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Moskvitch-423N : le repos est un droit !

Une tente, un sac à dos et un réchaud... Rajoutez à cela une voiture et vous pourrez revivre les débuts du camping en URSS. Imaginez... Les haut-parleurs « Spidole » (ceux qui parlent lettons insisteront bien sur la première syllabe !) constituaient la dernière innovation de l’industrie soviétique et de cette société de Riga en particulier. Ils restituaient avec fidélité la voix rauque du baryton Mark Bernes ou celle - cristalline - de Maya Kristalinskaya. Le vent soufflait dans les arbres et, à peine sortis de la rivière, on se jetait dans un transat – le summum du confort en matière de camping. Si l’on pouvait profiter des bienfaits de la nature, c’est parce qu’on était venu ici à bord d’une voiture, peu bourgeoise mais mignonne : une Moskvitch.

Dans les années 1950-60, en matière d’automobile soviétique le mot « première » est souvent lié à une production de l’Usine Moscovite de Petite Cylindrée (MZMA). Ainsi le premier break est né dans cette usine mais au début, il est vrai, la sauce ne prend pas. La Moskvitch 400-421 avec sa carrosserie partiellement en bois n’a jamais été produite en grande série. Il a été décidé que le peuple soviétique se contenterait d’une version fourgonnette et que les quelques personnes privées qui auraient l’autorisation de s’acheter une voiture particulière se réjouiraient de la berline.

Pourtant en 1957, un an après le début de la production de la Moskvitch-402, est lancé le break 5 portes à carrosserie tout-acier Moskvitch-423. Son apparence, tout comme ce nom de break (« Universal » en russe) sont tout à fait inhabituels pour l’automobiliste soviétique. D’ailleurs, c’est bien ce qui est écrit sur la plaque constructeur de la Moskvitch-423 de 1961 qui illustre cet article : « Moskvitch »-universal.

Pour la première fois en URSS, le confort d’une voiture particulière est combiné avec une capacité de chargement impressionnante (pour une voiture de cette catégorie bien sûr). En outre, contrairement à la Volga GAZ-22 apparue plus tard qui se retrouva rarement chez des propriétaires privés, cette Moskvitch était utilisée non seulement par les institutions gouvernementales et faisaient aussi le bonheur de familles ordinaires.

La possession d’une voiture particulière à titre particulier n’était déjà plus un miracle en URSS. Le temps était aux loisirs. Le peuple soviétique se jetait sur les livres, allait au cinéma, visitait des expositions impressionnantes et avait envie de découvrir du pays, y compris en voiture. Après tout, le peuple soviétique avait non seulement le droit au travail mais aussi le droit au repos ! Les plus chanceux partaient en Crimée, dans le Caucase ou dans les Pays Baltes. Les autres quittaient les villes pour ramasser des champignons ou des baies sauvages, ou pour aller à la pêche. Quelle était la voiture la mieux adaptée à cela, si ce n’est la Moskvitch break ?

Gaz, chauffage central, eau courante et eau chaude (quand il y en a). A partir de 1960, la mode est à ces immeubles de cinq étages disgracieux et pas très spacieux. Mais les appartements sont bien agencés et surtout ils sont individuels (après les kommunalkis...). Beaucoup de citoyens ont même des réfrigérateurs et des téléviseurs. Ne riez pas, ils s’agit de progrès importants dans la vie quotidienne des Soviétiques.

Au début des années 60, cette Moskvitch est ce qui se fait de mieux en matière de solidité et de confort. Pour tout dire, à la campagne on en croisait encore il y a quinze ans ! Même si c’est une voiture rare, elle y servait encore de bête de somme. Il y a un demi-siècle elle correspondait non seulement aux besoins d’un soviétique modeste mais aussi à ceux des occidentaux. C’est pourquoi la Moskvitch était un bon achat dans les pays socialistes et les pays capitalistes (principalement les pays scandinaves). Son moteur à soupape en tête de 45 ch et sa boîte à 4 vitesses étaient tout à fait modernes. Sa suspension avant était indépendante avec des amortisseurs télescopiques. Son chauffage et sa radio étaient efficaces. Et quoi d’autre ?

Souvent on mettaient des housses sur les sièges avec des vides poches pour compenser le manque de petits rangements dans l’habitacle. On installait aussi une galerie de toit pour augmenter le volume transporté et les « touristes » purs et durs installaient même un transformateur 220 volts !

Les grandes roues avec pneus tubeless (apparus pour la première fois en URSS sur la Moskvitch-407) associées à la suspension assez souple (à l’arrière les ressorts étaient plus durs que sur la berline) offraient un bon confort même sur les chemins de terre. Comme les autres Moskvitch, en conduite rapide, la direction se s’allégeait pas inconsidérément. Cette remarque fera peut-être rire ceux qui ont piloté les Moskvitch dans les années 60 mais, après tout, ce qui importait le plus aux « touristes » c’étaient ses capacités en tout-chemin et sa capacité de chargement. Et la 423 était parfaite pour cela ! La garde au sol minimale était de 190 mm (avec 200 mm sous le pont arrière). Sortir cette voiture de 1030 kg de la boue et de la neige n’était pas difficile. Par rapport aux normes actuelles, le rayon de braquage était beaucoup trop grand – 6 mètres, mais il n’était pas pire que celui des autres modèles de la marque.

C’est donc en ville, dans les petites rues, que le break 423, était le moins à l’aise. Mais sa charge utile était décente : ses papiers indiquent qu’elle peut emmener 250 kg de bagages. Un quintal avec 4 passagers. Ce chiffre aussi est intéressant mais, pour être honnête, ces breaks ont souvent transporté beaucoup plus. Qu’elles appartiennent à des « touristes » ou à ceux qui avaient un potager à la datcha, les ressorts de suspension ont bien souffert...

Cette voiture était facile à entretenir, seul ou avec un ami mécanicien. En Union Soviétique, les garages « privés » étaient quelque chose d’exotique. Mais celles qui sont tombées entre des mains habiles ont pu connaître plusieurs générations et survivre jusqu’à nos jours, comme le break blanc de cet article. A vraie dire, peu de 423 ont survécu... Moins produites que les berlines standards, elles ont été exploitées dans des conditions difficiles.

Les breaks non restaurés et dans un état comme celui-ci sont de vraies raretés. Son moteur tourne comme un horloge sans bruit parasite. Les vitesses passent bien même s’il faut s’habituer. La transmission est bruyante, mais c’est tout à fait normal. Le moteur de 45 ch est parfaitement suffisant, comme les freins, et l’habitacle est étonnamment confortable et peut accueillir la tente, les sacs à dos et tout le matériel nécessaire pour faire du camping. Franchement, même cinquante ans après sa sortie, on aurait bien envie de prendre la direction de la mer à son volant !

Basée sur la Moskvitch-402, la Moskvitch-423 a été produite à 1525 exemplaires entre 1957 et 1958 avec un moteur 1,2 litre de 35 ch et une boîte trois vitesses. A partir de 1958 est fabriqué le modèle 423N basé sur la Moskvitch-407. Il dispose d’un moteur 1,4 litre de 45 ch et reçoit à partir de décembre 1959 une boîte quatre vitesses. Entre 1963 et 1965, le break se base sur la Moskvitch-403. Il reçoit le nom de Moskvitch-424. Toutes ont été complétées par une version export et entre 1958 et 1961 une version à quatre roues motrices, la Moskvitch-411, produite à 1515 exemplaires. Au total, entre 1958 et 1964, 29,562 breaks 423N et 424 ont été produits.

Lu sur : lien obsolète
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #Moskvitch, #423N