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"Ecologie" chez AvtoVAZ : à quoi faut-il s'attendre ?

Une Priora électrique ou des modèles hybrides chez Lada : de la fiction ? Non. En Russie, une grande partie du parc automobile est constituée de vieilles carcasses peu écologiques et c'est pourquoi les têtes pensantes du secteur automobile réfléchissent à des techniques plus modernes. Le site 3dnews.ru a pu approcher les derniers travaux prometteurs d'AvtoVAZ en la matière.

En septembre, au centre de développement technique d'AvtoVAZ, s'est tenue une conférence intitulée « Perspectives de développement dans l'industrie automobile : le développement des énergies alternatives ». Elle a en outre permis au constructeur russe de présenter certains de ses travaux dans ce domaine. A leur vue, on est en droit de se poser la question suivante : est-ce que Togliatti est en retard ou à la pointe du progrès ?

Evgueni Tchmelev, le vice président d'AvtoVAZ pour le développement technique a ouvert la conférence. Son discours était orienté par un thème volontairement provocateur : "Transport écologique en Russie. A quoi bon ?". Il a illustré cette question par les résultats étonnants d'un sondage organisé par Appleton Mayer auprès de 300,000 personnes : en Russie, le consommateur ne ressent pas le besoin d'avoir un mode de transport respectueux de l'environnement. Moins de 1% ont répondu être "Pour", et 82% sont "Contre". A titre de comparaison, dans des villes comme Tokyo, Shanghai ou Séoul, 30 pour cent, 26 et 24 sont "Pour". Moscou est la dernière place de dix grandes capitales mondiales. Selon Tchmelev, les raisons de ce rejet sont les prix élevés (la première voiture électrique disponible en Russie est la Mitsubishi I-Miev, elle coûte cinq Priora) mais aussi les imperfections de fonctionnement (...).

En Russie, le parc automobile vieillit rapidement : lors du lancement du programme du programme de prime à la casse en 2007, le pourcentage de voiture de plus de dix était de 45%. Ce chiffre est passé cette année à 78%. Cinquante pour cent de ces voitures représentent, à elles seules, jusqu'à 80% de toutes les rejets polluants. Cela signifie que la situation écologique se dégrade. C'est pourquoi selon Tchmelev, la priorité est au remplacement du parc actuel par des véhicules à la norme Euro-4. Les chiffres sont impressionnants : si on ne veut plus utiliser en 2020 de voitures produites avant 2007 (c'est-à-dire à la norme Euro-3), il faudra d'ici là en remplacer 3,2 millions chaque année ! Actuellement les voitures de plus de 14 ans représente 54% du parc automobile russe... Leur simple remplacement par des voitures neuves résoudrait à lui seul les problèmes environnementaux de la Russie.

Tchmelev ne rejette pas la voiture électrique en tant que telle, mais il considère que pour VAZ elle n'est pas actualité et il propose de continuer à améliorer les voitures classiques. Dans la salle de conférence, qui réunissait de francs partisans de l'électricité, ce discours pouvait sembler courageux. Mais, ne nous y trompons pas. AvtoVAZ n'a pas tourné le dos aux énergies alternatives et a pu montrer son savoir-faire.

Si vous connaissez l'histoire de VAZ, vous savez que cette marque a toujours développé très activement des véhicules électriques (pour être plus précis cela a commencé en 1975). Ces travaux étaient soutenus par le premier directeur de VAZ, Victor Poliakov, et le responsable du bureau d'étude, Vladimir Verchigora. Un département spécialisé a construit de nombreux prototypes de voitures électriques, certains même très modernes pour l'époque. A l'aube des années 80, VAZ avait déjà produit une cinquantaine de camionnettes électriques basées sur le break VAZ-2102 et les testaient à Togliatti et dans d'autres villes. En 1979, Georguiï Mirzoev devient le chef du bureau d'étude. Il va donner une nouvelle impulsion à ces travaux concrétisés par la famille de voitures électriques "Pony" (un véhicule de loisir et trois camions différents). On ensuite été construits des voitures électriques sur base Oka (qui ont même remporté des prix dans des compétitions internationales), des voitures de golf, des véhicules spéciaux ainsi que les concept-cars Gnom et Elf.

L'histoire des véhicules électriques est donc riche chez Lada. Mais il existe une période de vide significatif : entre la fin des années 90 jusqu'à maintenant l'heure n'était pas aux expérimentations. Mais les pères-fondateurs de la voiture électrique chez VAZ, Georguiï Mirzoev et Sergueï Ivlev étaient toujours là. C'est sous leur autorité qu'a commencé une nouvelle étape au meilleur niveau mondial,

Deux Kalina électriques ont été construites l'année dernière. Elles viennent seulement d'être montrées au public. Cette Kalina électrique a reçu le joli nom de ELLada. Elle porte le type VAZ-1817. A première vue, cette voiture n'est pas pire que ses homologues d'occident : l'autonomie annoncée sur une seule charge est de 160km, le poids en ordre de marche de 1300kg et les batteries peuvent subir 3000 cycles de charge (soit environ 5 ans).

La ELLada est basée sur des éléments mécaniques et électriques déjà existants (à la différence des précédents prototypes VAZ où les moteurs, les batteries et toute l'électronique avaient été conçus et réalisés en interne ou par des sous-traitants locaux). Le coeur de ce véhicule électrique est constitué par les batteries Thunder Sky lithium fer phosphate réalisées en Chine. La tension totale est de 256 volts. Une charge complète prend 8,5 heures. La batterie se compose de 80 éléments, chacun étant géré de manière indépendante. Le moteur asynchrone triphasé, à courant alternatif, développe une puissance nominale de 30 kW (avec un maximum de 60 kW). Le moteur et le contrôleur de gestion sont d'origine suisse. Selon les représentants d'AvtoVAZ, "il n'est pas nécessaire" de communiquer le nom de la société qui les fournit (vraisemblablement parce qu'on risquerait de trouver également des étiquettes "Made in China" dessus). L'ensemble des équipements électriques font un poids de 240 kg et comparé à une Kalina normale, la ELLada ne fait que 120 kg de plus. D'ailleurs, elle n'a pas vraiment de transmission puisqu'elle n'a pas de boîte de vitesse. Il ne reste que le réducteur et le différentiel car le couple est suffisant à n'importe quelle vitesse.

La ELLada existe en deux exemplaires. Un pour les démonstrations, l'autre pour les essais. Cette dernière est déjà passée en chambre électromagnétique, a subit les tests de bruit, de freinage, de tenue de route et d'autonomie en cycle mixte. Le chauffage (électrique d'ailleurs) a également été testé. Vladimir Paltchevski, l'un des concepteurs de la ELLada, indique que le moteur électrique et toute l'électronique ont coûté à l'usine environ 30,000 dollars (on dit qu'on aurait pu acheter tout cela pour $12,000 en traitant directement avec le fabriquant sans passer par des intermédiaires). Et il faut rajouter environ 10,000 dollars pour les batteries ! D'un point de vue économique la ELLada coûterait au minimum 25,000 dollars. Ceci n'inclut pas les investissements nécessaires à sa production. Cela signifie que le prix de vente de la voiture ne pourrait pas descendre en dessous de 33,000 à 34,000 dollars.

C'est pourquoi Tchmelev a déclaré lors d'une courte conférence de presse qu'AvtoVAZ n'envisage pas la production de voitures électriques et qu'il s'agit juste de travaux de recherche pour "rester dans le coup". Le responsable du bureau d'étude, Sergueï Kourdiouk, voit les choses de manière un peu plus optimiste et n'exclut pas que la ELLada soit produite en petite série sur commande. Mais il ne faut pas se leurrer. Pour atteindre les volumes annuels de Renault et Nissan de centaines de milliers d'exemplaires, cela prendrait une éternité pour VAZ.

VAZ n'a pas cette éternité devant lui. Et contrairement à ce qu'affirme Tchmelev, Togliatti est condamné à travailler sur ce thème de plus en plus sérieusement dans les années à venir. C'est une tendance mondiale, que cela plaise ou non aux actionnaires de VAZ. Acheter tout l'appareillage électrique est rapide et facile... mais le constructeur est alors tenu en otage par un ou des fournisseurs étrangers, qui ne sont pas des partenaires, mais uniquement des vendeurs. C'est pourquoi pour réduire considérablement le prix d'un véhicule électrique et se protéger des caprices d'un "camarade" chinois il n'y a qu'un seul moyen : mettre en place la production de ces éléments dans une usine locale. Cela n'a rien d'irréaliste : à Novossibirsk une usine de batteries lithium-ion est en train de sortir de terre, et on construit aussi des moteurs électriques et des composants électroniques. C'est comme cela qu'avait déjà agi VAZ, il y a 20 ou 30 ans, lorsqu'il se trouvait au-delà du rideau de fer, et a pu réussir à fabriquer ses propres voitures électriques. Les conditions ont changé. Cela signifie qu'aujourd'hui c'est encore plus facile.

Mais tout cela demande du temps et beaucoup d'argent. C'est pourquoi un autre projet, plus rapide à mettre en œuvre, est nettement plus réaliste. Il s'agit d'une voiture hybride, créé au NIIAE dans le cadre d'un programme d'investissements publics, supervisé par le Ministère de l'Industrie. La voiture hybride du NIIAE est également basé sur une Kalina, mais elle est moins chère, plus simple et créée entièrement avec des composants fabriqués en Russie.

Il y a plusieurs types de véhicules hybrides : on désigne même par ce terme des voitures équipées d'une simple fonction "Stop & Go". La voiture du NIIAE est un hybride intermédiaire qui combine la fonction "Stop & Go", un moteur électrique monté entre le moteur et la boîte de vitesse, une batterie 36 volts et trois supercondensateurs pour la récupération d'énergie. Selon le cahier des charges, le coût de ces différents équipements ne doit pas dépasser les 40,000 roubles. Par conséquent le NIIAE a été contraint d'utiliser les solutions les plus simples et les moins coûteuses. Le moteur électrique est donc relativement simple et ne coûte que 8,000 roubles. Ce moteur développe 10 kW et en tant que générateur il restitue 6,5 kW. Il pèse 30 kg. Il faut lui ajouter les 3 batteries au plomb (48 kg) et le calculateur de 4 kg. Toute la partie électrique pèse moins de 100kg. C'est peu comparé par exemple à la ELLada.

Ce mode "Stop & Go" permet d'économiser 8% à 9% de carburant et de réduire les émissions polluantes. Le démarrage du moteur est 3 à 4 fois plus rapide en raison du couple et de la forte puissance du moteur électrique. Malheureusement les ingénieurs du NIIAE sont encore loin d'avoir terminé leurs travaux et il leur faudra encore au moins deux ans pour en faire un véhicule commercialisable. Si l'on ajoute le délai d'industrialisation chez AvtoVAZ et la recherche de fournisseurs, cela devrait faire 3 à 4 ans. Une éternité. Mais on dit déjà chez AvtoVAZ qu'en 2015, 5% de la production sera constitué de voitures hybrides. Quel modèle cela pourrait-il bien être, si ce n'est celui du NIIAE ?

On évoque un système "Stop & Go" fourni par l'allemand Bosch. Il a déjà été testé sur la Priora et il fonctionne parfaitement. Le prix des voitures n'augmenterait que de 200 à 300 dollars. Cela pourrait donc être le premier pas de l'hybridation à Togliatti et ce dès l'an prochain sur la Priora, en même temps que le multiplexage et l'ABS de neuvième génération. Ces deux derniers équipements feront également leur apparition sur la Granta.

AvtoVAZ ne mène en revanche aucune recherche sur le vrai véhicule hybride, couplant moteur thermique et électrique. Trop cher. De même, les travaux sur l'hydrogène ont également été abandonnés car ses perspectives ne sont pas assez claires. Par le passé AvtoVAZ était à la pointe de la recherche en matières de véhicules électriques. Aujourd'hui, l'entreprise est contrainte de repartir de zéro, en regardant les autres et en les copiant. Mais cela sera plus rentable qu'en faisant tout soi-même et ce pour un résultat inconnu. AvtoVAZ n'a donc pas d'autre choix. La seule exception à cette règle pourrait être l'hybride développée par le NIIAE. Les temps ont changé et AvtoVAZ est définitivement passé à l'arrière garde de l'industrie automobile mondiale et s'oriente de plus en plus vers la mission de simple usine d'assemblage.

Lu sur : http://www.3dnews.ru/auto/617926
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #VAZ, #Lada, #ELLada, #Electro