Je l'ai vue pour la première fois au Salon de l'Auto de Moscou en 1998. J'avais eu le sentiment que les ingénieurs russes reprenaient le combat : GAZ venait de présenter trois nouveaux modèles. La 3103, la 3104 et la 3111. C'est cette dernière qui m'avait tapé dans l'oeil. La carrosserie m'avait frappé par son design audacieux mais aussi par ses dimensions. L'intérieur aussi m'avait beaucoup plu et je venais de comprendre que la "Volga" habituelle, considérée comme le maître étalon de la production nationale, venait de prendre un sacré coup de vieux.
Quelque temps plus tard, je m'étais réjoui de voir que les premiers prototypes roulaient et que la voiture fut mise en production. On voyait même apparaître quelques pièces de rechange dans les magasins spécialisés. Mais le rêve fut de courte durée en raison d'un prix de vente excessif et la décision d'arrêter la production.
Un soir un ami m'a téléphoné. Quelqu'un vendait la Volga à laquelle je rêvais, avec à peine 4000 kilomètres et quasiment neuve. J'ai été la voir dès le lendemain. Elle me faisait face au fond d'un garage dans sa teinte bordeaux foncé et ses grands yeux de chat. Mon coeur s'est mis à battre. Je n'étais qu'à un mètre de ce rêve. Jamais la réalité n'avait été aussi proche. Je l'ai examiné rapidement : tout était en ordre, tout fonctionnait, pas de bosse, pas de trace de peinture récente. Elle n'avait qu'une éraflure sur le pare-choc.
L'affaire fut conclue. Et ce n'est pas les bruits de suspension avant, ni le ronronnement en provenance du collecteur d'échappement que je découvris sur la route de la maison qui me contrarièrent. J'étais toujours dans mon rêve.
Mais les vrais ennuis, dans la plus pure tradition de le notre industrie nationale, ont commencés à peine arrivé à la maison. La portière conducteur était impossible à verrouiller. Dans la neige, je n'ai pas pu démonter totalement la garniture de portière. J'ai réussi à passer la main et je me suis aperçu que la tringle de porte était désolidarisée. J'ai fait une petite réparation de fortune et tout est rentré dans l'ordre.
Les premiers kilomètres m'avaient laissés d'agréables impressions. J'avais été frappé par la progressivité de l'assistance de direction et par la précision des informations en provenance de la route à toutes les vitesses. Le chauffage m'avait aussi beaucoup plu. On pouvait conduire en petite chemise par -30°C, et après l'extinction du moteur il permettait de chauffer l'habitacle pendant encore 10 à 15 minutes. Le moteur démarrait au quart de tour les matins de gel, et après 10 à 12 minutes la température était idéale, et les gicleurs de lave-glace, les rétroviseurs et la lunette arrière totalement dégivrés. En un mot, elle avait tout d'une grande.
Quand mes finances me le permirent de nouveau, je me suis penché sur les petits problèmes. J'ai remplacé les coupelles d'amortisseurs et la suspension redevint silencieuse. Il me restait à régler le problème d'échappement. Sur la 3111, le collecteur d'échappement est et son écran protecteur sont spécifiques, et à la suite d'un choc l'écran a bougé et les vis le maintenant on déchiré la tôle (selon les représentants de la marque, cette fragilité était l'un des défaut de jeunesse du modèle). Le propriétaire précédent avait essayé de refixer cette pièce mais avait aggravé le problème et abîma le collecteur : il fallut remplacer purement et simplement les deux pièces.
En remplaçant moi même le liquide de frein, j'ai faussé la vis de purge du cylindre arrière droit. J'ai racheté la pièce, mais je décidais de jeter un oeil au reste du circuit et j'ai constaté une fuite au niveau du maître cylindre et j'ai décidé de provisoirement court-circuiter l'un des circuits de freinage ... (!). J'ai bien remarqué que les freins étaient devenus un peu mous. Mais aujourd'hui, après avoir remis le système en état, le problème est résolu.
Les pédales d'embrayage et de freins offraient une sensation bizarre. A y regarder de près les boulons étaient absents ou dévissés ! Encore un ou deux freinage et ... J'ai remis des boulons et maintenant je n'ai plus peur des freins.
En roulant j'avais parfois l'impression que le moteur était poussif. Surtout à l'accélération. J'ai remplacé le filtre à air (et son emplacement) par un modèle Pro-Sport. La voiture est devenue plus vive et la consommation de carburant est redescendue dans les normes constructeur. Malgré cela, si le moteur ZMZ-405 est suffisant, on sent bien qu'à bas régime il a du mal à entraîner cette voiture de deux tonnes.
Le relais du démarreur a rendu l'âme à 14OOO kilomètres. Et il était impossible de commander au garage la pièce : il n'est pas censé griller ! Mais j'ai eu de la chance, car mon garagiste venait de jeter un démarreur de la même marque et le relais était en état ! La réparation m'a coûté 200 roubles, alors que j'aurai du payer près de 2000 roubles pour un démarreur neuf.
Malheureusement je ne faisais pas toujours les bons choix. J'avais remarqué que le ventilateur se déclenchait tardivement et que le moteur chauffait un peu. J'ai décidé de changer la sonde TM108, pour une pièce italienne. Je l'ai payée 2190 roubles. Bien mal m'en a pris : le radiateur a rendu l'âme. J'ai eu la chance que le radiateur de la 3111 mesure 60 mm de plus que celui de la 3110. J'ai donc monté un nouveau radiateur de 3110 acheté d'occasion, alors que j'aurai du débourser plus de 6000 roubles pour celui spécifique de la 3111.
Concernant le confort et la facilité de conduite. La voiture est agréable mais elle commence à être un peu bruyante vers 120-130 km/h. Je crois que le collecteur d'échappement est à mettre en cause (il est manifestement mal étudié). La voiture tient vraiment bien la route et dans les virages on a même l'impression d'être sur des rails. Malgré ses freins arrière à tambour, la voiture freine bien, même si un peu plus de mordant ne ferait pas de mal. Le déclenchement de l'ABS est nettement perceptible. Il n'y a rien à dire sur la suspension avant ou le pont arrière qui sont extrêmement classiques. Et on pourrait reprocher à la boite de vitesse la difficulté pour enclencher la première.
L'habitacle est vraiment bien : vaste, avec tous les équipements sous la main, sans craquements parasites ou de garnitures qui se détachent. J'aime beaucoup l'efficacité des réglages de la colonne de direction et du siège conducteur. Le pédalier est également très agréable. L'équipement est pléthorique : jantes alliages, ABS, verrouillage centralisé (des portes avant seulement ?), serrures électriques pour les portes arrières qui permettent une fermeture en douceur (équipement apparu la première fois sur les Mercedes Classe-S W140), vitres électriques, autoradio. J'aime aussi les commandes intérieures de l'ouverture à distance du capot, du coffre et de la trappe à essence.
La qualité de la peinture est remarquable : elle est peu sensible aux impacts de gravillons. Et les soubassements ne nécessitent pas de traitement supplémentaire.
Lorsque je me demande si le rêve a maintenant disparu, je me dis que NON ! Les voitures idéales n'existent pas. Mais je suis vraiment très fier qu'on a réussi à construire une telle voiture, chez nous en Russie !
Nota de Za Roulem : La GAZ 3111 Volga a été présenté au MIMS 1998 (le Salon de Moscou). Les premiers exemplaires ont été fabriqués en petite série à partir de 2000. Elle a été commercialisée à Moscou en 2001 au prix de 14500$. La production a duré moins d'un an et quelques centaines d'exemplaires seulement ont été assemblés et vendus essentiellement à des organisations gouvernementales. Actuellement on peu encore trouver des voitures neuves au prix de 14500$ chez des garages de Nijni Novgorod.
Lu sur : http://www.zr.ru/content/articles/9960-v_shage_ot_mechty/
Adaptation VG