L’industrie automobile soviétique n’était pas riche en modèles intéressants. Enfin, on en trouvait quand même, comme la Pobieda, produite de 1946 à 1958, une voiture qui était considérée à l’époque comme très moderne, que ce soit du point de vue de son dessin que d’un point de vue technique. Il y a aussi la VAZ-2121 Niva, le pionnier des tous-terrains soviétiques compacts et confortables. Parmi ces voitures, la Volga GAZ-21 se démarque nettement. Il est impossible d’expliquer pourquoi les Russes vouent un véritable culte pour ce modèle. Pas un seul citoyen soviétique pourrait trouver quelque chose de mauvais à dire sur cette voiture.
La Volga doit beaucoup à la Pobieda. La GAZ M-20 était considérée comme une bonne voiture : carrosserie ponton, bonne performance aérodynamique, suspension avant indépendante, freins hydrauliques, boîtes de vitesses synchronisées. Mais elle avait aussi des défauts expliquées par la période sombre de l’après-guerre. Les premiers modèles brillaient par leur piètre qualité de construction. La Ford Mainline a vraisemblablement été une source d’inspiration pour les ingénieurs de GAZ, même si dans l’ensemble, la GAZ-21 semble beaucoup plus élégante. Les premiers modèles ont une calandre a 10 trous. Cette pièce distinctive a ensuite été abandonnée en raison du mécontentement de Georgui Zhukov, le Ministre de la Défense de l’URSS. Elle a été remplacée par une calandre où l’étoile « rouge » figure en bonne place.
Alexandr Nevzorov était le chef de projet de la GAZ-21. La Volga n’était pas un simple restylage de la Pobieda. Il s’agissait d’une toute nouvelle voiture qui faisait appel aux techniques les plus modernes de l’époque. La GAZ-21 dispose d’un habitacle plus spacieux que la GAZ M-20, était plus puissante et aussi plus économique. Elle a été conçue en prenant en considération le fait qu’elle devrait rouler à la fois sur des routes à l’asphalte de mauvaise qualité et aussi sur des chemins accidentés. La Volga était à sa sortie le modèle le plus confortable et le plus richement équipé du pays. Elle était équipée de la radio, du chauffage et même de la boîte automatique, destinée seulement aux personnes privées. Les voitures destinées aux fonctionnaires et aux taxis disposaient, elles, d’une boîte manuelle. Un peu plus tard, la boîte auto disparaîtra complètement.
Sur la photo où l’on trouve la mascotte de capot prise dans un étau, on aperçoit à gauche le designer de la GAZ-21, Lev Eremeev.
Sur le dessin éclaté « aux rayons X », on peut voir que la Volga n’avait rien de révolutionnaire. Elle avait beaucoup de choses en commun avec la Ford Mainline, une voiture que l’Usine Automobile de Gorki a acheté en plusieurs exemplaires en 1954. Les ingénieurs de GAZ avait expliqué qu’ils souhaitaient simplement étudier la boîte automatique, mais on ne peut s’empêcher de remarquer les similitudes qui existent entre les deux modèles.
La GAZ-21 de première génération a été produite à seulement 30,000 exemplaires entre octobre 1956 et novembre 1958. Les premières Volga avait une boîte automatique et un système de graissage centralisé. Malgré ses similitudes avec des modèles étrangers dont la Ford, on ne peut pas dire que la Volga en était une simple copie. La GAZ-21 a beaucoup d’éléments qui lui sont propres. Le dessin des passages de roues avant est plus marqué, le dessin des ailes arrière est appuyé, le coffre arrière est très court, ce qui ajoute à son élégance, et elle est plus compacte.
La deuxième génération est produite de 1959 à 1962. Durant ces années près de 140,000 voitures sont produites. La principale différence avec le modèle précédent se situe dans la calandre, qui ressemble d’ailleurs beaucoup à celle dont disposait les modèles de pré-série.
La troisième génération est produite à partir du début de l’année 1962. Au total, cette GAZ-21 a été fabriquée à environ 420,000 exemplaires. Elle se distinguait par sa calandre à fanons de baleine. Cette calandre ne plaisait pas à Zhukov. Il n’était pas question de se battre avec le vieux maréchal. En quelques semaines, Eremeev prépare une calandre où figure l’étoile mais finalement elle ne fut pas retenue. Sur cette série, la mascotte de capot en forme de cerf est supprimée. Non seulement pour la protection des piétons, mais aussi parce qu’elle est devenue la cible des voleurs. La vraie raison est aussi que sous la pluie, l’eau est projetée par cette mascotte directement sur le pare-brise. La visibilité s’en trouve compromise. Mais, pour des raisons esthétiques, les propriétaires de GAZ-21 de troisième génération installaient eux-même un cerf sur le capot. Ils l’achetaient dans un magasin de pièces détachées.
La brochure publicitaire présentant la seconde génération de Volga. La peinture biton est une option facturée 270 roubles. Il s’agissait d’une somme importante quand on sait que la voiture coûtait en tout 5,100 roubles.
L’intérieur était très riche et moderne à la fois. Il accueillait une banquette très molle et confortable, un tableau de bord magnifique avec un compteur de vitesse en forme de demi-sphère, visiblement emprunté à une Chrysler. La boîte automatique des premiers modèles a été abandonnée rapidement. Non pas parce que les ingénieurs soviétiques n’étaient pas capables de concevoir une bonne boîte, mais parce que ce type de boîte demandait une très bonne qualité d’huile et un entretien rigoureux. Moins d’un millier de GAZ-21 avec ce type de boîte a été produit. De nombreux propriétaires ont même payé pour remplacer cette boîte par une boîte manuelle.
Le break, appelé GAZ-22 a été lancé en 1962. Étrangement et durant très longtemps, cette voiture pourtant très pratique n’était pas accessible aux acheteurs privés. La Volga avait un intérieur accueillant, un coffre spacieux et de très bonnes caractéristiques dynamiques. En version de base, son moteur 2,5 litres développait 70 chevaux, soit 15 de plus que la Pobieda. C’était une voiture durable et robuste... comme le prouve la photo prise dans la région de Kaboul en 2001.
Un modèle étonnant est la GAZ-23. Une voiture spécialement conçue pour les services spéciaux. Extérieurement, rien ne la distingue des autres Volga, mais sous son capot se cache un moteur V8 de 5,5 litres développant 195 chevaux. Avec ce moteur, la Volga pouvait passer de 0 à 100 km/h en 16 secondes et atteindre une vitesse de pointe de 160 km/h, de très bonnes performances d’autant plus qu’elle était équipée d’une boîte automatique et non pas mécanique. Elle a été produite à 603 exemplaires.
La Volga et la course sont des concepts incompatibles, mais pourtant cela ne l’a pas empêché de participer à des rallyes internationaux. Elle n’a jamais rien remporté mais la presse internationale occidentale s’y est intéressée de manière flatteuse. « La qualité générale de construction est proche des meilleurs standards mondiaux. Vous ne trouverez dans la Volga aucun signe de mauvais assemblage ou de matériaux de finition de mauvaise qualité » indiquait par exemple le magazine Autocar.
Le cosmonaute soviétique Iouri Gagarine a été l’un des propriétaires les plus célèbres de GAZ-21. Soit dit en passant, peu de gens savent qu’il est allé dans l’espace avant d’avoir son permis de conduire. Plus récemment, on compte Vladimir Poutine parmi les personnalités roulant en Volga GAZ-21.
En Italie, la GAZ-21 a été modifiée par Ghia. Les plus grands changements portent sur la calandre. Il était peu probable que les grands stylistes italiens s’intéressent à une voiture soviétique, et pourtant la Volga a eu cet honneur. De manière générale, en dépit de quelques critiques plutôt sympathiques, la Volga n’a pas été particulièrement populaire à l’ouest. Les raisons sont diverses. Par exemple la présence sur sa calandre de l’étoile n’était pas fortement appréciée quand on sait qu’à l’époque de nombreux pays occidentaux se trouvaient sous la menace communiste.
Il y a toutefois eu des GAZ-21 avec conduite à droite. Mais même sans étoile sur la calandre, la voiture n’a pas rencontré de succès en Grande Bretagne. En Belgique, Scaldia Volga a essayé de populariser le modèle en y installant des moteurs diesel Peugeot et Rover. Ses qualités de confort sur route dégradés n’étaient pas si importantes pour les occidentaux habitués aux « belles » routes. En revanche, les pays scandinaves proches du climat russe, ainsi que la Grèce et ses mauvaises routes appréciaient beaucoup la Volga.
Le 15 juillet 1970, la dernière Volga GAZ-21 a été fabriquée. Elle a été remplacée par la GAZ-24 qui ne connaîtra pas la même popularité. A ce jour, la GAZ-21 est l’une des voitures classiques les plus populaires en Russie. Elle est à juste titre la Volga la plus populaire de tous les temps. Elle a souvent joué dans des films, les chauffeurs de taxis aimaient sa fiabilité, sa simplicité d’entretien et le douceur de roulement et le confort qu’elle offrait aux passagers. Elle était très populaire parmi les acteurs, les chanteurs, les cosmonautes et les hommes politiques. Elle est le symbole de toute une époque de l’ère soviétique. Les gens sont prêts à donner beaucoup d’argent pour cette Volga. Il faut compter de 1,5 à 2 millions de roubles pour un exemplaire bien conservé.
Lu sur : http://auto.fishki.net/comment.php?id=117546
Adaptation VG