Un trois cylindres deux temps contre un six cylindres boxer ? 70 chevaux contre 204 chevaux ? Oui, mais la Melkus RS 1000 et la Porsche 911 SC ont plus de points communs que vous ne pourriez le penser à première vue. Retour dans les années 1970 avec ces voitures de rêve de l’Est et de l’Ouest.
« So baut man Sportwagen » (que l’on pourrait traduire approximativement par « C'est comme cela que l’on fait des voitures de sport ») est un slogan inventé pour Porsche par Mathias Jahn. C’était en 1992, deux après la réunification allemande. Les chaînes de production de Zuffenhausen produisaient alors les 964, 968 et 928. Il est probable que le jeune employé de la non moins jeune agence de publicité Jung von Matt (puisque fondée en 1991) ne pensait pas un instant aux voitures de sport qui furent fabriquées à l’Est de la république nouvellement réunifiée. Après tout, elles sont rares et presque personne n’a jamais vu en action l’une des 101 Melkus RS 1000 construites entre 1969 et 1979 !
La Porsche est un spectacle familier, du moins en Occident. La 911 a été longue à mûrir, comme la première Melkus fabriquée sur mesure à Dresde sur un châssis de Wartburg. La famille Porsche n’avait commencé à construire ses premières voitures de sport à partir de pièces de Volkswagen que 20 ans plus tôt, tout comme la famille Melkus à Dresde avec des pièces de Wartburg. Et l’entreprise familiale, à la base une école de conduite, fut tout aussi habile pour fabriquer en petite série des voitures de courses que Porsche, deux décennies plus tôt.
Andreas Birkner, propriétaire de cette Melkus et ingénieur moteur dans le département compétition d’un grand constructeur automobile bavarois, connait de nombreuses anecdotes - et pour cause - sur la création de la seule voiture de sport de la RDA. Il a hérité de la voiture de son père, également ingénieur-mécanicien, et qui était un ami de la famille Melkus.
La Melkus n’est pas une voiture faite pour la route mais une voiture de course explique Andreas Birkner. Il l’utilise en conséquence et participe plusieurs fois par an à des rallyes historiques avec sa RS 1000. Le Tripmaster du côté passager et les sangles de harnais au-dessus des sièges baquets étroits s'intègrent bien dans ce cockpit sportif. La Melkus ne mesure que 1,07 mètre de haut, les portes papillon ne s'ouvrent pas si haut que cela et il n’est pas si simple de se glisser dans le cockpit à travers le large seuil.
Avec la Porsche 911, l’exercice est beaucoup plus facile, ne serait-ce que parce les portières s’ouvrent de manière conventionnelle. Et probablement parce la Porsche ne s’adresse pas une clientèle aussi souple grâce au grand angle d’ouverture des portes et des sièges qui ne sont pas trop bas.
1973 marquait une étape importante dans le développement de la 911 avec le modèle dit série G, reconnaissable à ses pare-chocs à soufflet. Il sera produit jusqu’en 1989. La voiture en photo date de 1981, ce qui indique aux connaisseurs que cela doit être une SC avec un moteur de trois litres de 204 ch. En 1983, la Carrera 3.2 est arrivée avec son moteur de 231 ch et elle a été remplacée en 1988 par la 911 type 964 avec 250 ch.
Toutes les générations de 911 ont un point commun : la clé de contact à gauche. Un tour de clé et le moteur boxer de 3 litres bourdonne. Celle-ci se conduit bien, elle est parfaite comme toutes les 911. La cinématique particulière du pédalier non suspendu est familière, tout comme la précision cartilagineuse de la boîte de vitesse. Le bruit caractéristique de son moteur domine le trafic urbain et un vent frais souffle à travers le toit de cette version Targa.
Il n’y a pas un tel luxe dans la Melkus. Le trois cylindres deux temps sent le mélange brulé et la voiture a du mal à évoluer sur le parking au ralenti. Le deux temps a besoin de plus de régime, tout le monde le sait.
Le moteur de Wartburg avec ses trois carburateurs individuels et autant de bobines d’allumage est censé fournir 70 ch. Lorsqu’on démarre on a vraiment l’impression qu’il en fait plus. Il ne cliquette pas comme un moteur deux temps habituel, mais il a de la voix et il est présent comme un vrai moteur de course. On ne voit pas grand-chose à travers les vitres : à droite la glissière de sécurité et à gauche les moyeux de roues du camion de la société de transport de Munich qui l’a transportée.
La voie est libre. Un moqueur dirait que Melkus a pris un moteur de Wartburg, une calandre de Trabant, trois carburateurs MZ, des feux arrière de camions et qu’elle a le diamètre de braquage d’un autobus. Cela a quelque chose de vrai mais pourtant il est difficile d’échapper à son charme. Andreas Birkner ne l'échangerait pour rien au monde. Pas parce que sa RS 1000 est plus chère qu'une 911 SC aujourd'hui mais parce qu'elle montre comment des voitures de sport ont été construites, à l'époque en RDA.
Lu sur : https://www.auto-motor-und-sport.de/reise/melkus-rs-1000-und-porsche-911-sc-sportliche-ost-west-verbindung/
Adaptation VG