Les Russes sont un peuple extraordinaire ! Toujours en train de critiquer leur industrie automobile et pourtant, à la moindre compétition ou manifestation automobile, on croise toujours des Volga ou des Jigoulis qui rencontrent beaucoup plus d’encouragements et d’applaudissements que les bolides des constructeurs étrangers !
Cela n’a rien d’étonnant. Après tout, construire une voiture de sport compétitive sur la base d’une voiture russe est beaucoup plus compliqué que de le faire sur une base étrangère, beaucoup plus fiable et intrinsèquement plus moderne. Et si cette voiture russe arrive à rivaliser avec celles-ci, alors son propriétaire et les gens qui l’ont construite s’attirent le respect. C’est le cas de cette « Semerka » de drift réalisée par Clubturbo, une équipe originaire de Samara. Et si la voiture semble empreinte de nostalgie à l’extérieur, il ne faut pas s’y tromper, elle est une arme redoutable.
Extérieurement, c'est sans doute la plus belle Jigouli engagée dans les compétitions de drift russes. Aucune sauvagerie, pas de kit carrosserie absurde... rien que du classique : des ailes larges, un becquet en « queue de canard » et de belles jantes. Pas besoin de plus. Tout est réalisé soigneusement et un vinyle dessiné par CIAY complète le tableau. Il faut noter que la carrosserie reste entièrement d’origine : pas de fenêtres ou d’ailes en plastique. Tout est dans le même métal qu’à la sortie d’usine. Le seul élément allégé est le capot en matière plastique. A l’intérieur aussi, il n'y a rien de superflu : un arceau de sécurité, l’instrumentation nécessaire, un volant sport et des sièges baquets. Là aussi tout est réalisé avec soin .
C’est côté technique que cela se gâte car les décisions qui ont été prises sont beaucoup plus inhabituelles. Premièrement, il suffit de se tenir à côté de la voiture pour remarquer une étrange odeur à l’échappement. L’odeur typique d'une voiture à essence est absente... Oui ! Cela sent le gaz et ce n’est pas une erreur ! Cette voiture de drift roule au gaz et arrive à se mesurer à des voitures japonaises aux moteurs modifiés ! Bon c’est vrai que le moteur est turbocompressé mais je vous laisse imaginer la surprise de ceux qui osent jeter un œil sous le capot et découvrent un moteur... Lada ! Ceux qui ont construit cette voiture n’ont pas cédé à la tendance habituelle de remplacer le moteur d'origine par un bloc Nissan.
Bien entendu, ce moteur est soigneusement modifié pour résister à l’augmentation de puissance. Ce bloc VAZ-21126 dispose de bielles en H de 121 mm de long. Elles viennent de Chine et sont réalisées spécialement sur commande. Les pistons sont forgés et le taux de compression est de 10,2:1. Pour faciliter la respiration du moteur, la culasse est modifiée avec des soupapes plus grandes et un arbre à came à phases plus longues. L’admission se fait à travers un collecteur de Toyota Levin. L’échappement est fait maison. Le turbocompresseur TD05 n’est pas très grand mais il souffle fort : de 1,5 à 1,6 bars au gaz et 0,9 bar à l’essence. Le tout est piloté par un calculateur Ianvar 5.1. Une pompe à huile plus efficace et un carter de plus grand volume permettent de lubrifier sans problème le moteur. La boîte de vitesses est prélevée sur une BMW.
La question que l’on peut tout de même se poser c'est pourquoi la voiture marche au gaz ? « En fait c’est simple. Le gaz ne coûte pas cher. Dès que nous avons eu cette idée, tous les collaborateurs de Clubturbo sont passés de l’essence au gaz. Car si l’essence coûte de 36 à 38 roubles au litre, sans même parler de carburant compétition, le gaz ne vaut que 17 roubles ! » explique Leonid Pereliguine, le directeur de Clubturbo.
De plus pour utiliser un carburant compétition il faut aussi des injecteurs optimisés, un réservoir répondant aux exigences des commissaires techniques, une pompe à carburant spécifique, etc... Tout cela coûte beaucoup d’argent. Le réservoir de gaz peut être, lui, installé soit dans le coffre, soit dans l’habitacle. Il répond à toutes les exigences des règlements techniques. Certes, la puissance du moteur est réduite avec le gaz mais pas suffisamment pour avoir un impact sur le drift. En outre, le gaz permet d’augmenter la pression de suralimentation ce qui compense les pertes initiales.
Et pourquoi être resté aussi sur un moteur Lada ? La réponse pourra sembler banale mais c’est simplement parce que les modifications apportées sont abordables pour pratiquement tout le monde. Et comme chez Clubturbo, on produit et vend des pièces tuning en semaine, les choix effectués pour cette Lada de drift devenaient évident. Il fallait imaginer des solutions éprouvées qui pourraient ensuite être utiles à des clients.
« Nous sommes spécialisés dans la fabrication et la vente de pièces de tuning pour les Lada. Nous fabriquons nous-mêmes ces pièces ou nous les faisons réaliser en Chine pour les vendre ensuite sous notre propre marque « Clubturbo ». Cette marque est déposée dans la Fédération de Russie. C’est pour cela aussi que notre voiture de drift est précisément une Lada ».
Mais pour le drift, la suspension a autant d’importance que le moteur. Même le moteur le plus affuté et le plus puissant ne servirait à rien sans une suspension aux petits oignons. Une attention particulière a donc été portée à cette partie de la voiture. Toute les parties roulantes ont été refaites en partant de zéro. La crémaillère de direction provient d’une VW et est accouplée à une direction assistée de Lada Priora. L’essieu avant reprend des pièces de la société européenne Wisefab qui permettent un énorme angle de braquage et la maniabilité nécessaires au drift. A l’arrière, le pont a été remplacé par un berceau arrière de BMW, une solution assez fréquente chez les propriétaires de Jigoulis. A l’avant et à l’arrière on ne trouve que des rotules uniball à la place des silentblocs habituels.
Durant cette saison, la voiture a été constamment améliorée et modifiée. L’équipe était à la recherche constante des réglages optimaux. En 2016, la voiture sera encore plus redoutable. On prévoit de remplacer l’essieu BMW par un essieu fait maison avec des pièces Wisefab. Cela devrait permettre d’avoir une voiture plus rapide. On prévoit aussi de monter un moteur de plus forte cylindrée mais fonctionnant toujours au gaz.
Les gars de Clubturbo ont bien l’intention de continuer à s’engager sur les épreuves de drift avec leur VAZ-2107. Souhaitons leur beaucoup de succès !
Lu sur : http://www.kolesa.ru/article/tjuning-vaz2107-dvigatel-vaz-toplivo-gaz-naznachenie-drift-2015-09-24
Adaptation VG