On a tous une voiture qui nous tient à cœur. Moi c’est une VAZ-2121 Niva. Une beauté beige de 1981 que mon oncle a achetée neuve, après plusieurs années d’attente douloureuses, pour 10,300 roubles. Cela représentait beaucoup d’argent. A l’époque, une Volga « Vingt-quatre » coûtait 15,000 roubles et on pouvait se payer une « Trechka », une VAZ-2103, pour 7,500 roubles !
Quand, à l’âge de douze ans, je me suis mis à son volant pour la première fois j’ai ressenti une extrême fierté. Jusqu’alors, notre industrie automobile n’avait jamais rien fait de tel, que ce soit en matière de design ou d’usage. J’ai appris à conduire avec et j’ai même provoqué mon premier « accident » : en reculant j’avais renversé une énorme poubelle !
Dans les steppes d’Astrakhan, sur les rives de la Volga où nous allions pêcher, la Niva n’avait pas d’égal pour passer partout. Monter sur un bac depuis la rive escarpée ? Aucun problème. Le dossier du siège pouvait s’incliner jusqu’à la banquette arrière pour former une couchette plus que convenable.
Bien-sûr, la Niva n’a jamais été totalement idéale de par sa conception ou sa qualité de construction. Par exemple, sa banquette arrière était engoncée entre les passages de roues et son coffre ridicule. Nous avons construit une remorque aussi lourde qu’un pont en fer avec une poutre longitudinale centrale servant d’élément porteur (comme sur les camions Tatra !) et de puissants ressorts.
D’origine le moteur était déjà faible... c'est resté ainsi pendant des décennies. Totalement chargée et tractant la remorque, la Niva engloutissait l’essence sans vergogne, car le moteur fonctionnait pratiquement tout le temps à pleine charge. Dans les côtes on passait constamment de la quatrième, à la troisième et à la seconde... Et pour éviter de faire la queue à la pompe (vous vous souvenez des stations-services qui faisaient la pause-déjeuner et avec de méchantes babouchkas au guichet ?), on avait déplacé le pot d’échappement et installé un réservoir de carburant supplémentaire en porte à faux arrière.
Les endroits les plus vulnérables (le tablier avant, les bas de caisse) se couvraient assez rapidement de rouille. Il a fallu apprendre à travailler cela avec de l’acide phosphorique. Les roulements à bille du croisillon de l'arbre de transmission étaient remplacés par joints en teflon recouverts de toile de bâche maintenue par des colliers pour éviter que la saleté ne s’accumule. Et quand, au bout de 20,000 km et en raison de la mauvais qualité du traitement thermique, l’arbre à cames donnait des signes de fatigue, il fallait aller se plaindre auprès de son garage dans l’espoir d’en obtenir un neuf !
La Niva a même perdu son nom du temps de Vladimir Kadannikov. Mais pour moi, elle est comme avant la « vieille Niva ». Tout simplement la Niva. La même, avec son ancien logo, son seuil de coffre haut-placé, ses feux arrière de « Chesterka » (VAZ-2106) et son odeur indescriptible de voiture neuve.
Je voudrais vous raconter quelques histoires sur son créateur. Enfin j’aimerais bien mais à vrai dire, je ne connaissais pas bien Piotr Proussov qui, jeune ingénieur a dirigé le projet VAZ-2121 à partir de 1972. Nous n’étions pas des amis proches et je ne l'ai rencontré qu’à de rares occasions. Il lui a manqué deux semaines pour vivre le 40ème anniversaire de sa Niva. De mon côté, je n’ai pas même pas trouvé de vieilles photographies de la Niva de mon oncle. Il faudrait chercher dans toute la maison. Faute de mieux, j’ai pris pour quelques jours une voiture fraîchement tombée de chaîne. Elle est beaucoup plus moderne, mais sur le fond c’est resté la Niva.
La Niva a fêté ses 40 ans : le premier exemplaire de série a été fabriqué le 5 avril 1977. Je n’ai que des bons souvenirs de la bonne vieille Niva de mon oncle, malgré ses problèmes et ses petits bobos. Il faut la remercier d’être sur le convoyeur depuis tant d’années. Celle de 2017 m’a permis de me rappeler mon enfance quand les arbres étaient plus grands !
Lu sur : https://www.zr.ru/content/articles/906394-moya-niva/
Adaptation VG