurgique…

La tenue de route de cette voiture était saine (n'en déplaise aux pseudo journaliste d'aujourd'hui) : bien entendu survireuse à la limite, mais comme la 124, très prévenante : vous sentiez la limite arriver bien à temps pour réagir. Sur sol glissant, la puissance devenait suffisante pour la rendre amusante : j'ai un jour fait (tout à fait volontairement) une triple « toupie » (faire pivoter la voiture autour de l'axe du train avant sur la seule puissance du moteur en première.) Sa tenue sur neige et verglas était surprenante : je me souviens de la vingtaine de km que j'ai fait un Jour de l'An 1993 ou 1994 sur une petite route verglacée pour rentrer de chez mes beaux- parents : beaucoup d'autres voitures bien plus chères que ma 2105 ont fini au fossé.

Deux ans avant que j'achète ma 2105, mes parents avaient acheté une Samara 1.100 que j'eu à plusieurs reprises l'occasion de conduire. Globalement, cette voiture fut pour moi une déception. Je l'ai toujours trouvée moins bonne que ma 2105 (c'était aussi l'avis de mon père) : sur le plan moteur, bien que plus légère (enfin je pense), la Samara 1.100 était très molle par rapport à la 2105 (1.200 je le rappelle), puis la position de conduite et le confort général étaient largement inférieurs, la boite de vitesses moins agréable, et le train avant très très lourd.

Aujourd'hui encore, ma 2105 reste un bon souvenir. Vers 96.000 km d'usage très intensif, elle a commencé à manifester des signes de fatigue (surchauffe moteur au-delà de 95/100 km/h). Plusieurs avis pris mettaient en cause le joint de culasse, voire la culasse elle-même. Je faisais beaucoup de km, et malgré le prix économique de la voiture et de son entretien, il fallait de la bonne volonté pour maintenir la consommation sous les 8,5 l/100km. Skoda venait de mettre sur le marché un certain break Felicia Diesel, et je me suis laissé tenter.

Pour l'anecdote, en 1996, quand j'ai revendu ma 2105, il y avait encore une forte demande dans les républiques de l'ex-URSS, et j'ai revendu ma voiture pour 40.000 francs belges (+/- 1.000 euros) –faites le calcul du prix de revient : 3.700 euros – 1.000 euros = 2.700 euros pour 96.000 km ! Si je suis bien informé, ma voiture est partie en Biélorussie. Si vous passez par là et voyez une 2105 bleu foncé qui parle encore un peu français, faites-lui mon bonjour…

Amicalement,
Alain

Pour les épisodes précédents :
http://www.sovietauto.fr/2004/11/temoignage-mes-voitures-de-l-est-1ere-partie.html
http://www.sovietauto.fr/2004/12/temoignage-mes-voitures-de-l-est-2eme-partie.html
http://www.sovietauto.fr/2004/12/temoignage-mes-voitures-de-l-est-3eme-partie.html
http://www.sovietauto.fr/2005/01/temoignage-mes-voitures-de-l-est-4eme-partie.html

Tag(s) : #Témoignage, #Alaingf, #Cycle