En choisissant une voiture à essayer pour un essai rétro, j’avais une bonne raison de porter mon choix sur la VAZ-2105. La première voiture de notre famille avait été un exemplaire de 1982 du cinquième modèle de la gamme Jigouli. C’est aussi à son volant que j’ai appris à conduire tout seul, c'est-à-dire sans être assis les genoux de quelqu’un !
Etant donné que la « Piaterka » a été fabriquée à plus de deux millions d’exemplaires, j’étais loin de m’imaginer que trouver une voiture poserait problème. En fait la plupart de celles encore en circulation ont été produites à notre siècle. La VAZ-2105 a été fabriquée jusqu’en 2010 et c'est la Jigouli dont la durée de vie a été la plus longue. Trouver une « Piaterka » du début des années 80 en bon état, avec le moteur d’origine type 2105, n’a donc pas été tâche facile. Il est de nos jours beaucoup plus simple de trouver d' authentiques Kopeïka, des Dvoïka ou des Trechka (VAZ-2101, 2102 et 2103). J’ai donc eu de la chance en mettant la main sur une VAZ-2105 de 1981.
En voyant cette « Piaterka » beige, mon cœur s’est mis à battre très fort car notre voiture était précisément de cette couleur (et elle presque de la même année). Elle a aussi le même moteur à courroie de distribution. Le bon état de cette Jigoulenka est impressionnant. La peinture d’origine est bien conservée. La carrosserie n’a presque pas de rouille : il n’y a que quelques points çà et là et quelques rayures. L’intérieur est totalement d’origine avec sa rare couleur bleue et ses panneaux de portes encombrants. Même la radio soviétique A-275V qui peut capter les ondes courtes a été conservée. On peut aussi s’étonner de voir encore en place les gicleurs de lave-glace métallique, les bras d’essuie-glaces chromés avec leur inscription « Made in USSR » et les entourages de feux arrière également chromés.
En prenant le volant, j’ai senti l’odeur familière de l’habitacle de la Jigouli de mon enfance. Je me souvenais aussi de la position de conduite particulière : les genoux pliés et les bras tendus. Le moteur n’a pas démarré immédiatement : il a fallu rebrancher les cosses de la batterie. Il s’avère que le plafonnier ne s’éteint plus lorsque l’on ferme la portière et que l’interrupteur qui permet de le couper complètement ne fonctionne pas non plus. C’est un problème courant sur les Jigouli de cet âge.
Après avoir rebranché la batterie, j’ai tiré la manette du starter et j’ai tourné la clé de contact. Le moteur, après s’être « raclé la gorge » a démarré comme s’il était neuf. Même en tenant compte du fait qu’une des soupapes a besoin d’un bon réglage, le moteur VAZ-2105 de 1300 cm3 à courroie de distribution est toujours le plus silencieux de tous les moteurs de la gamme classique. Au fil des années, on a commencé à se détourner de ce moteur, justement à cause de cette courroie dont la fiabilité est médiocre.
Aujourd’hui comparé aux normes actuelles, un moteur de seulement 64 chevaux peut sembler étrange. Pourtant la « Piaterka » est assez vive et accélère en toute confiance. Jusqu’à un certain point puisqu’à haut régime il perd de son enthousiasme. C’est pourquoi il faut souvent jouer du levier de vitesse. Heureusement ce dernier est très agréable à manier et la facilité de passage des rapports de la boîte « classique » est extraordinaire même comparée à des voitures plus modernes.
Bien entendu, il serait naïf de s’attendre à une belle maniabilité de la part d’une voiture née dans les années soixante. L’absence de direction assistée est compensée par le grand diamètre du volant : il est facile à tourner. Mais la précision se dissout dans le boitier de direction à vis sans fin. Il faut donc bien anticiper ses manœuvres.
En revanche, les mauvaises routes n’ont jamais effrayé les Jigouli. La suspension fait face facilement. La garde au sol élevée permet de sortir facilement des parkings enneigés. On peut aussi se permettre des petites dérives du train arrière. Sur la voiture essayée presque tous les éléments du châssis étaient encore d’origine. On peut remercier en cela les ingénieurs de Togliatti.
La suspension de la Fiat 124 donneuse, initialement douce, est devenue très dure sur la Jigouli. Mais cela n’a rien de dépaysant sur une Lada classique. Même l’absence de rétroviseur droit ne dérange pas. Les montants de toit très minces et la grande surface vitrée permettent de surveiller les périmètres la « Piaterka » en toute confiance. Les voitures modernes ne sont capables d'offrir un sentiment similaires qu’au prix de nombreux assistants électroniques.
Bien sûr, conduire en ville une Jigouli est aujourd’hui une chose difficile : les accélérations, la maniabilité et, plus important encore, les freins font partie du passé. Mais c’est bien ce passé qui provoque un sourire nostalgique. Comme je prends régulièrement le volant de Jigouli, de Moskvitch ou de Volga, je ne saurai que la conseiller. Elle vous replongera non seulement dans votre jeunesse mais vous permettra aussi de réviser certaines valeurs automobiles que les réalités actuelles ont aseptisé.
Avec les années qui passent, les représentantes de cette époque se font de plus en plus rares. Mais je suis confiant pour cet exemplaire. Son propriétaire va probablement continuer à faire tout ce qu'il peut pour préserver ce morceau de l’histoire de l’automobile de l’URSS.
Légende des photos :
- Au tableau de bord on trouve le minimum nécessaire pour une voiture du début des années quatre-vingt. Les premières « Piaterka » avaient une instrumentation avec verre anti-éblouissement remplacée avec le temps par du verre plus conventionnel pour réduire les coûts.
- Même après des années, la classique boîte à quatre vitesses ravit encore par la clarté de sa grille.
- Il n’a malheureusement pas été possible d’évaluer le fonctionnement de l’autoradio soviétique A-275V d’origine. Il devrait pouvoir être réparé.
- Par rapport aux précédentes Jigouli, le tableau de bord de la « Piaterka » avait l’air moderne. On peut différencier les voitures des premières années par la serrure située sur le côté gauche du couvercle de la boîte à gants. Elle a ensuite migré au centre.
- Les originaux logos en plastique « 1300 S » sont désormais une rareté et sont même très prisés par des revendeurs de pièces détachés peu scrupuleux.
- Les couvercles chromés des cendriers de portières sont un objet fétiche pour les amateurs de VAZ classiques.
- La plupart des VAZ-2105 fabriquées durant les premières années avaient ces contre-portes moulées.
- Sous le capot de la « Piaterka » tout est organisé de la même manière que sur les autres VAZ classiques. Ce moteur 2105 a juste perdu son cache culbuteur et sa couvercle de courroie de distribution d’origine.
- Même par un froid léger, la serrure de coffre gèle rapidement.
- Une grande partie du coffre est occupée par la roue de secours et le réservoir de carburant. Outre la voiture, le propriétaire actuel a récupéré de nombreux objets intéressants comme ces câbles de démarrage.
- Le couvercle transparent du bloc à fusibles permet de contrôler ceux-ci sans l’enlever. Enfin, en théorie puisqu'au fil du temps, le plastique devient opaque et on ne peut plus rien voir !
- Les buses de lave-glace métalliques sont une vraie rareté.
- Le trait distinctif des voitures des premières années : l’entourage chromé des feux arrière.
- Par son architecture, la VAZ-2105 n’est en rien différente de ses sœurs de la famille « classique ».
- Les « Piaterka » des premières années de production (comme les VAZ-2014 et VAZ-2107) avaient leurs propres jantes embouties de 13 pouces au dessin original. Plus tard elles ont été remplacées par des roues reprises de la VAZ-2106.
- En 1976, le premier prototype de la VAZ-2105 était très proche stylistiquement de la Kopeïka.
- Le tableau de bord du modèle de pré-série en 1978. Lors du lancement de la production en série, seule sa couleur a changé.
Lu sur : https://www.zr.ru/content/articles/904971-vaz-2105-popytka-nomer-pyat/
Adaptation VG