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La mort d'une étoile...

En 1990, la Moskvitch-2141 est à l'apogée de sa popularité : on s’inscrit sur des listes d’attente pour pouvoir acheter la dernière Moskvitch, une traction avant à hayon, prestigieuse et à la mode. Cette année-là, un homme qui se trouve également au sommet de la gloire est également l’heureux propriétaire d’une 2141. Il s’agit de Victor Tsoï, le fondateur et leader du groupe de rock « Kino ».

C’est au début des années 90 que l’on commence à vraiment voir la Moskvitch-2141 dans la rue. C’est un modèle qui a mis des années pour entrer en production alors que la firme moscovite travaillait dessus depuis la fin des années 70. Le premier exemplaire de pré-série est fabriqué le 15 février 1986 et la production en série débute encore plus tard, le 9 juillet 1988. Les premiers modèles ne brillent d’ailleurs pas pour leur qualité : les habillages intérieurs mêlent différentes teintes (noir, gris, brun et même jaune) et la carrosserie est très sensible à la corrosion.

Pratiquement dès son lancement, ce modèle reçoit des surnoms évocateurs comme « Voiture à l’évidence dépourvue de qualité » (jeu de mot en russe formé sur l’abréviation AZLK – Avtomobil Zavedomo Licheniï Katchestva) ou « l’infirme » (« Kaleta » en russe, faisant écho à son nom à l’importation « Aleko »)... Pourtant, initialement ce projet ne manquait pas d’intérêt. Les ingénieurs moscovites s'étaient largement inspirés de la Simca 1308 française (la « Voiture de l’Année 1976 ») et de l’Audi 100 allemande, une voiture devenue culte dans le pays à la chute de l'URSS. Cela en faisait une voiture française à l’extérieur et allemande à l’intérieur et qui se distinguait par sa conception originale : le moteur était placé longitudinalement (une partie des voitures étaient équipées d’un moteur VAZ-2106, les autres d’un moteur UZAM), d’une suspension McPherson à l’avant et son habitacle était conçu pour être le plus vaste possible.

Les versions luxueuses étaient équipées d’un poste radio « Bilina » et si on avait de bonnes connaissances on pouvait avoir un radio-cassette dont les haut-parleurs pourraient jouer le tubes des groupes soviétiques à la mode comme « Kino ».

D'ailleurs, la Moskvitch-2141 est la première voiture de Victor Tsoï. Le producteur Yossif Prigozhine se souvient : « A cette époque, la Moskvitch a connu un vrai boom. C’était une voiture à la mode et il était très difficile de s’en acheter une. Mais avec Iouri Aïzenchpis (le producteur de « Kino »), nous avons trouvé un accord avec l’usine et nous avons pu aller chercher une voiture. Nous avons choisi une voiture de couleur « asphalte mouillé » que nous avons payé 32,500 roubles. Plus tard il s’est avéré que nous avions payé 2,500 roubles de trop. Nous étions horrifiés ».

Quelle était la couleur de la voiture de Victor Tsoï ? C’est une question qui divise encore aujourd’hui. Certains fans de « Kino », comme Yossif Prigozhine, soutiennent que cette Moskvitch était de couleur « asphalte mouillé ». D’autres fans, ainsi que certains journalistes, affirment que la berline était gris clair, voir même blanc neige... Toutefois, des documents officiels l’indiquent clairement : l’idole de millions de personnes roulait dans une voiture de couleur bleu foncé !

Une voiture qu'il a conduite peu de temps... Il a acheté cette 2141 au printemps 1990 et a effectué son dernier voyage à son volant seulement quelques mois plus tard, en août de la même année. Au compteur, elle n’affichait que 3400 kilomètres !

La tragédie s’est produite par une après-midi ensoleillée du mois d’août. Comme l’indique le rapport de police photographié par un fan du chanteur : « Le conducteur , Victor Tsoï, a perdu le contrôle de la Moskvitch-2141 bleu foncé, immatriculée « Ia 68-32 MN », au 35ème kilomètre de la route Sloka-Tulsa et terminé sur la voie opposée où il a parcouru 250 mètres. Sa voiture a heurté le parapet du pont traversant la rivière Teïtope et a été projetée sur un bus Ikarus 250 (immatriculé 05-18 VRN et conduit par Janis Fibiks) de la compagnie de transport n°29 de Tukums, arrivant en sens inverse. Horaire de la collision : 11 heures 28 minutes. Météo : 28°C. Temps : clair ».

Le chanteur de « Kino » se trouvait à quelques dizaines de kilomètres de Riga comme à sa longue habitude consistant à se rendre l’été dans les Etats Baltes. Victor Tsoï aimait traverser à un rythme tranquille les villages lettons. C’était une pause dans l’agitation effrénée de la capitale. « Nous venions habituellement pour trois mois, de juin à septembre. Comment nous reposions-nous ? En allant en famille en forêt pour chercher des champignons. En jouant au badminton. En faisant de la planche à roulettes. Il allait aussi souvent à la pêche - se souvient l’ami chez lequel il s’arrêtait. Il ne ramenait pas beaucoup de poisson. Ce n’était pas un pêcheur. Il pêchait pour le plaisir de taquiner le poisson. Il répétait tout le temps qu’il ne pourrait jamais aussi bien se reposer dans le bruit de Moscou ».

Ainsi, au petit matin du 15 août, Victor Tsoï s’était rendu au bord du lac le plus proche. C’est sur le chemin du retour qu’a eu lieu le terrible accident qui a couté la vie du musicien. Immédiatement, les rumeurs d’un complot du KGB ou de sorcellerie ont couru. Mais les experts et les témoins sont unanimes : Victor Tsoï s’est endormi au volant ou a connu un moment de distraction. Et la vitesse était trop élevée... La version selon laquelle le fondateur du groupe « Kino » se serait détendu à la pêche en buvant de l’alcool n’a pas été confirmée : il n’y avait pas de trace d’alcool dans le sang de la victime. Ce que confirme son ami : « Il ne buvait presque pas. Un ou deux verres dans la soirée ». Ses amis musiciens confirment : « Il n’était ni accroc à l’alcool, ni à d'autres types de stimulants ».

Ce qui poussait Victor Tsoï, c’était la musique : « Il pouvait composer une chanson n’importe où, indique son père. Qui sait ? Peut-être qu’il a pensé à quelque chose à ce moment-là et a oublié le virage ? Peut-être qu’il a cherché un stylo et du papier pour écrire une rime à succès ? ». Sa femme, Mariana fait la même hypothèse : « Tsoï, ne pouvait pas s’endormir au volant... ».

C’est peut-être bien la musique qui a distrait le chanteur du groupe « Kino ». Une version indique que le musicien roulait en écoutant sur cassettes les maquettes de ses futures chansons. C’était aussi le cas ce jour-là. Un enregistrement brut qui deviendra plus tard le fameux « Album Noir ». Victor Tsoï y chante : « Prends soin de toi. Sois prudent ». Un conseil qu’il n’aura pas suivi. Selon la version officielle, « Victor Tsoï s’est endormi au volant, sans doute par excès de travail ».

Le 21 juin dernier, le chanteur de « Kino » aurait fêté ses 50 ans.

Lu sur : http://auto.mail.ru/article.html?id=37477
Adaptation VG

Tag(s) : #Personnalités, #URSS, #Moskvitch, #Aleko, #2141