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Cinq voitures que les Russes peuvent regretter.

On pense souvent que l’industrie russe n’est capable de rien. Et il est vrai qu’actuellement elle n’a à son actif que des Granta et Priora dont les haut-fonctionnaires ne cessent de s’enorgueillir face aux caméras de télévisions (eux qui pourtant n’hésitent pas une seconde à remonter ensuite à l’arrière de leurs berlines allemandes pour se rendre au banquet suivant). Pourtant si l’on regarde dans le passé il faut se rendre à l’évidence : la Russie a eu toutes les chances de produire des voitures originales. Des voitures qui auraient pu changer le visage de son industrie automobile nationale. Mais elle a laissé passer toutes ces chances...

L’objet de cet article n’est pas de parler des projets inhabituels qui ont jalonné l’histoire de l’automobile russe - d’ailleurs il n’y en a pas eu tant que cela - mais uniquement des modèles qui devaient entrer à coup sûr en production. Certains ont d'ailleurs même atteint ce stade mais ils ont vite été retirés de la chaîne !

1) Le Projet C :
C’est le géant automobile de la Volga, AvtoVAZ, qui nous a durant de nombreuses années nourri avec la promesse de mettre en production l’année suivante (ou au pire dans les deux années qui suivraient) un nouveau modèle qui permettrait d'amener l’industrie automobile russe à un tout autre niveau.

On a commencé à parler de cette voiture au début du siècle. Vladimir Kadannikov, qui dirigeait alors AvtoVAZ, voulait constuire une voiture du segment D qui deviendrait le véritable porte-drapeau de l’industrie automobile russe. Cette voiture portait le nom de VAZ-3116 (à l’époque on produisait encore la Volga, mais plus personne ne s’y intéressait vraiment). Après l’éviction de Kaddanikov, les « moscovites »ont pris les rênes d’AvtoVAZ (c’est ainsi qu’on nommait les personnes originaires de la capitale et qui dirigeait désormais la société de Togliatti) et ils ont décidé de modifier quelque peu le projet. Comme l’acheteur n’était pas prêt pour acheter un grande et coûteuse Lada, on a donc décidé de se concentrer sur la création d’un modèle plus compact. C’est ainsi qu’est apparue une voiture du nom de « Siluet » (code usine 2116) vue pour la première fois au Salon de l’automobile de Moscou en 2004.

Par la suite, Togliatti a systématiquement montré de nouvelles versions de ce modèle connu comme « Projet C ». Le dessin a été légèrement modifié, l’intérieur a été amélioré, à tel point que même les employés de l’usine ont commencé à parler du « Projet C » comme si la cette voiture était déjà en place sur les lignes de production ! On discutait des équipements possibles, des différentes carrosseries et de l’ordre de leur apparition sur la chaîne de montage. On nous annonçait une large gamme. Outre la berline, on voulait faire une version hatchback, un break, un minivan et même un crossover. Le dernier prototype de cette série, appelé C-Cross, a été présenté en 2008, et on disait alors qu’il serait mis en vente en 2012 au prix de 450,000 roubles...

Le projet était en effet très prometteur. Les ingénieurs de Togliatti avaient fait une voiture qui n’était pas pire qu’une voiture de marque étrangère que ce soit en matière de design, de qualité d’assemblage de l’intérieur ou pour le nombre de défauts potentiels. Et même en matière de sécurité puisque selon eux, les premiers crash-tests effectués en 2006 avaient montré que la voiture obtiendrait facilement 4 des 5 étoiles possibles. D’un point de vue technique, le « Projet C » était aussi très intéressant : suspension arrière multibras, nouveaux moteurs 1,6 , 1,8 et 2 litres (on parlait même de diesels), quatre roues motrices, transmission automatique !

Au début, ils voulaient faire la voiture eux-mêmes, puis ils ont fait appel à la société canadienne Magna avant d’entrer en partenariat avec Renault. Malgré de fréquents changements dans la conception de la voiture, le projet continuait malgré tout son développement. Pourtant en 2008 il était clair que ce nouveau modèle était déjà dépassé : en quatre ans les concurrents avaient fait un grand pas en avant alors qu’AvtoVAZ faisait du surplace. C'est qu'entre temps était survenu la crise économique... Finalement en septembre 2009 il a été annoncé officiellement que le « Projet C » était abandonné. C’est ainsi que l’industrie automobile russe a perdu ce modèle.

2) Volga :
Les Volga ont toujours été un rêve pour tout citoyen soviétique. Mais dans les années 90, ce modèle avait terriblement vieilli : même la GAZ-3110 n’était qu’une évolution de la GAZ-24, un modèle conçu dans les années 60 et dont la production n'avait débuté qu'en 1970.

On avait bien essayé de faire une nouvelle Volga dans les années 80, mais le projet 3105 n’avait pas été mené à bout. Dommage ! La voiture était très intéressante car elle avait été créée à une époque où GAZ avait encore du potentiel humain, des connaissances techniques et des moyens pour fabriquer des voitures particulières. Cette GAZ-3105 était précisément la dernière chance pour l’Usine Automobile de Gorki de sauver sa production automobile. Mais ce qui s’est passé n’est qu’une parodie...

En 1999 est présenté à Nijni-Novgorod un modèle portant le nom de GAZ-3111. Une voiture au design extraordinaire - voire courageux - et capable de faire sensation. Pourtant ce n’était pas un prototype mais bien un modèle de production. Mais relisez la date de sa présentation et rappelez-vous qu’en 1998 le rouble s’était effondré et que la crise économique avait fait rage dans le pays et que les gens n’avaient tout simplement plus d’argent. Pourtant, étrangement, GAZ a mis en vente la voiture et longtemps elle a été fabriquée dans l’atelier « artisanal » de GAZ avec tous les problèmes qualité auxquels on pouvait s’attendre. En 2000, 53 voitures ont été fabriquées et 342 en 2001...Pour ce modèle exclusif, on demandait une somme d’argent insensée, de l’ordre de 15 à 16 mille dollars quand une GAZ-3110 normal valait trois fois moins cher ! Pour cette somme on pouvait trouver beaucoup de voitures étrangères assez décentes. Pourtant cette nouvelle Volga n’était pas un modèle de technologie : pour s'en convaincre il suffit de dire qu’elle avait encore des ressorts arrière à lames. Au final, il s'agissait d'une voiture étrange. Très étrange. Combien d’argent GAZ a-t-il dépensé pour lancer la production de cette Volga ? Cela reste un grand mystère d'autant plus que l’usine n’a pas été en mesure de fabriquer plus de 500 GAZ-3111 (les chiffres divergent sur ce point).

Si la dernière GAZ-3111 a été produite en 2004, cela n’a pas mis fin à la vie de la Volga. C'est en 2007 au Salon de l’Automobile de Moscou qu'a été présentée la Siber et à la mi-2008, il a été solennellement annoncé le lancement de la production en série d'un nouveau modèle portant le nom de Volga Siber. C'est-à-dire que Volga n’était plus seulement le nom d’un modèle mais aussi celui d’une marque indépendante !

Pour tous les fans d’automobile russe, c’était une vrai bonne nouvelle. Mais à part le nom, cette voiture n’avait rien de très russe : c’était seulement une Chrysler Sebring légèrement modernisée, un modèle qui n'était déjà plus fabriqué aux USA. Les acheteurs échaudés de l’époque n'ont pas voulu pas acheter cette voiture de conception déjà ancienne qui n'était pas seulement assemblée en Russie, mais qu’il fallait ensuite entretenir auprès de revendeurs habitués à travailler sur des GAZelle. Les prix aussi n’avaient rien d’attrayants : en 2008 une Siber avec un moteur 2,4 litres coûtait près de 600 mille roubles ! Pour le même prix vous pouviez acheter une Ford Focus bien équipée ou une Hyundai Sonata. Par la suite, les prix ont commencé à baisser. GAZ a même essayé de stimuler les acheteurs en vendant les voitures à perte, mais en vain...

Pour la Siber, GAZ avait des plans napoléoniens. Vendre chaque année près de 100 mille voitures. En fait, l’histoire c’est terminée très tristement. Fin 2010 la production a été interrompue. Et GAZ aurait pu arrêter la production bien plus tôt s'il n'avait pas fallu faire quelque chose avec le grand nombre de collections de pièces achetées à Chrysler...

3) Michka :
1997. Au Salon de Moscou est exposée une voiture créée par la compagnie Avtoselkhozmach-holding et portant le nom rigolo de Michka. La Michka devait devenir la voiture la moins chère de tous les pays de l’ex-URSS et de nombreuses entreprises - pas seulement en Russie - avaient fait part de leur désir d’organiser sa production (par exemple, il avait été annoncé que l’assemblage de la Michka débuterait rapidement chez le biélorusse BelAZ). En outre, cette voiture avaient également suscité l’intérêt des Américains qui avaient promis de la rebaptiser « Michael » !

On voulait faire non seulement une trois portes à hayon, mais aussi un break, une fourgonnette, un véhicule hybride et une voiture pour les handicapés. Le nombre total de modifications et versions étaient de 145 ! C’est la conception même de la Michka qui permettait de faire ce que l’on voulait : elle se présentait comme un carcasse tubulaire sur laquelle était montés des panneaux en plastique.

Même le champion du monde d’échecs Anatoly Karpov s’est intéressé au projet. Il semblerait que la voiture puisse encore être mise en production. Mais la Russie a-t-elle encore besoin de cette Michka, inventée il y a de cela 16 ans ?

4) Kombat et Ataman :
Les dirigeants de l’Usine Automobile de Gorki ont compris au milieu des années 90 que le marché russe avait besoin de nouveaux véhicules tout-terrains : la Niva ne suffisait plus. En 1996 a été présenté un véhicule baptisé GAZ-2308 Ataman et se présentant comme une sorte de réponse russe aux gros pick-ups américains. L’Ataman n’était pas un crossover léger mais un véritable petit camion capable de transporter 800-1000 kg.

Cependant le GAZ-2308 avec son châssis de camion avait tout de la solution de la dernière chance : l’usine devait trouver du travail pour ses chaînes de montage proche de l’arrêt et c’est pourquoi l’Ataman était un hybride entre la Volga et le camion GAZ-3307 Gazon. De ce dernier, le pick-up recevait par exemple la cabine. Ce n’est qu'ensuite qu’est apparu l’Ataman-Ermak qui se positionnait plus comme un SUV.

En 1999, le GAZ-3106 Ataman-2 fait l’effet d’une bombe avec sa face avant au design inhabituel. On pensait avoir trouvé là le modèle prêt à être fabriqué en série. Mais non. En 2000, au salon de Moscou, GAZ présente un autre 4x4 totalement différent portant le nom de GAZ-2169 Kombat. Le chiffre 69 n’a rien d’anodin. Selon les représentants de GAZ, la nouvelle voiture doit être l’héritière idéologique de la fameuse GAZ-69.

Malgré son design controversé, le Kombat a beaucoup plu, non seulement par son design mais aussi par ses capacités en tout-terrain. Il était capable de franchir des gués de 600mm de profondeur et gravir des pentes jusqu’à 30 degrés. Sous son capot on trouvait un moteur diesel 2,1 construit sous licence Steyr (soit dit en passant, il s’agit encore d’un projet étrange de GAZ). Les experts de la revue Za Roulem ont d'ailleurs remis à l’Usine Automobile de Gorki, le Grand Prix du Salon de Moscou pour « le respect à la tradition de la marque dans ces nouveaux véhicules ».

Pourtant, la tradition n’a finalement pas été perpétuée. L’héritier du GAZ-69 n’a pas été mis sur la chaîne. GAZ a pourtant essayé plusieurs fois de revenir au thème du véhicule tout-terrain en 2003-2005 en montrant une nouvelle version du GAZ-3106 Ataman-2, mais il n’y eu pas de suite...

5) « La Nouvelle Classique » :
Saviez-vous qu’AvtoVAZ aurait pu encore produire des voitures à propulsion arrière ? Nous ne parlons pas des ennuyeuses Piaterka (2105) et Semerka (2107). Au début du siècle, Togliatti a sérieusement envisagé de commencer la production d’une « Nouvelle Classique ». Au Salon de l’Automobile de Moscou de 2002, Lada a même présenté une voiture baptisée VAZ-2151 Classic.

Initialement on voulait faire cette « Nouvelle Classique » une voiture dans le style néo-rétro, un style à la mode à l’époque. Même son nom reflétait cette tendance. Pourtant la direction a décidé de ne pas se risquer et finalement la voiture n’a pas été aussi audacieuse que ce que les designers d’AvtoVAZ voulait faire.

La VAZ-2151 Classic devait donc remplacer totalement la vieille « Klassika » à l’horizon de 2006 et l’on parlait d’une production de 220,000 exemplaires par an. Même son prix avait été annoncé : pas plus de 4,000 dollars ! Mais, il était évident que la voiture de production serait beaucoup plus chère puisque la VAZ-2151 n’était pas qu'une ancienne Kopeïka avec une nouvelle carrosserie. La voiture devait être totalement nouvelle. Par exemple la suspension avant était de type McPherson. En outre, on prévoyait la direction assistée et on parlait même d’un airbag ! De plus, la voiture devait être beaucoup plus spacieuse que la vieille Lada. Tout ce modernisme faisait de la VAZ-2151 Classic une voiture de plus en plus chère.

En 2002, Togliatti parlait de la future « Nouvelle Classique » avec enthousiasme. En 2003, on en parlait beaucoup moins et en 2004 il était devenu clair que ce projet était mort-né, AvtoVAZ ayant jeté toute ses forces dans le lancement de la Kalina (justement lancée cette année-là). Les Russes peuvent donc regretter également la « Nouvelle Classique ».

Lu sur : http://auto.mail.ru/article/43995-5_avtomobilei_kotorye_my_poteryali/
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #Prototype, #Top, #VAZ, #Lada, #Projet-C, #2151, #GAZ, #Ataman