
Liaz est connu presque exclusivement pour ses camions. Mais saviez-vous que le constructeur de la Bohême du Nord a également failli fabriquer des voitures électriques ?
Au début de 1992, Liaz s’était associé à Dioss dans un projet de véhicule électrique. La petite entreprise de Klavoty s’est ensuite fait connaître avec son coupé Rebel dessiné par le célèbre designer Vaclav Kral. Le véhicule électrique qu’ils proposaient devait utiliser une carrosserie non conventionnelle comprenant un châssis-cage construit à partir de profilés en aluminium extrudé. C’était un concept similaire à la première Audi A8 présentée deux ans plus tard. Cependant, il y avait un problème d’ignorance et d’inexpérience dans l’utilisation de cette technologie très moderne. Dioss avait donc lancé un appel d’offre pour fabriquer cette carrosserie en aluminium,. Plusieurs entreprises y ont participé, y compris le constructeur de camions de Liberec. Celui-ci, contrairement à d’autres, avait une certaine expérience de la transformation de l’aluminium et c’est pourquoi elle l'a emporté.
Tout le projet reposait sur l’organisation suivante. Alors que Dioss était responsable du développement de la propulsion électrique, Liaz devait s’occuper de la construction de la carrosserie et du châssis-cage. Dans les rôles principaux, le troisième devait être Skoda pour la fourniture des composants du châssis. Le tout était supervisé par la société canadienne Swissmobile Inc qui était le principal commanditaire, et donc le grand financier de l’ensemble du projet.
Dioss a préparé un moteur électrique asynchrone portant le nom de ATR 25-4 avec un onduleur commandé électroniquement et développé initialement par l’Institut de recherche en véhicule électrique de Brno. La puissance maximale était de 19 kW. Des batteries au plomb de 12 kWh étaient initialement prévues et pour plus tard on envisageait des batteries nickel-cadmium de 22 kWh.
En plus d’une variante à 4 portes baptisée « Taxi », une version « Lux » à deux portes était également au programme. Des versions utilitaires « Truck » et « Van » devaient également faire leur apparition. Les concepteurs avaient mis l’accent sur les considérations environnementales et passer d’une version à l’autre devait être relativement simple. L’objectif était également de vendre la voiture sur les marchés mondiaux et donc, comme le demandait le partenaire canadien du projet, de se conformer aux réglementations en vigueur, en particulier dans les pays nord-américains. Pour les USA on avait imaginé un prix aux alentours des 20,000 dollars. Selon certains sources, ce montant était censé être le double du coût de production de la voiture.
Le choix de la carrosserie en aluminium n’était pas accidentel. Les avantages étaient constitué par un faible poids et un recyclage facile. Mais le point dur était le soudage...Personne ne connaissait la méthode de joindre entre eux deux profilés d'aluminium. Liaz, comme d’autres entreprises après 1989, était confronté à la perte d’un certain nombre de ses experts. Avec ce projet, elle était censée les retenir. Malheureusement, le bureau d’étude du constructeur de Liberec était à ce moment-là pris sur d’autres projets et Liaz a donc finalement dû externaliser certains aspect du projet vers des sociétés extérieures. D’autres entreprises ont également été impliquées dans la voiture comme Spanihel Design, UVMV ou VUKV – l’Institut de Recherche sur les véhicules ferroviaires.
On prévoyait d’utiliser une suspension de Skoda Favorit / Forman. La direction à crémaillère devait être achetée auprès de TRW. Ce qui est intéressant est que théoriquement le problème de la boîte de vitesses était résolu puisque un véhicule électrique n’en a pas besoin. Mais Liaz prévoyait une transmission à deux vitesses synchronisées, développée par UVMV. Le changement de vitesse se faisait par le biais d’un système électro-hydraulique sans embrayage. Pour passer la marche arrière, il suffisait d’inverser le sens d’entraînement du moteur électrique, en pressant un bouton au tableau de bord. Cela signifiait donc qu’en théorie (il n’existe aucune information pour le confirmer) la boîte deux vitesses pouvait être utilisée en marche arrière.
La première maquette de la voiture a été achevée au deuxième semestre de 1992. Elle était à l’échelle 1:5. Si c’est Spanihel-Design qui était en charge de cette partie du projet, elle avait était dessinée en coopération avec la société KIJA-Design. Pour assurer le planning, Liaz a acheté début 1993 à la société Alusuisse-Lonza le « savoir-faire » nécessaire à la production de carrosseries en aluminium. La société suisse possédait également la sociétéAuminia à Decin, une entreprise disposant des profilés d’aluminium nécessaire au projet. D’un point de vue financier c’était un partenariat rentable. Liaz avait également pris les devants, car la manière dont la voiture électrique allait être accueillie sur le marché n’était pas claire. Il était donc prévu de pouvoir installer, au cas-où, un moteur hydride ou à combustion interne.
Mais c’est justement l’aspect financier qui a été la cause du fiasco. Le canadien Swissmobile Inc n’a pas été en mesure de respecter ses obligations, principalement envers Dioss, qui en était le partenaire contractuel et donc aussi les autres entreprises impliquées dans le projet. Swissmobile Inc devait, bien-sûr, être le distributeur exclusif de cette voiture électrique aux Etats-Unis, au Canada et en Europe occidentale. Au début la société canadienne s’était même engagée à vendre 5,000 voitures par an, un chiffre supposé avoir été confirmé par les études marketing.
Une maquette à l’échelle 1:1 a été construite en un temps record pour être exposée au Salon de l’Automobile de Francfort. Elle pouvait être vue sur le stand Swissmobile, à côté du coupé Dioss. La réaction du public était plutôt favorable et la maquette était très réaliste.
Finalement Swissmobile a souhaité se désengager du projet. Les entreprises tchèques restantes ont cherché, sans succès, un soutien financier afin de produire dès 1994 quelques prototypes fonctionnels. Bien-sûr cela n’est pas arrivé, peut-être aussi à cause de la récession économique qui touchait déjà le secteur automobile. Le projet a été abandonné…
Aujourd’hui, une voiture comme cette Liaz électrique aurait certainement beaucoup plus de chance d’aller jusqu’au bout, en tous cas, plus que dans la première moitié des années 1990.
Lu sur : https://www.auto.cz/liaz-elektromobil-projekt-01-02-xgj-skoncil-fiaskem-109165
Adaptation VG