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Niva Hawk V6 : museau long au pays des kangourous.

Non content de ses victoires de classe dans le championnat australien, l’équipe officielle de l’importateur Lada décida dans les années 80 d’engager une version largement revue de la VAZ-2121. Pourtant, à première vue, cette voiture n’avait rien d’extraordinaire et pouvait passer pour une Niva ordinaire aux pneus larges, préparée pour les courses de tout-terrain. Mais à mieux y regarder on pouvait voir que ses proportions étaient inhabituelle. On lui avait rallongé le museau pour permettre le montage d’un moteur V6 !

Le vice PDG et directeur des ventes de Lada Motors Cars Australia, Alan Hawker, considérait en effet que le plus gros défaut de la Niva était son asthmatique moteur 1600 cm3... Un défaut à relativiser par un nombre inégalé de succès depuis son premier engagement en 1984 au pays des kangourous. Ce manque de puissance lui avait tout de même permis de gagner plus de courses dans la catégorie des voitures strictement de série que n’importe quelle autre marque ou modèle jusqu’alors. Alan Hawker souhaitait toutefois faire mieux et dressait un constat simple : « Ce sont ceux qui roulent dans la catégorie « Open-Class » qui attirent toute l’attention des médias et c’est pour cela que nous avons décidé que si nous pouvons pas les battre, nous pouvons au moins essayer de le faire ! ».

Pourtant, dès sa première sortie le nouveau prototype remporte la course face à la crème du off-road australien ! Comment expliquer que la petite équipe d’une importateur nouvellement implanté dans le pays et disposant de peu de moyens ait réussi à faire d’une voiture de 14 ans, quelque chose d’aussi rapide et aussi fiable ? Simplement parce que ce succès repose sur Alan Hawker, un homme qui depuis 1983 a mis de côté toute vie sociale pour se consacrer à son « Niva racing program ».

Directeur des ventes, il doit se battre pour convaincre. Le public pense le prix de la Niva surévalué face à un certain nombre de 4x4 japonais. La chute du dollars australien face au yen va lui donner une nouvelle chance. Alan Hawker imagine qu’un engagement en compétition va permettre au 4x4 russe de se faire un nom sur le marché. Dès 1984, la Niva remporte le « 85 Ye Olde BP Rally » et participe aux quatre manches du championnat australien de off-road. Les pilotes, John Bloem, Geoff Portman et les frères Brown, font tout ce qu’ils peuvent pour ne pas y faire que de la figuration. Les deux années suivantes, ils remettent cela. En 1987, les voitures sont engagées au « Wynn’s Safari » où elles remportent les 3 premières places. L’année suivante une toute nouvelle Niva, transformée en cabriolet par l’importateur australien, y est également couronnée de succès.

« Même si nous avons virtuellement gagné toutes les épreuves auxquelles nous avons participé, nous sentions que nos voitures n'avaient pas dans les médias la visibilité qu'elles méritaient. Nous devions donc les rendre plus rapide pour qu’elles partent du haut de la grille » raconte Alan Hawker. Le pilote numéro un de l’équipe, John Bloem, fait le même constat. Tout ce dont a besoin la voiture, c’est 60 km/h de plus. La vitesse maximale de la Niva n’est que de 140 km/h et il faudrait qu’elle roule à 200 km/h pour être au niveau des voitures engagées en « Open-Class ». Alan Hawker comprend alors que pour obtenir la médiatisation souhaitée, il faut modifier la Niva pour l’engager en catégorie « F », une catégorie qui laisse beaucoup de liberté et permet une augmentation de la cylindrée.

Malheureusement les Lada sont limitées par leurs petits 4 cylindres. Alan Hawker doit donc aller voir ailleurs pour trouver un moteur plus gros. Holden est le premier approché. Leur nouveau V6 3,8 litres serait idéal, mais il est trop gros. « Le règlement stipulait que le nombre des cylindres ne pouvait pas être multiplié par plus de deux et comme nous étions limités par la place sous le capot, un V6 semblait la meilleure des options. Mais le moteur Holden était tout simplement trop long et trop large ». L’équipe se tourne alors vers le moteur V6 de la Nissan 300 ZX, couplé à une transmission automatique : « Tout ce que nous avons fait est de couper la voiture en deux, glisser le moteur et la transmission en les fixant à de nouveaux supports et un jour nous avons tourné la clé et cela a démarré ».

Installer le moteur V6 3.0 litres de la Nissan dans la caisse monocoque de la Niva est pourtant loin d’avoir été aussi facile qu’Alan Hawker veut nous le laisser croire. La carrosserie et le châssis ont dû être rallongés de 25 centimètres ! Il y a plus facile comme transformation. Pourtant l’effet final est excellent et à moins de bien connaître la Lada Niva, il peut être difficile de voir la différence. La caisse a été découpée derrière les coupelles d’amortisseurs. Le châssis rallongé avec une grosse plaque de métal soudé. Sur ses nouveaux supports, le moteur Nissan est désormais installé beaucoup plus haut que le moteur 1600 cm3 original.

Comme on peut s’y attendre avec une telle transplantation, il y a eu d’autres modifications. La direction assistée provient ainsi d’une Nissan Skyline et le maître-cylindre d’une Volvo. L’intérieur est typique d’une voiture de rallye-raid avec un trip computer installé sur le tableau de bord, côté passager. Sinon, l’instrumentation classique de la Niva reste en place. Derrière les deux sièges baquets SAAS disposant d’harnais quatre points, on trouve un réservoir de 80 litres.

Pour la course, le coffre est rempli de pièces détachées, de bidons d’huile et d’eau, de manuels de réparation, d’outils, de sangles, d’une trousse de secours, d’une radio UHF... et la liste n’est pas finie. Car en fait, l’équipe ne dispose pas de véhicule d’assistance et le pilote et son navigateur doivent aussi emmener leurs affaires personnelles, une tente et le matériel de couchage dans l’espace restant. Quand on sait que certains rallyes durent 10 jours, vous pouvez imaginer ce qu’il faut réussir à caser entre les tubes de l’arceau de sécurité en aluminium !

Mis à part le moteur et la boîte Nissan, la suspension revue (doubles amortisseurs Bilstein aux quatres roues et ressorts renforcés), le différentiel ZF et les petites modifications mentionnées ci-dessus, la voiture est une Niva totalement de série. On voit bien les autocollants Mobil 1 et les autres sponsors, mais si ce n’est les dimensions et éventuellement le capot en fibre de verre, on n’y voit que du feu. C’est une Niva et l’intention est bien de faire la promotion de la Niva ! A noter que la voiture pèse 1400 kg à vide, 200 kg de plus qu’une Niva de série.

La voiture a été terminée juste pour le départ du « 1989 South Australian Pines Rally ». Plutôt que de l’emmener sur une remorque, elle a effectué par la route 500 kilomètres pour être placée directement sur la ligne de départ. Ce n’est pas forcément la meilleure manière de tester une voiture de course totalement neuve... mais John Bloem et son co-équipier Doug Embrey vont remporter là leur première victoire ! Alan Hawker a dit par la suite qu’il s’agissait là d’une mise en jambe qui a permis d’apprendre beaucoup de choses sur la voiture. Après la course, le « Race and Rally Team Lada » vont changer les réglages de suspension, renforcer le compartiment moteur et abandonner la transmission automatique au profit d’une boîte manuelle cinq rapports de Nissan 300 ZX.

La Niva Hawk (puisque c’est le nom que l’équipe a donné à la voiture) a été prise en main pour un court essai par le magazine australien Overlander en novembre 1989, juste avant l’Australian Safari où elle allait finalement abandonner. Le journaliste a noté que la voiture est assez raide et que les sièges baquets SAAS font de leur mieux pour adoucir les à-coups remontées par la route bosselée. Il imagine ce que le pilote et son co-pilote doivent endurer pendant la course. A l'époque Alan Hawker assurait que la voiture avait encore du potentiel : « Nous sommes autorisé à faire n’importe quelle modification sur le moteur, mais nous pensons que cela rendrait la voiture encore plus difficile à conduire et qu’elle deviendrait peut-être un peu caractérielle ».

Le plus excitant dans ce projet, c'est que Lada Australia ne souhaitait pas s’arrêter là : « Nous avons l’intention de produire ce véhicule comme une voiture de rallye compétition-client. Vous devez payer environ $70,000 pour un 4x4 capable des mêmes performances que le Hawk. Nous pensons que nous pouvons en fabriquer d’autres pour un prix bien inférieur, même avec une transmission automatique et direction assistée » affirmait à l’époque Alan Hawker. Qu’est devenu le projet ? Aucune information supplémentaire à part l'article d'Overlander, mais il semble que la voiture ait été détruite par les flammes (à en juger par la photo qui accompagne les scans).

Vu sur : http://www.ladaniva.co.uk/baxter/resources/Hawk.htm
A compléter par ce forum pour une photo supplémentaire : http://ladanivawourldwide.freeforums.org/niva-hawk-t71.html
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #Lada, #Niva, #Prototype, #Sport, #Australie